INfluencia : sommes nous réducteurs si nous disons que les deux leviers principaux de l’afro-optimisme sont, primo, une prise de leadership dans un certain usage des innovations technologiques et, secundo, un changement de paradigme dans l’investissement, passé de l’offre à un ciblage précis d’une demande ?
 
Lionel Zinsou : je suis parfaitement d’accord avec le premier point. Il se trouve que nous sommes aujourd’hui capables en Afrique d’utiliser les technologies pour résoudre des problèmes fondamentaux. Le digital, les énergies renouvelables, certains développements médicaux comme la télé-médecine, ou bien le croisement entre numérique et éducation, comme les Mooc, vont changer l’Afrique parce que tous ces vecteurs répondent exactement à ses besoins. Quand vous avez des millions d’enfants à scolariser chaque année, l’accès à des technologies nouvelles à coûts marginaux très faibles, change complètement la donne. Même chose pour la santé, pour l’accès à l’énergie et aux financements. Si vous voulez, l’Afrique invente des solutions qui ne sont pas du tout en usage dans les pays développés. Elles sont déjà beaucoup plus familières en Chine, en Inde et dans toute une partie du monde qui inventent des nouveaux usages sociaux de la technologie. Pour la fierté du continent c’est très important de se dire que nous sommes les premiers dans notre genre, que nous faisons des choses que les autres n’ont jamais fait et qui sont plus efficaces que des modèles qui seraient importés des pays développés. Donc oui, pour répondre à votre question c’est évidemment un moteur de croissance très important et une racine d’optimisme primordiale.
 
Maintenant en ce qui concerne les investissements, ce qui est très important c’est que nous allons pouvoir commencer à investir dans des activités qui créent de l’emploi. Jusque-là nous avons été obligés d’utiliser tout le capital disponible pour construire des infrastructures car on nous a laissé un continent non équipé : pas d’hôpitaux, pas d’infrastructures sociales, pas d’écoles en nombre suffisant, pas de ports, de routes, ni d’électricité. En 2017, 70% des Africains sont encore dans l’obscurité. Or, quand vous devez financer de l’équipement, de l’énergie, de l’accès à l’eau, vous ne créez pas d’emplois, ce qui pose un problème terrible pour la jeunesse. Maintenant que nous sommes un peu mieux équipés, nous pouvons commencer à investir plus dans les services, pour l’hôtellerie, pour les industries de transformation et là vous avez des gisements d’emplois. L’investissement va commencer à être utile socialement par l’emploi.
 

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