La première famille d’arguments, portée par des icônes de la Silicon Valley, comme Elon Musk ou Sam Altman (Y Combinator), considère le revenu universel comme une manière de distribuer les gains de la robotisation à une population devenue plus ou moins oisive. Loin d’être nouveau, ce discours resurgit à chaque rupture technologique, d’Aristote à Jeremy Rifkin . Il repose à la fois sur une erreur économique, l’innovation schumpétérienne ayant toujours fini par compenser la destruction d’emplois, et sur une peur sociale, les nouveaux tycoons craignant une version moderne de la révolte des esclaves.

Autant dire que cette approche, qui fut étonnamment celle du candidat socialiste lors de l’élection présidentielle française, n’est guère partagée par les camarades du BIEN. Le revenu universel doit être déconnecté du discours fantaisiste sur la fin du travail.

Universel ne veut pas dire unique

La deuxième famille d’arguments repose sur la justice sociale. Puisque nous partageons un même droit naturel (Thomas Paine), un même héritage culturel (Herbert Simon) ou une même portion des Communs (Guy Standing), nous devrions recevoir un revenu universel comme une sorte de dû pour notre appartenance à la société. Cette conception peut assez vite déboucher sur une formule égalitariste radicale, qui risque de transformer insensiblement le revenu universel en un revenu… unique.

Je suis donc plus enclin à prendre en compte la troisième famille d’arguments, ancrée dans la liberté individuelle, et défendue par les libéraux de John Stuart Mill à Charles Murray en passant par Hayek et Friedman. Le revenu universel garantit la satisfaction des besoins de base sans laquelle il ne saurait y avoir de libre arbitre, tout en évitant à la fois les distorsions de marché et le paternalisme stigmatisant de l’aide sociale. Il présuppose que l’individu, même le plus démuni, reste le mieux à même d’évaluer ses besoins et d’effectuer ses propres choix.

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