Il y a dix ans, les distributeurs généralistes ou alimentaires avaient encore le temps de se réinventer. Réallouer des surfaces, bannir les silos, travailler la donnée, se centrer réellement sur le client. Mais pour la plupart d’entre eux, il est désormais trop tard. Car autant le mouvement d’un e-commerçant vers la distribution physique a de bonnes chances de fonctionner, autant l’inverse est beaucoup plus difficile, pour les raisons que nous venons de voir. Voyez les échecs successifs de Wal-Mart, premier distributeur mondial, dans ses tentatives de devenir un acteur omnicanal. Les e-commerçants, notamment Amazon, vont continuer d’acquérir des réseaux physiques, d’autant plus aisément que ces derniers sont mal en point. L’acquisition par Amazon de Macy’s et de Carrefour ne diluerait ses actionnaires que de 8 %.
 
Que peuvent alors devenir les acteurs de la distribution, si ce n’est être rachetés par des e-commerçants? Il leur faut réduire drastiquement et rapidement leurs surfaces, se focaliser sur quelques marchés géographiques et/ou sectoriels, où ils pourraient encore faire valoir quelques avantages concurrentiels, du moins pour quelque temps. Pourtant, certains comme Sephora, Best Buy ou Home Depot ont su aller de l’avant et s’ériger en exemples. Ils ont allié des investissements techno- logiques astucieux avec une mise en avant du capital humain, toujours centrés client.
 
Mais la distribution ne souffre pas que de la trans- formation digitale, elle souffre aussi, d’une façon encore plus profonde, de la paupérisation de la classe moyenne dans l’ensemble des pays développés. Or, c’est sur cette classe moyenne qu’elle s’est construite. La distribution physique se trouve ainsi victime d’un effet de ciseau, qu’elle n’a pas su -ni voulu- voir : la paupérisation de son socle historique de clientèle couplée avec la transformation des modes d’achat liée au digital. Elle est passée outre le conseil de Gérard Mulliez, le fondateur d’Auchan : « une bonne approche du client ne se conçoit pas sans une bonne approche de la société de consommation ».

Sourced through Scoop.it from: www.influencia.net