La performance chinoise pose deux questions. La première porte sur sa pérennité. Les autorités pratiquent désormais une politique de « stop and go » qui rappelle celle que menait Londres dans les années 1950 et 1960. Le crédit a explosé en une décennie. Il faut désormais 500 yuans de crédit pour faire 100 yuans de PIB, un taux supérieur à celui de l’Amérique de 2006-2007 avant le grand effondrement de 2008. 

A l’évidence, il va devenir de plus en plus difficile de maintenir la croissance au rythme voulu par le gouvernement chinois pour préserver l’emploi et la progression du pouvoir d’achat. C’est un défi politique formidable pour le pays. C’est aussi un défi économique majeur pour le reste de la planète, qui a largement profité du boom chinois depuis deux décennies.

Pilotage de la consommation
La seconde question  est posée au monde entier, à commencer par l’Europe. Elle nous ramène presque un siècle en arrière. Dans le chapitre fascinant qui clôt sa « Théorie générale », l’économiste John Maynard Keynes en vient à dire que l’Etat doit piloter à la fois le niveau de la consommation et celui de l’investissement. Ce pilotage a joué un rôle central dans la sortie de la Grande Dépression des années 1930, puis pendant la guerre et dans les années suivantes. Il a ensuite été abandonné, d’abord parce que l’économie avait fini par trouver le chemin d’une croissance équilibrée, puis pour des raisons idéologiques. 

La Chine, elle, continue à pratiquer scrupuleusement ce pilotage. Pour réussir la double transition numérique et écologique des décennies à venir, les pays occidentaux devront peut-être y revenir, comme ils l’ont fait brièvement au lendemain de la crise de 2008. En évitant l’écueil allemand, qui est le refus d’agir. Et l’écueil français, qui est la tentation permanente de stimuler la demande en faisant gonfler non pas la croissance mais le déficit extérieur et la dette publique – une tentation qui pourrait bien se tapir sous le dernier plan Macron. 

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