Ce n’est pas parce qu’une crise n’est pas totalement terminée qu’on ne peut pas en tirer de premières leçons. A la mi-temps d’une bataille dont l’issue reste incertaine , l’on doit ainsi déjà reconnaître que les secousses qui affectent aujourd’hui Danone sont susceptibles de laisser des traces allant au-delà du simple cas de ce champion français du yaourt, des petits pots pour bébé et de l’eau en bouteille.

La première leçon de cette crise est que les fonds activistes souvent accusés de tous les maux par un capitalisme douillet savent parfois appuyer à juste titre là où cela fait mal . On peut certes les accuser de tout critiquer bien qu’ils ne contrôlent qu’une fraction du capital et on ne voit pas au nom de quoi ils pourraient avec juste quelques actions dicter leur loi. Mais ils ont incontestablement le mérite de mettre sur la place publique des débats qui trop souvent ne sont pas tranchés derrière les portes closes de conseils d’administration trop prudents ou consanguins.

Dictature ou démocratie
La deuxième est qu’un patron, aussi brillant ou visionnaire soit-il, ne doit jamais gouverner seul. Quelle que soit la forme de gouvernance (conseil d’administration ou de surveillance, PDG ou présidence et direction dissociées), il est crucial que ceux qui dirigent soient face à des contre-pouvoirs. Qu’il s’agisse d’administrateurs ou de cadres dirigeants. Car il est indispensable que l’entreprise soit aussi un lieu de débats stratégiques. Une société n’est ni une démocratie dans laquelle toute décision se prend en consultant tout le monde ni une dictature éclairée sans forces de rappel.

Salomon
La troisième leçon est qu’il est souvent risqué de couper la poire en deux. En refusant de céder à toutes les injonctions des fonds sans pour autant conforter totalement Emmanuel Faber, les administrateurs de Danone jouent avec le feu. Décider de trancher dans le vif contre un PDG affaibli ou renvoyer totalement dans leur but des activistes n’avait sans doute rien d’évident. Mais un jugement à la Salomon pourrait déboucher sur une forme de pourrissement de la situation. Les administrateurs ont jugé que ce risque était pour l’instant moins élevé que le tremblement de terre qu’aurait provoqué une décision radicale. Mais il vaut parfois mieux une crise dure et courte qu’une crise sourde et qui dure. Le conseil de Danone a tranché mais il y a de fortes chances que les fonds continuent de s’agiter et les ailes d’Emmanuel Faber vont être en partie rognées, même s’il n’a pas renoncé à se battre… pour son bien, celui de Danone mais peut-être aussi demain contre un bras droit qui lui aura été en partie imposé ou un Conseil qui l’aura placé en liberté surveillée.

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