Les grands banquiers américains ont très tôt donné leur avis sur le bitcoin et autres cryptomonnaies : ce n’est pas leur tasse de thé. Jamie Dimon, influent patron de JP Morgan, a répété ces dernières années que le bitcoin ne l’intéressait pas, tout comme son alter ego de Goldman Sachs, David Solomon, qui a assuré que le sujet n’était « pas important » pour lui.
Les banquiers savent néanmoins faire la part des choses. Après des « hauts et des bas » ces dernières années, « on est dans une période où des banques s’engagent un peu plus agressivement, voyant que la tendance des cryptos et de la technologie blockchain est là pour durer », pointe Richard Rosenthal, chargé des actifs numériques et de la réglementation bancaire chez Deloitte.
Des initiatives ont été prises. Goldman Sachs avait exploré assez tôt l’idée de pouvoir faire du trading sur le bitcoin, avant de tergiverser. Morgan Stanley a ensuite été la première à ouvrir certains de ses fonds au bitcoin (tout en plafonnant la part du patrimoine que ses clients pouvaient y mettre). JP Morgan lui a emboîté le pas, en ouvrant à sa clientèle fortunée l’accès à plusieurs fonds en bitcoin.

Régulateurs prudents
Les grands banquiers de la place se sont dits plus intéressés par la technologie blockchain. JP Morgan a notamment lancé en 2020 Onyx, une plateforme pour les transactions de paiement de gros. Avec son JPM Coin, elle permet notamment de faciliter les paiements transfrontaliers.
Il reste du chemin à parcourir aux banques avant de proposer toute la palette de services, de la conservation aux prêts en passant par le trading. Et après une administration Trump assez allante, « les régulateurs sont plus prudents », pointe Richard Rosenthal. Le patron de la SEC (Securities and Exchange Commission) a dénoncé le « Far West » des cryptomonnaies et imposé des amendes. La FDIC (Federal Deposit Insurance Corporation), qui assure les dépôts des banques défaillantes, vient aussi de les mettre en garde contre le flou entretenu par les entreprises partenaires du secteur des cryptos.

« Securities » ou « commodities » ?
« L’une des grandes questions qui empêche une diffusion plus large par les banques aujourd’hui est de savoir si les cryptos sont des titres (« securities ») ou des produits (« commodities »), parce que la juridiction ne sera pas la même », entre la SEC ou la CFTC (Commodity Futures Trading Commission), poursuit Richard Rosenthal. Pour élaborer le cadre réglementaire, « il y aura probablement une combinaison de décisions de justice et peut-être un texte législatif », parie-t-il.

Une proposition de loi examinée cet été à la Chambre des représentants tente aussi de clarifier les règles sur les « stable coins » (crypto monnaies dont la valeur est assise sur un panier de monnaies stables, NDLR). « Cela pourrait être une vraie avancée : si vous avez au moins un texte qui commence à fournir une solution législative à une part importante de la crypto économie, cela pourrait être le premier pilier d’un cadre réglementaire », juge Richard Rosenthal.

Négociations bilatérales
D’ici là, les banques évaluent les risques qu’elles veulent prendre, et négocient en bilatéral avec les régulateurs pour obtenir de leur part une « non-objection ». Quelques établissements régionaux et de taille réduite tentent aussi de se créer une niche, à l’instar de Vast Bank (dans l’Oklahoma), qui propose à ses clients d’acheter et vendre des cryptomonnaies, ou de Silvergate en Californie, au service des « pionniers qui ont été écartés par les banques traditionnelles ». Elle propose notamment une plate-forme de paiement en temps réel et propose des prêts adossés à des collatéraux en bitcoin.

Silvergate affichait à mi-année 1.585 clients et 38 millions de dollars de résultat net au deuxième trimestre. Elle a racheté pour 200 millions de dollars la technologie du réseau de paiement de Facebook, après que le géant de l’Internet a renoncé à développer son projet de monnaie virtuelle Diem (ex-Libra).

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