Quelle puissance de calcul et donc d’électricité a été nécessaire pour la rédaction de tous ces rapports ? Impossible de le savoir, mais depuis janvier 2024, il ne s’est presque pas passé une semaine sans que l’Agence internationale de l’énergie (AIE), des banques comme Goldman Sachs ou Morgan Stanley, des capitaux-risqueurs, à l’instar du cabinet californien Sequoia, sans parler des journaux financiers, aiguillonnés par le « Wall Street Journal » et « The Economist », ne publient des études sur l’essor de l’intelligence artificielle et ses conséquences, directes et indirectes, sur l’environnement .Effet le plus difficile à cacher : une soudaine frénésie de construction. Pour répondre à l’explosion de la demande de calcul et de stockage de données, les projets de nouveaux data centers se comptent par centaines à travers le monde, même si de plus en plus d’experts alertent sur la création d’une bulle spéculative autour de l’intelligence artificielle et de son prochain éclatement.
Les prévisions donnent le tournis. Selon ABI Research, une société de conseil en technologie américaine, 8.410 centres de données offrant des serveurs en colocation (le contraire des data centers privés des banques ou des industriels) encombreront la planète d’ici à 2030, contre 5.697 prévus pour fin 2024. Soit un bond de 48 %. Plus d’un quart de ces nouveaux temples du big data seront des hyperscalers -des installations géantes appartenant à Alibaba, Amazon, Google, IBM et autre Microsoft.
Plusieurs de ces fournisseurs de services cloud ont déjà du mal à respecter leurs objectifs climatiques. En 2023, Microsoft a ainsi émis 29,1 % de CO2 en plus par rapport à 2022, Google 13 %. Officiellement, il s’agit, pour la très grande majorité, d’émissions indirectes qui proviennent justement de la construction des data centers. Celle-ci nécessite des matériaux à très forte intensité de carbone : béton, acier, puces électroniques…

Tours de passe-passe
En revanche, l’approvisionnement en électricité des hyperscalers serait plus ou moins neutre en carbone. Bloomberg Green, un site consacré à l’actualité environnementale, dénonce un tour de passe-passe comptable : « Amazon, Microsoft et Meta dissimulent leur empreinte carbone réelle, en achetant des crédits liés à la consommation d’électricité qui effacent de manière mensongère des millions de tonnes d’émissions de gaz à effet de serre de leurs bilans carbone. » Ces entreprises achèteraient des certificats d’énergie renouvelable (CER), qui donnent l’impression que l’électricité provient d’une ferme solaire alors qu’en réalité, elle a été achetée auprès d’une centrale au charbon, par exemple.
Les data centers sont des monstres énergivores devant être gavés en permanence d’électricité pour faire tourner leurs serveurs et pour refroidir ces derniers. Dès 2026, selon l’AIE, tous ces moulins à données pourraient consommer autant que le Japon, 1.000 TWh d’électricité. Soit un doublement par rapport à 2022.

Les écologistes dénoncent une hérésie environnementale ; les fournisseurs d’électricité s’alarment des goulets d’étranglements à venir ; tandis que des économistes dénoncent un risque d’accaparement, par les Gafam, des sources d’électricité, ce qui pourrait raviver les tensions sur ce marché, au détriment, bien sûr, des particuliers.

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