Le bras de fer, ultra-médiatisé compte tenu de la notoriété d’Elon Musk, trouve son épilogue deux jours plus tard. La SEC et le dirigeant fantasque s’accordent sur une nouvelle gouvernance : Elon Musk, qui ne pourra s’empêcher de se moquer du régulateur un peu plus tard dans un nouveau tweet, restera directeur général de l’entreprise, mais devra en abandonner la présidence et nommer deux administrateurs indépendants. Tesla a eu chaud car après la menace publique de la SEC, le cours de l’action s’est effondré de 14% en une séance. Les investisseurs le savent : pour excentrique et incontrôlable que soit le milliardaire, sans son génie et son énergie, la firme californienne aurait du mal à rester en équilibre alors qu’elle est depuis plusieurs années sur une corde raide.
PLUS DE 9 MILLIARDS DE DETTE
« Sans Elon, Tesla ne serait qu’un constructeur plombé par les dettes et brûlant des tonnes de cash », résumait David Whiston, analyste chez Morningstar, à Chicago. Sur le papier, difficile de lui donner tort. Née il y a quinze ans dans un garage près de Palo Alto, dans la Silicon Valley, la start-up est devenue grande : elle affiche une capitalisation boursière comparable à celle de General Motors et emploie aujourd’hui quasiment 40 000 personnes. Mais elle n’a toujours pas gagné un centime et affiche plus de 9 milliards de dollars de dettes Autant dire que sa capacité à devenir un jour durablement rentable pose question.
UNE ENTREPRISE PAS COMME LES AUTRES
Mais la société d’Elon Musk n’est pas une entreprise comme les autres. Voilà quinze ans que ses actionnaires ont des sueurs froides et que les vieux routiers de l’automobile l’enterrent avant l’heure. « Essayer de la comprendre avec une grille d’analyse classique est voué à l’échec : le jour où on pourra affirmer ‘tout roule chez Tesla’ n’arrivera jamais. » Philippe Chain, qui tient ces propos, est bien placé pour en parler : après vingt ans passés chez Renault, cet ingénieur français aujourd’hui consultant a été responsable qualité chez Tesla entre septembre 2011 et décembre 2012. « La société a toujours connu des problèmes et en connaîtra toujours. C’est son mode de fonctionnement. Son savoir-faire, c’est de les résoudre au fur et à mesure. » En frôlant parfois la catastrophe, mais en sachant rebondir in extremis. Jusqu’ici. Depuis le début de l’année, les épisodes n’ont pas manqué pour le prouver.
A DEUX DOIGTS DE LA FAILLITE
En juin dernier, alors que personne ne s’y attend, Tesla annonce la suppression de 9% de ses effectifs, soit 3 500 salariés. « Je pense qu’à ce moment-là, l’entreprise est à deux doigts de la cessation de paiements. Sans cette mesure radicale, elle n’aurait pas pu poursuivre son activité », relève Philippe Chain. Tesla se débat alors depuis plusieurs mois dans « l’enfer de la production » de la Model 3, selon les propres mots d’Elon Musk, et ne parvient pas à générer assez de cash. Avec ce nouveau véhicule, qui succède aux Models X et S, l’entreprise inaugure la production en série. La Model 3 est sa première voiture à afficher un prix « abordable » (35 000 dollars, contre 80 000 minimum pour les modèles précédents). Mi-2017, Elon Musk fanfaronne lorsque les premières Model 3 sortent des lignes : il en promet 500 000 en 2018 et 1 million en 2020. À comparer aux modestes ventes de Tesla en 2016 (76 000) et 2017 (103 000).
Sourced through Scoop.it from: weekend.lesechos.fr
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