Parmi les nombreuses raisons de son échec,  la taxe carbone a buté sur le sentiment que les plus gros pollueurs n’y étaient pas soumis. Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) confirme ce constat dans  un rapport publié ce mercredi sur l’enjeu à 87 milliards d’euros que représente la fiscalité environnementale. L’instance rattachée à la Cour des comptes appelle à revoir les dérogations dont bénéficient de nombreux secteurs économiques, souvent accordées pour des questions de compétitivité, mais qui « rendent les bénéficiaires « insensibles » à la fiscalité carbone ».

Au global, le CPO a dénombré 19 avantages fiscaux défavorables à l’environnement, pour un montant de 5,52 milliards d’euros. La quasi-totalité est rattachée à la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). On y retrouve les exonérations pour le transport aérien et maritime, le remboursement partiel pour le transport routier, le taux réduit dont bénéficient l’agriculture et le BTP.

Principe du « pollueur payeur »
Lorsque la taxe carbone a été créée en 2014, ces secteurs en ont été dispensés. Pour le CPO, c’est « en contradiction avec le principe du « pollueur-payeur » ». Si les pouvoirs publics étaient allés au bout de la trajectoire carbone votée d’ici à 2022, avant le mouvement des « gilets jaunes », l’Etat aurait été amené à consentir 2,77 milliards d’euros d’avantage fiscal rien que pour le transport routier.

La Cour des comptes a dénoncé à plusieurs reprises ces niches fiscales défavorables à l’environnement, la dernière charge remontant à un rapport de 2016. Depuis, « peu d’efforts ont été consentis pour les mettre en cohérence avec les ambitions environnementales de la France et même pour les rendre conformes aux directives européennes », note ce rapport, soulignant que le remboursement partiel de carburant aux taxis ne respecte pas la réglementation européenne.

Soutien économique
C’est souvent l’argument du soutien économique à des secteurs fragiles qui a freiné l’Etat dans cet alignement, ainsi qu’une « fuite d’assiette » vers des pays voisins où le carburant est moins cher. Le CPO balaie cet argument : « La fuite d’assiette est déjà constatée, 75 % des poids lourds étrangers circulant en France ne se ravitaillant pas en carburant en France. Le remboursement de TICPE bénéficie également aux poids lourds étrangers », souligne le rapport.

Le projet de loi de Finances devrait tout de même contenir plusieurs mesures  allant dans le sens de cette recommandation, obtenues après un bras de fer avec les professions concernées. Le taux réduit de gazole non routier dont bénéficie le BTP devrait ainsi disparaître sur trois ans. Les textes budgétaires prévoient également  une hausse de TICPE de 2 centimes par litre pour le transport routier , en plus d’une « écocontribution » sur le transport aérien.

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