Binance a-t-il fait la promotion de ses services en France alors qu’il n’y était pas autorisé ? Quinze investisseurs français viennent de déposer plainte auprès du Procureur de la République, Laure Beccuau, près le tribunal judiciaire de Paris contre le géant des cryptos , a révélé, le 19 décembre, Mediapart. Ces particuliers, accusent Binance de « violation du monopole des prestataires de services sur actifs numériques », de « pratiques commerciales trompeuses » et de « recel d’escroquerie ».

La plainte vise Binance France, présidée par David Pinçay et Binance Holdings Ltd, domiciliée dans les îles Caïmans, et représentée par son fondateur Changpeng Zhao. Elle intervient, après la faillite et le scandale FTX , alors que la suspicion pèse sur ce secteur.
Ces investisseurs ont perdu 2,4 millions d’euros en achetant de l’UST, un cryptoactif dit « stable » (ou stablecoin) développé par l’écosystème Terra qui s’est effondré en mai 2022 en perdant 98 % de sa valeur et en engloutissant 40 milliards de dollars.

Placement « sûr et joyeux »
Dans la plainte que les Echos ont pu consulter, les deux avocats des plaignants, Baptiste Bonhomme et Etienne de Dreuille, du cabinet Reinhart Marville Torre indiquent que « Binance a mis en oeuvre des campagnes de commercialisation et de promotion de l’UST visant des utilisateurs français pour les encourager à acquérir, à échanger et à mettre en dépôt des UST ». Binance aurait qualifié ce cryptoactif de placement « sûr et joyeux », pouvant aller jusqu’à offrir des rendements de près de 20 %.
Surtout, ce collectif reproche à Binance d’avoir exercé ses activités en France alors qu’il n’aurait pas dû. La loi Pacte du 22 mai 2019 a obligé les prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) à demander un enregistrement à l’Autorité des Marchés Financiers (AMF). Sans ce sésame, ils ne pouvaient plus exercer d’activité en France. Et ce, dès le 19 décembre 2020. Un délai reporté au 10 juin 2021 pour certaines activités.
Or Binance, qui a obtenu ce feu vert de l’AMF en mai 2022 , aurait continué la communication et la promotion de ses activités, après ces dates. La première plateforme forme d’échanges de cryptos aurait, via la version française de son site internet, fourni des services à des personnes habitant en France, ou « via des comptes officiels français sur les différents réseaux sociaux en particulier sur Instagram et Telegram » indique la plainte. Ses représentants légaux auraient participé à des conférences, des salons, ou des événements promotionnels se déroulant dans l’Hexagone.

Deux ans d’emprisonnement et 30.000 euros d’amende
Tout prestataire qui viole les règles relatives au PSAN encourt des sanctions pénales, soit une peine de deux ans d’emprisonnement et 30.000 euros d’amende.
Dans l’immédiat, interrogé par les Echos, Binance indique : « Nous ne sommes pas en mesure de commenter car nous n’avons reçu aucune notification relative ni à une procédure pénale ni à une procédure civile et nous n’avons donc pas accès au contenu d’une telle plainte ».
Cette plainte va-t-elle prospérer ? Il est encore trop tôt pour le dire. « Le dossier repose sur la notion de services rendus en France. Est-ce ici le cas ? Et si oui, sont-ils bien prévus par la réglementation boursière et sont-ils concernés par l’enregistrement obligatoire. Les posts sur les réseaux sociaux peuvent-ils être attribués juridiquement à Binance, ou à une communauté proche de l’acteur ? », s’interroge un avocat.
D’autres connaisseurs du secteur se demandent si certains acteurs du secteur, voire des anti-cryptos ne chercheraient pas à régler leurs comptes avec Binance, voire avec les autorités de marché .

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