Ce sont deux projets bien différents que Casino a dévoilés ce lundi, l’un est financier, l’autre très industriel. Le premier consiste en une offre non sollicitée d’augmentation de capital de 1,1 milliard d’euros émanant du milliardaire tchèque Daniel Kretinsky et de Fimalac, respectivement actionnaires à hauteur de 10 % et 2,6 %. Si elle aboutissait, la proposition conduirait à la perte de contrôle du PDG Jean-Charles Naouri qui détient 51 % de Casino via son holding Rallye.
L’autre projet est un approfondissement de l’opération Teract qui vise à la réunion de Casino France (tous les magasins français, Géant, Supermarché Casino, Franprix, Monoprix, Naturalia et les magasins de proximité) avec la société créée par la coopérative InVivo, Moez-Alexandre Zouari, Xavier Niel et Matthieu Pigasse. Intermarché entrerait dans la partie, à plusieurs niveaux.
Viande et poisson Intermarché
Les Mousquetaires de la distribution resserreraient leurs partenariats existant sur les achats. Le projet prévoit que les trois centrales Auxo (alimentaire, non alimentaire et achats non marchands) déjà en place soient reconduites jusqu’à 2028. Elles travailleraient pour la nouvelle structure. Une quatrième cellule d’achat dédiée aux marques de distributeurs s’ajouterait au dispositif. Casino et Intermarché lanceraient leurs appels d’offres en commun via cette nouvelle centrale. Casino et Teract s’approvisionneraient aussi auprès de l’armement de pêche et des abattoirs d’ Intermarché qui possède 56 usines agroalimentaires. A l’inverse, Intermarché bénéficierait de l’expertise en produits frais et locaux de Teract Ferme France, la centrale d’achat que va lancer Teract avec InVivo.
« Avec Casino et Intermarché, d’un côté, et Teract, de l’autre, nous allons pouvoir intégrer verticalement la chaîne de l’alimentation […] et donner une nouvelle dimension à la distribution française », explique Moez-Alexandre Zouari. Le gros franchisé Casino qui détient aussi 49 % de Picard défend une intégration, un renforcement du contrôle de la qualité au-delà des antagonismes traditionnels entre agriculteurs distributeurs et industriels de l’agroalimentaire. En mettant l’accent sur les produits frais et la boulangerie, le nouvel ensemble pourrait en théorie mieux rivaliser avec Grand Frais, l’un des formats qui monte dans la grande distribution.
Dans le schéma annoncé ce lundi, les Mousquetaires disposeront aussi de trois ans pour racheter une centaine d’hypers Géant et des supermarchés. Selon nos informations, la liste est dressée et l’opération pourrait être rapide. Toutes les enseignes Casino sont concernées à l’exception de Monoprix et Naturalia. Il y aura donc des Franprix. Casino préservera ses positions de force en région parisienne (Intermarché récupérera tout de même quelques points de vente), dans le couloir rhodanien et dans le Sud-Est.
Casino sortira en revanche de Bretagne. L’opération pourrait rapporter plusieurs centaines de millions à Casino, selon un expert (30 % du chiffre d’affaires). D’ores et déjà, Intermarché s’est engagé à verser un acompte de 200 millions indique un proche du dossier.
Argent frais
Le communiqué publié ce lundi matin, indique que le parc qui serait cédé réalise 1,1 milliard d’euros de chiffre d’affaires. C’est pour garantir à l’ensemble Casino France-Teract que ce volume d’affaires en moins n’affectera pas ses conditions d’achat qu’Intermarché a accepté la prolongation des alliances à l’achat.
Dans le même ordre d’idée, les Mousquetaires deviendraient actionnaire du nouvel ensemble. Le communiqué chiffre un apport de 300 millions d’argent frais de la part d’InVivo et d’Intermarché. Selon nos informations, la part d’Intermarché sera minime. Casino rappelle par ailleurs que de nouveaux investisseurs sont attendus à proportion de 200 millions supplémentaires. « Le Monde » évoque un engagement supplémentaire de 100 millions de la part du trio Zouari, Niel et Pigasse. Bpifrance pourrait apporter le solde.
Contrats de concession
L’apport en capital de 500 millions plus la vente de magasins à Intermarché doterait l’ensemble Casino France – Teract d’une solide structure financière. L’approvisionnement en produits frais, fruits et légumes en direct auprès des coopérateurs d’InVivo et d’autres producteurs locaux, ainsi qu’auprès d’Agromousquetaires, le pôle industriel d’Intermarché, ferait gagner 4 % à 5 % points de marge prélevés aujourd’hui par des intermédiaires. La nouvelle société générerait alors suffisamment de résultats pour reprendre à son compte une partie de la dette du groupe Casino. Un analyste a évoqué le montant de 2 milliards sur un total de 6 milliards.
L’accord des créanciers de Casino reste nécessaire. Le groupe envisage une procédure de conciliation. En parallèle, le projet industriel avec Teract et Intermarché se mettra en place, s’il perdure, avec le temps qu’il faut pour les fins réglages qu’exige magasin par magasin, la signature des contrats de concession nécessaire à l’installation de boulangeries Louise (la marque de Teract et InVivo) et d’espaces de fruits et légumes.
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