1. Un « pure player » pour séduire les investisseurs
Avec Ampere, Renault veut se donner les moyens pour devenir un acteur majeur de la mobilité électrique, dans le sillage des géants du secteur que sont Tesla et BYD. En créant une entité à part, il s’agit surtout de profiter de l’attrait des marchés pour les « pure players » et d’attirer les financements pour aider le groupe à supporter les très lourds investissements qu’il va devoir consentir pour réussir ce virage.
L’acte de naissance d’Ampere sera rapidement suivi par une introduction en Bourse, espérée pour le premier semestre 2024 et portant sur une partie du capital de la filiale. Dans une interview au « Financial Times » en septembre, Luca de Meo, le directeur général de Renault qui va également prendre les rênes d’Ampere, disait encore espérer une valorisation totale comprise entre 8 et 10 milliards d’euros, équivalente à celle du groupe aujourd’hui.
Les analystes semblent moins optimistes. Ceux d’UBS se sont montrés particulièrement sceptiques, valorisant l’entité entre 3 et 4 milliards d’euros. Le contexte de la naissance d’Ampere n’est, par ailleurs, pas particulièrement favorable , tiraillé entre de fortes tensions macroéconomiques et un ralentissement notable de la croissance des immatriculations dans l’électrique.
2. Nissan et Mitsubishi dans l’aventure
Ampere n’est pas seulement le porte-étendard de Renault dans le 100 % électrique. Elle est aussi le symbole de la nouvelle relation avec Nissan. La filiale a été au coeur des tractations entre le constructeur français et son partenaire japonais pour rééquilibrer leurs relations, fortement dégradées depuis 2015 et torpillées quatre ans plus tard par l’affaire Ghosn.
Une prise de participation de Nissan dans Ampere faisait en effet partie des conditions posées par Renault en amont des discussions. La firme l’a respectée en actant fin juillet un investissement pouvant aller « jusqu’à 600 millions d’euros », c’est-à-dire moins que le chiffre de 1 à 1,5 milliard qui avait un temps circulé. Le pourcentage du capital détenu dépendra de la valorisation retenue pour l’introduction en Bourse.
Le troisième membre de l’Alliance, Mitsubishi sera aussi de la partie. Alors qu’il n’y était pas contraint, le constructeur de Tokyo a annoncé fin octobre un investissement maximal de 200 millions d’euros dans Ampere. La nouvelle entité se verra, par ailleurs, confié la production d’un modèle de la marque aux trois diamants pour le marché européen.
3. Casser les coûts et les délais
S’ériger en concurrent de Tesla, BYD et la myriade de start-up chinoises – sans compter les constructeurs traditionnels – impose de produire à la fois plus vite et moins cher. Avec Ampere, Renault ambitionne de réduire de 40 % le coût unitaire dès 2027 et de ramener à « moins de dix heures » le temps de production d’un véhicule.
Pour obtenir de tels résultats, la filiale prévoit notamment de réduire de 30 % la diversité des pièces utilisées dans ses modèles et compte profiter d’une forte concentration de ses moyens de production dans le département du Nord.
Ampere va s’appuyer sur le pôle ElectriCity, créé au printemps 2022 par Renault en regroupant ses usines de Ruitz, Douai et Maubeuge. Les batteries doivent être, quant à elles, produites au sein des futures usines de la start-up Verkor, à Dunkerque, et du sino-japonais AESC Envision, près de Douai. A l’arrivée « 80 % des fournisseurs (seront) situés à moins 300 km », souligne le groupe, incluant le site de Cléon, en Seine-Maritime, spécialisé dans la motorisation.
Renault évalue à 400.000 véhicules la capacité annuelle de production d’ElectriCity « dès le premier jour » et vise le million d’ici 2030. A cette échéance, Ampere devrait atteindre « une marge à deux chiffres », selon les prévisions du groupe.
4. Avec Qualcomm et Google vers la « voiture logicielle »
Le terme revient très souvent dans la communication de Renault autour de sa nouvelle entité : Ampere doit être « pionnière du véhicule défini par logiciel » ou « Software Defined Vehicle », c’est-à-dire « un véhicule amélioré tout au long de sa durée de vie par la mise à jour et l’intégration de nouvelles applications pour étendre ses fonctionnalités, […] un peu sur le principe du smartphone mais en bien plus complexe ».
Dans cette quête, Renault s’est attaché les services de partenaires d’envergures. Sa filiale codéveloppera d’ici 2026 avec l’américain Qualcomm des « plateformes de calcul haute performance ». Google sera son « fournisseur cloud privilégié », avec pour mission de mettre au point un « jumeau numérique » des véhicules « pour (y) faciliter l’intégration continue de services et la création de nouvelles applications installées ou désinstallées sur demande ».
Renault a également noué des liens avec le franco-italien STMicroelectronics pour sécuriser l’approvisionnement en semi-conducteurs et développer de nouvelles solutions hardware pour optimiser les performances des véhicules électriques. L’équipementier français Valeo, de son côté, fournira à Ampere des composants électriques et électroniques, tout en « contribuant au développement logiciel ».
5. Quatre modèles pour se lancer
La production d’Ampere débutera avec un modèle existant, la Megane E-Tech, qui est déjà assemblée au sein de l’usine de Douai. La berline compacte sera rejointe, courant 2024, par le nouveau Scénic. Annoncé comme la future tête de gondole de la filiale, l’ex-monospace devenu SUV revêt une importance cruciale pour Renault après l’échec commercial de sa petite soeur.
Ampere verra ensuite arriver deux « revivals » : la R5 électrique, affichée à moins de 25.000 euros, fin 2024, puis la Renault 4, petit SUV inspiré de la 4L, en 2025. Deux autres modèles sont annoncés d’ici 2030, mais n’ont pas encore été dévoilés.
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