Les cybermarchands tricolores sont sur le recul. Au moins dans le baromètre Médiamétrie des sites d’e-commerce les plus fréquentés du dernier trimestre. Alors que pendant des années, Cdiscount a talonné le champion Amazon et que la FNAC a campé dans le Top 5, le premier est descendu à la sixième position et le second à la neuvième.

E.Leclerc (cinquième) et Carrefour (huitième) sauvent la face de la vente en ligne française mais sur le créneau très particulier de l’alimentation et des « drives ». Les étrangers dominent le palmarès avec, outre Amazon, le quasi-éternel numéro un, Leboncoin.fr qui appartient au conglomérat norvégien Schibsted et le lituanien Vinted sur la 4e marche du podium.
Leroy Merlin, Decathlon, le spécialiste du bricolage ManoMano et Veepee (l’ex-Vente- privée) figurent dans le Top 20, mais ce sont trois sites chinois qui intègrent ou approchent le Top 10 : Shein (10e) et AliExpress (12e) ainsi que le nouveau venu Temu, qui a accédé en quelques mois seulement à la 11e place. Un trio d’ultra-discounters, de textile notamment, qui importent de Chine des vêtements et des chemisiers à 15 euros défiant toute concurrence.

Les secteurs traditionnels en baisse
Le marché français de l’e-commerce a atteint un plateau. La croissance est révolue. La vente de produits (à distinguer de la vente de services) s’érode : -1 % au deuxième trimestre 2023, -1,5 % au troisième. « C’est la fin de l’euphorie de la période Covid qui a vu l’e-commerce gagner 30 % par rapport à 2019, reconnaît Marc Lolivier, le délégué général de la Fédération de l’e-commerce et de la vente à distance (Fevad). C’est la fin de l’abondance. On est passé dans une phase de crise de la consommation avec un marché qui s’est contracté et une concurrence plus importante. »
Les cybermarchands qui opèrent en France se retrouvent coincés entre deux phénomènes. Les consommateurs effectuent des arbitrages en faveur de l’alimentation dont le prix a explosé de plus de 20 % en deux ans. Les secteurs traditionnels de la vente en ligne – les produits tech, l’électroménager, la décoration – fléchissent. Les chiffres de FNAC Darty le prouvent qui font état, ventes en ligne et magasins confondus, d’une baisse de 1,8 % sur les neuf premiers mois de l’année, plus si l’on enlève du total les produits éditoriaux comme les livres qui se portent bien.
Dans le même temps, les acteurs historiques de l’e-commerce subissent la concurrence des sites marchands des chaînes de magasins qui ont dopé leurs investissements lors des fermetures du Covid qui ne laissaient qu’Internet pour acheter. Les Ikea, Leroy Merlin et consorts ont rattrapé leur retard. Il s’est créé encore 9 % de sites Internet marchands de plus au troisième trimestre malgré les difficultés du marché. S’ajoute à cela les pratiques de certains concurrents étrangers qui s’apparentent à du dumping. Pour le troisième trimestre 2023, Amazon a annoncé une perte de 2,23 milliards de dollars sur ses activités d’e-commerce à l’international. Dans un reportage de son journal de 20 heures, TF1 avance la possibilité que le chinois Temu perde 30 euros par commande en France.

Résultat : les sites s’adaptent. « Ils travaillent leur Ebitda » résume Marc Lolivier. Ils privilégient leur résultat à leur volume d’activité. En perte, Cdiscount arrête les ventes promotionnelles à perte et mise tout sur sa place de marché. ManoMano supprime un quart de ses effectifs. Tous les acteurs privilégient les revenus incrémentaux qui monétisent l’audience : la publicité, le « retail media », les places de marché, voire des diversifications comme la vente de solutions pour la création de places de marché, terrain sur lequel se sont aventurés Cdiscount avec Octopia et FNAC Darty. Même sur le Web, on peut serrer les boulons.

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