Dans une voiture électrique, la batterie est l’élément le plus coûteux. Le problème, c’est qu’il s’agit également du plus compliqué à réparer en cas de pépin. Alors que les voitures électriques continuent de gagner des parts de marché sur les motorisations thermiques en France et en Europe, la question de la réparabilité de leur organe le plus stratégique devient lancinante.

Conscients de l’enjeu, de plus en plus d’acteurs du secteur alertent sur les dérives de certains constructeurs qui se soucient bien peu de savoir si les piles de leurs voitures, logées sous le plancher et comptant pour 30 à 40 % de la valeur de leurs véhicules, sont réparables. Le phénomène concernerait la moitié des marques en Europe et en Asie, selon l’analyse de Mobivia (groupe de Norauto, Midas, Vroomly…).

Chez Tesla, 29 kg de mousse collante
Eléments directement collés empêchant la séparation des éléments sans destruction, blocs de cellules de batteries très large ou au contraire cellules dispersées dans toute la caisse sans accessibilité… « Certains constructeurs s’engouffrent vers des solutions à l’exact opposé de ce qu’il conviendrait de faire pour produire des batteries parfaitement réparables », déplore Jean-Philippe Hermine, directeur de l’Institut mobilité en transition, un ancien de Renault.
Sont concernées, par exemple, le modèle chinois MG4, grand succès en France et en Europe grâce à son prix imbattable , mais aussi les véhicules de son compatriote BYD ou la Tesla Model Y. En démontant ce dernier modèle, la firme d’ingénierie A2Mac1 a découvert que jusqu’à fin 2022 la marque américaine projetait 29 kg de mousse collante rose autour de ses batteries (remplacée par 4 kg de mousse blanche depuis 2023) constituées d’un seul tenant. De quoi interdire l’accès à l’intérieur du pack, qui pèse, lui, de l’ordre d’une demi-tonne…
« Il faut faire un choix entre réparabilité et coût de construction : plus une batterie sera réparable, plus elle sera chère à assembler », explique Leila Emadi, ingénieure chez A2Mac1. Un arbitrage vite réalisé chez certains constructeurs, dans le contexte de guerre des prix qui sévit actuellement sur le marché de l’électrique.
Les marques européennes se montrent plus vertueuses. Renault ou Volkswagen vissent les éléments des batteries, ce qui rend le démontage bien plus aisé. Et moins cher.

Une Megane E-Tech dispose d’une batterie en douze modules. Si l’un d’entre eux est défaillant, il peut donc être spécifiquement remplacé. Ce qui revient environ dix fois moins cher que de changer toute la batterie. Mais cela renchérit de 10 % le coût de fabrication du modèle de Renault, par rapport à la Seal de BYD (bientôt en vente en France). A la vue de ce différentiel, certains Européens réfléchiraient à s’inspirer des méthodes asiatiques moins regardantes.

La prudence des experts des assurances
Réparateurs et assureurs auto insistent : les batteries des véhicules électriques et surtout leurs composants électroniques associés, comme leurs précieux systèmes de gestion et de contrôle de puissance, doivent être entretenus, voire réparés ou échangés. Comme n’importe quelle autre pièce automobile. Ils en veulent pour preuve les pannes déjà observées dans les marchés les plus électrifiés, comme la Norvège.
Reste que constructeurs comme assureurs tâtonnent encore pour savoir dans quelles situations une batterie (sous garanties durant huit ou dix ans) peut être réparée ou carrément mise au rebut.
« Lorsque les airbags ou autres éléments pyrotechniques se déclenchent, quelques constructeurs imposent le remplacement de la batterie engendrant des surcoûts importants avec le risque très vite d’avoir un véhicule économiquement irréparable », illustre Nadia Bestaoui, directrice technique du CESVI, le centre de crash test et de formation du groupe Covéa (MAAF, MMA, GMF).
Quand ce n’est pas l’expert de l’assureur qui demande la mise à la casse, de peur d’un déclenchement d’incendie a posteriori. Heureusement, les casses de batteries sont rares, aux dires des assureurs. « La réparation des véhicules électriques va devenir un enjeu de plus en plus important pour les clients », prévient Sylvain Lagasse, directeur des prestataires indemnisation auto chez Allianz France.

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