Au regard de tout ce que l’IA a à offrir, les questions d’un syndrome de flemme chronique et d’un abêtissement des jeunes subsistent. Si leurs parents peinaient autrefois à accéder à l’information, la difficulté de la recherche créait néanmoins des occasions de découvertes fortuites. On cherchait une information, on en trouvait une autre, et on nourrissait une culture par principe de sérendipité.

Aujourd’hui, la Gen Z navigue dans un océan d’informations instantanées et quasi-infini. Tout est à la portée d’un clic, et même d’une commande vocale ultra simplifiée.

Vu sous cet angle, nous pourrions saisir la carte facile du passéisme en annonçant la fin de l’esprit curieux et vagabond d’antan, au profit d’une génération fainéante, dépendante et impatiente. Et nous ne serions pas les premiers à le faire !
Déjà en 2011, le monde s’inquiétait du devenir d’une société portée par une jeunesse paresseuse (53% des Français le pensaient – 65% des moins de 30 ans), égoïste (63% des Français le pensaient – 70% des moins de 30 ans) et pas engagée (64% des Français le pensaient). Que de rengaines finalement.
Inventeurs d’un terme dont ils sont accablés, ces jeunes sont affublés de stéréotypes en tout genre avec en porte-drapeau, celui de la flemme. Depuis que la Gen Z est arrivée sur le marché de l’emploi, on ne compte plus le nombre d’articles qui fleurissent sur la toile au sujet de cette génération flemmarde qui bouscule les codes du travail. Si cette jeunesse déstabilise tant ses employeurs et collègues des générations précédentes, c’est pour deux raisons majeures.

La première se trouve dans la relation qu’elle entretient avec le travail : on ne vit pas pour travailler, mais on travaille pour vivre. Aujourd’hui, la Gen Z veut choisir l’emploi le plus en accord avec ses valeurs et dans lequel elle s’épanouira vraiment. En cela, elle est en train d’engranger un renversement du rapport de force employeur-employé.

La seconde raison réside dans ses méthodes de recherche et d’apprentissage. Les « nouvelles technologies » n’ont jamais été nouvelles pour la Gen Z ; elles sont des acquis. C’est pourquoi, il lui a toujours été naturel d’aller chercher l’information sur Internet, et notamment de visionner des tutoriels ou de demander directement à une IA à présent. Choisir d’écouter les paroles d’un ordinateur ou d’un potentiel amateur, plutôt que de chercher sur des sites vérifiés ou dans les vieux grimoires, voilà où pourrait résider ce jugement sévère de flemme porté sur la Gen Z.

Pourtant, Jean d’Ormesson le disait : « La paresse, c’est merveilleux ! » Il y a du bon dans la flemme ; elle est d’ailleurs ce qui nous pousse à être créatif et innovant pour nous rendre la vie plus facile.
Génération inspirante, la Gen Z a même réussi ce tour de force de nous faire questionner le côté néfaste de la flemme pour en voir derrière, un générateur de réflexion et d’inventivité.
En réalité, ce qui pourrait faire défaut à la Gen Z serait le manque de prise de recul et d’esprit critique vis-à-vis de l’IA.

Dans un premier temps, il faut garder en tête que l’IA est une création de l’homme et en est même son miroir. Parce qu’elle se nourrit de ce que nous voulons bien lui partager, l’IA n’est qu’un agrégat de connaissances humaines. Alors si la parole humaine n’est pas toujours vraie, celle de l’IA l’est encore moins. Pour exemple, la campagne Heetch « Greeting from la Banlieue » exploite l’IA comme le reflet d’un imaginaire commun, mais erroné, de la banlieue. Elle doit ainsi être discutée et exploitée avec précaution, en étant mise au regard de ce qu’elle connaît déjà.

Dans un second temps, l’IA est conçue pour personnaliser ses réponses selon nos préférences passées. Cela signifie qu’à terme, nous échangerons avec cette technologie des informations et des opinions qui ne feront que confirmer nos croyances existantes, créant ainsi des bulles de filtrage. En n’étant jamais exposé à des idées nouvelles, il est facile de tomber dans le gouffre de la pensée étroite dont on ne peut sortir sans la confrontation des points de vue. En cela, se pose la question du futur des compétences sociales de la Gen Z.

Enfin, les Digital Natives, pour qui l’IA est devenue un outil familier, l’utilisent de diverses manières, la plus étonnante étant l’aide à la prise de décisions (52%). Se profilerait-il alors une société tentée d’éviter les prises de risque ou les choix basés sur l’intuition ? Dans notre domaine, cela interroge l’avenir des marques et des agences de publicité, et leur capacité à proposer des produits, des services et des messages innovants. Car si l’IA concatène les pensées de tous, il se pourrait que nous ayons tous la même pensée dictée par l’IA.

Finalement, l’IA n’est pas plus dangereuse pour la Gen Z que ne l’est le manque de pédagogie autour de cet outil. Le risque ne réside pas tant dans l’IA, mais dans notre comportement vis-à-vis de son usage. Enfin, si la réponse à la question de l’avenir intellectuel de la Gen Z n’est pas encore là, elle ouvre d’autres champs d’interrogation, notamment sur les inégalités intellectuelles entre ceux qui utiliseront et ceux qui n’utiliseront pas l’IA.

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