L’inventeur de l’hypermarché innove. Carrefour a inauguré ce jeudi matin à Aulnay-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, en lieu et place d’un hypermarché Carrefour, son premier Atacadao français, un concept importé du Brésil inédit dans l’Hexagone. Depuis le développement du drive dans les années 2010, puis celui de la livraison à domicile, le groupe de distribution dirigé par Alexandre Bompard n’avait pas révolutionné son métier. Atacadao constitue une vraie nouveauté. « Carrefour est un groupe qui prend des risques. Nous avons décidé de lancer cette expérience lorsque l’hyperinflation a touché le marché de l’alimentaire », a déclaré le PDG de Carrefour lors de l’inauguration.
Le magasin pionnier situé dans le centre commercial O’Parinor est exploité par le groupe marocain LabelVie qui exploite 13 Atacadao en franchise au Maroc et a repris quelques hypers Carrefour en location-gérance en France. Atacadao signifie « grossiste » en portugais. L’enseigne est accessible à la fois aux particuliers et aux professionnels. C’est une sorte de mélange entre un cash-and-carry type Metro et un hypermarché. Carrefour a racheté l’enseigne au Brésil en 2007 et l’a développé jusqu’à en faire son format phare dans le pays continent avec 366 unités.
Magasin entrepôt
Le premier Atacadao tricolore reprend les codes de son inspirateur brésilien, ceux du magasin entrepôt. Les stocks sont rangés en hauteur sur des grandes étagères au-dessus des rayons. Les produits sont dans leur carton et un espace promotionnel présente même des palettes de colis. Les livraisons par camions entiers sont effectuées en direct depuis chez le fournisseur, sans passer par des entrepôts. Une source d’économie.
L’ancien hyper Carrefour dans lequel s’est installé le nouveau concept a été profondément modifié. Ses fondations ont été renforcées pour supporter le poids des stocks. L’espace de vente a été ramené de 15.000 à 9.000 mètres carrés de façon à agrandir les réserves. Selon nos informations, 10 millions d’euros ont été investis. « Dans un magasin qui vend des gros volumes à des professionnels, il faut beaucoup de stocks », explique Noël Prioux, ancien patron de Carrefour Brésil et directeur exécutif chargé du projet Atacadao en France. 3.000 mètres carrés ont tout de même été rendus à la galerie commerciale attenante.
Il faut dire que le choix est plus restreint que celui d’un hypermarché : 14.000 références (jusqu’à 20.000 avec certains produits saisonniers) quand un hyper monte à 40.000. Pour autant, il ne s’agit pas d’un magasin de hard-discount comme Aldi, qui ne vend que ses articles ou presque. Les marques propres Carrefour sont au nombre de 3.000, le reste est composé de grandes marques et de marques de PME. Il y a des nouveautés comme les boissons naturelles pour enfants Vitago ou Kato (une marque coréenne). Les conditionnements peuvent être gros (un pot de 10 kilos de mayonnaise, par exemple) pour plaire aux professionnels, mais des volumes plus petits sont disponibles et tout peut être acheté à l’unité.
Jusqu’à 8 % de réduction pour les professionnels
Le premier Atacadao compte réaliser entre 20 % et 30 % de son chiffre d’affaires (plus de 70 millions d’euros annuels et plus que le chiffre de l’ancien hyper) avec des restaurateurs, des tenanciers de supérettes indépendantes, des associations, des entreprises classiques. En fonction de leurs quantités d’achats, ils bénéficient de prix dégressifs avec 4 % à 8 % de réduction. « Le nombre de professionnels susceptibles d’être intéressés est un critère de choix de la zone d’implantation », explique Noël Prioux.
Pour doper la fréquentation, les produits non alimentaires saisonniers (la papeterie pour la rentrée des classes, par exemple) sont présents sous forme d’arrivages. Quand un lot est terminé, la vente est finie. Idem pour les articles d’hygiène-beauté, à la façon du néerlandais Action. Un peu d’art de la table et d’instruments de cuisine est proposé en permanence.
Les prix sont bas parce que nous ferons peu de promotions et pas de publicité.
Mais la grande nouveauté de l’assortiment tient aux produits internationaux et exotiques : asiatiques (chinois, japonais, coréens), orientaux, africains, etc. Les marques présentes ne se retrouvent pas dans les supermarchés traditionnels. La zone de chalandise d’Aulnay-sous-Bois a été choisie parce que les populations qui l’occupent sont d’origines diverses, avec notamment beaucoup d’Asiatiques. La part belle est faite aux fruits et légumes, variés eux aussi. Une boucherie et une boulangerie complètent le tout.
Bouche à oreille
« Les couleurs sont chatoyantes. Les prix sont bas parce que nous ferons peu de promotions et pas de publicité. Nous comptons sur le bouche-à-oreille pour attirer depuis bien au-delà de notre zone de chalandise naturelle. Ce n’est pas un magasin paupérisé. C’est un magasin qui fait envie et au Brésil, nous constatons que les classes aisées y viennent beaucoup. L’idée est de donner du plaisir », résume Noël Prioux. A titre d’exemple, la côte de boeuf est à 18,50 euros le kilo et un paquet de 500 grammes de penne rigate Barilla vaut 0,98 euro quand un Carrefour City le vend 1,55 euro. A Sevran, à côté d’Aulnay-sous-Bois, les élus avaient refusé d’accueillir Atacadao en lieu et place de leur Carrefour. Ils craignaient un sentiment de déclassement dans la population. Le maire d’Aulnay-sous-Bois, le LR Bruno Beschizza y voit, lui, « un gain pour le pouvoir d’achat » de ses concitoyens.
Carrefour se donne six à huit mois pour tirer un premier bilan de son premier Atacadao français. D’ores et déjà d’autres zones d’implantation ont été identifiées. Dans le Nord notamment.
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