Un monopole qui ne passe pas. Le géant américain Visa bénéficiera de l’exclusivité des paiements par carte bancaire sur les sites de compétition et dans les différentes boutiques officielles de Paris 2024. Et cela pendant toute la durée des Jeux Olympiques et Paralympiques. Commerçants et associations de défense des consommateurs alertent sur cette pratique qu’ils jugent à la fois anticoncurrentielle et contraignante. Pour eux, elle pourrait aussi se révéler dangereuse pour les spectateurs.

« Principe fondateur de l’olympisme »
A l’origine de cette situation : un partenariat, signé en 1986 avec le Comité international olympique (CIO), qui a permis à Visa de rejoindre le très fermé programme « TOP ». Abréviation de « The Olympic Partner », il regroupe les partenaires mondiaux des Jeux, à l’instar de Coca-Cola, Airbnb, Samsung ou encore Toyota.

« L’exclusivité est un principe fondateur de l’olympisme depuis 40 ans. Elle s’applique à tous les partenaires dans leur catégorie et est négociée avec le Comité international olympique », explique Romain Boisson, directeur général de Visa France. Estimé en centaines de millions de dollars, le contrat, renouvelé en 2018, court jusqu’en 2032.

Enjeu de souveraineté
Mais en France, où Cartes Bancaires (CB), le réseau national de paiement, est largement plébiscité par les commerçants, l’argument a du mal à passer. D’un point de vue concurrentiel d’abord. « En excluant CB, Visa envoie un signal fort et montre qu’il peut faire ce qu’il veut y compris exclure le réseau domestique du pays », pointe l’Association française des trésoriers d’entreprise (AFTE). 
Les commerçants mettent aussi en avant des questions liées à la souveraineté des transactions. « Cela remet en cause le choix laissé aux consommateurs que leurs paiements soient traités par un système français et leurs données soient conservées en France », plaide l’AFTE. L’enjeu est en outre financier. Car, selon les commerçants, les transactions qui transitent par Visa leur coûtent plus cher que celles opérées par CB.
Côté consommateur, la mesure est jugée contraignante. « Ce contrat change la façon de fonctionner en France, où traditionnellement les points de vente acceptent CB, Visa ou Mastercard », rappelle Guillaume Yribarren, directeur adjoint de l’activité conseil du cabinet Galitt.

Distorsion de concurrence
Michel Guillaud, président de l’association France Conso Banque, va même plus loin : « ce monopole, c’est une distorsion de concurrence, on est à la limite de la vente forcée ». Les près de 40 % des Français qui ne sont pas équipés d’une carte Visa pourront bien se tourner vers le cash, une obligation légale en France. Mais là aussi, l’association de défense des consommateurs émet des réserves.
« Le risque que l’on pointe, c’est que cela va pousser à la détention d’espèces lors d’une période qui attire traditionnellement les pickpockets et voleurs », analyse Michel Guillaud. Et les 60 distributeurs automatiques de billets installés pourraient se révéler bien insuffisants pour faire face à la demande. « C’est de la poudre aux yeux pour tenter d’échapper à l’accusation de monopole. »

D’autant que dans le monde du sport et des paiements, des alternatives existent, plaident les acteurs du secteur. Partenaire de la Coupe de monde du rugby, Mastercard avait par exemple fait le choix de proposer à ses clients des avantages supplémentaires ou des caisses rapides, sans interdire les autres réseaux de paiement

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