De la Dordogne à l’Arabie saoudite, il n’y a qu’une foulée… Au Championnat du monde d’endurance équestre début septembre à l’hippodrome de Marsalès, une délégation saoudienne sera du voyage. Et pour cause : elle accueillera à son tour l’événement en octobre 2026 à AlUla, une ancienne ville oasis de la province de Médine, à un millier de kilomètres au nord-ouest de Riyad.

Ce site grandiose, pendant de Pétra puissance XXL avec ses centaines de tombeaux nabatéens creusés dans la roche en plein désert, veut devenir une destination touristique mondiale. Des dizaines de milliards de dollars vont y être investis avec l’objectif d’attirer 2 millions de visiteurs et d’offrir 8.500 chambres d’hôtels à horizon 2030, en phase avec l’ambition du pays de diversifier son économie . Pharaonique, le projet suscite beaucoup d’appétit, notamment en France, qui espère faire d’AlUla la tête de pont de sa stratégie de développement dans le royaume. Reste à se distinguer dans un contexte de forte concurrence internationale.

L’archéologie, point de départ
Un accord intergouvernemental, conclu en 2018 entre le prince héritier Mohammed ben Salmane (MBS) et Emmanuel Macron, a donné naissance à l’Agence française pour le développement d’AlUla (Afalula), afin d’accompagner la dimension culturelle du projet et sa constellation de musées : sur l’archéologie, les parfums, l’art contemporain, la géologie ou encore le cheval arabe.

« Tout est parti de l’archéologie ; sans elle, pas de partenariat », rappelle Jean-Yves Le Drian, ex-ministre des Affaires étrangères et président d’Afalula depuis l’été 2023. L’archéologue du CNRS Laïla Nehmé a, par ses fouilles, révélé la richesse plurimillénaire d’un pays qui a longtemps gommé ses racines préislamiques. Et en 2010, « l’exposition ‘Routes d’Arabie, archéologie et histoire’ au Louvre a très bien marché, puis tourné dans le monde », renchérit Sophie Makariou, la directrice scientifique d’Afalula, ancienne patronne des Arts de l’Islam au Louvre et présidente du Musée Guimet.
Ce qui était moins prévisible, c’est que de cet accord, qui englobe aussi des aspects de développement urbain durable et d’inclusion de la population de cette ville de 50.000 habitants, composée surtout de nomades et d’agriculteurs, naîtrait l’idée de faire aussi d’AlUla une référence internationale pour les sports et loisirs équestres. De quoi apporter de nouvelles perspectives à la jeunesse locale alors que 60 % des 30 millions de Saoudiens ont moins de 30 ans.

Deux villages complémentaires
« Initialement, il n’y avait pas de projet cheval. Nous avons proposé un musée autour du pur-sang arabe en décembre 2020 et un complexe équestre global en juin 2021 », se remémore Antoine Sinniger, devenu Monsieur Cheval chez Afalula après vingt-trois ans passés à la célèbre école de dressage du Cadre noir de Saumur et dix ans au très réputé Pôle international du cheval de Deauville, qui regroupe, entre autres, des écoles d’équitation et de polo, des formations de moniteurs, des manèges et des carrières.
Mais si l’Arabie saoudite est un pays de tradition équestre, tout restait à inventer. Sous l’impulsion du Français, en étroite collaboration avec la Commission royale pour AlUla (RCU) et la Fédération équestre saoudienne, le projet a pris forme autour de deux villages : 285 hectares dédiés à la compétition à Al Muatadil et 260 hectares consacrés au tourisme et aux loisirs à Al Atheeb. A la clé, des centaines d’emplois et de millions de dollars injectés, sans compter les hôtels de luxe, dont certains exploités par le français Accor.

Le futur complexe équestre sera situé au beau milieu du désert.Afalula
Al Muatadil mettra l’endurance, activité reine dans la région, à l’honneur, mais aussi le polo et les disciplines olympiques, avec deux stades équestres, quatre terrains de polo, un hippodrome, 700 boxes, une clinique vétérinaire, etc. Plusieurs compétitions, comme la Coupe du monde de tir à l’arc à cheval, s’y sont déjà tenues, grâce à des installations semi-permanentes. « Celles-ci sont éphémères, mais de très grande qualité car les Saoudiens ont mis les moyens pour ce projet gigantesque », constate Philippe Augier, le maire de Deauville, une station inspirante pour AlUla car elle a fait du cheval un vecteur de son rayonnement.

Le grand jeu à Versailles
Les équipements définitifs doivent être prêts pour les championnats de 2026 et la filière équestre tricolore, performante, compte bien y exporter plusieurs de ses pépites : Normandie Drainage, le meilleur expert en pistes équestres, Natural Grass, leader des pelouses hybrides, Equiways, spécialisée en biosécurité de la filière équine, STH-Hipavia, transporteur de chevaux dans le monde, ou encore le Cirale, Centre d’imagerie et de recherche sur les affections locomotrices équines.
La princesse Delayel Bint Nahar Al Saud, cavalière et vice-présidente de la Fédération équestre saoudienne, a justement pu apprécier ces savoir-faire le 2 août, lors des épreuves d’équitation de Paris 2024 au Château de Versailles, d’autant que, « pour la première fois, une équipe saoudienne s’est qualifiée en saut d’obstacles aux Jeux Olympiques », soulignait Antoine Sinniger lors de la fête donnée par le lyonnais GL Events, dont la filiale GL Events Equestrian Sports a livré le stade équestre.

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