C’est un coup dur pour les investisseurs de l’écosystème crypto. L’annonce, samedi, de l’arrestation en France de Pavel Durov, fondateur de Telegram, a fait dévisser d’environ 20 % le Toncoin. La blockchain de cette crypto est notamment utilisée pour gérer les paiements effectués sur l’application de messagerie instantanée.
Si le jeton a depuis en partie effacé ses pertes, certains fonds en capital-risque scrutent avec inquiétude les prochains développements de l’affaire. Plusieurs acteurs ont en effet misé gros sur cette crypto. Pantera, l’un des plus grands fonds de venture capital pour les cryptomonnaies, aurait investi plus de 100 millions de dollars dans le Toncoin en début d’année, selon Bloomberg.
Lourd contrôle judiciaire
Une douzaine d’autres entreprises, dont Animoca Brands et Mirana Ventures, ont eux aussi parié sur le token. Le Toncoin a vu son cours exploser de 270 % sur un an, et affiche une capitalisation d’environ 12,7 milliards d’euros. Il est géré par une entité indépendante de Telegram, mais la plateforme de messagerie représente un partenaire majeur ainsi qu’un moteur de croissance crucial.
Les fonds ont en effet été attirés par le projet de Telegram de se transformer en une « super application », à l’instar du chinois WeChat, qui s’appuierait sur la blockchain pour proposer à la fois des paiements et des jeux à ses 900 millions d’utilisateurs.
Mais les ennuis judiciaires de Pavel Durov, accusé de ne rien faire pour lutter contre les contenus criminels qui circulent sur Telegram, pourraient contrarier ces ambitions. Si l’homme d’affaires a été remis en liberté mercredi soir par les autorités françaises, il a été mis en examen et est soumis à un lourd contrôle judiciaire.
« Cygne noir »
« La majorité des investisseurs pensaient que l’application elle-même allait favoriser et promouvoir, ou au moins amorcer, l’adoption du réseau Toncoin », explique Lasse Clausen, associé fondateur de la société de capital-risque cryptographique 1kx, auprès de Bloomberg. « Maintenant, nous avons un cas où un événement de « cygne noir » (exceptionnel et imprévisible) se produit pour l’entreprise elle-même et son fondateur – ce qui pourrait soulever des questions sur l’avenir », ajoute-t-il.
Les investisseurs en capital-risque ayant misé sur le Toncoin, et qui se sont pour certains engagés à ne pas le vendre pendant au moins un an, cherchent à savoir si ce coup de semonce risque de pousser des utilisateurs à fuir Telegram. La plateforme puise en effet précisément sa « force » dans ce qui lui est reproché : son laxisme en matière de surveillance et de modération, qui en font un repaire de criminels en tous genres selon les autorités françaises. Ses fondateurs, comme ses adeptes, évoquent de leur côté un havre de protection de la vie privée où chacun peut s’exprimer librement.
Plusieurs membres de la communauté cryptos ont manifesté leur soutien à Pavel Durov ces derniers jours. Vitalik Buterin, cofondateur d’Ethereum, a jugé sur X son arrestation « inquiétante pour l’avenir de la liberté des logiciels et des communications en Europe », tandis qu’Andrei Grachev, directeur associé de DWF Labs, a annoncé avoir acheté pour 500.000 dollars de Toncoin pour « soutenir une technologie non censurée et décentralisée ».
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