Grand Frais n’a pas d’équivalent dans le monde de la distribution française. L’enseigne créée en 1992 à Givors dans le Rhône est unique à bien des égards.

Ses magasins ressemblent à des supermarchés – même si les dirigeants parlent de « halles » – avec une surface de 1.000 m2, un parking et des lignes de caisses à la sortie. Mais les 320 Grand Frais (500 prévus à l’horizon 2029) ne sont pas des supermarchés. Ils ne vendent pas de lessive, de savon, de dentifrice ou de papier toilette. Les consommateurs sont obligés de pousser une autre porte pour compléter leurs courses du quotidien.

« Esprit commerçant »
Grand Frais s’érige en spécialiste des produits frais : les fruits et légumes, la viande, le poisson, la crémerie. Un rayon épicerie vend du sel, de l’huile, des pâtes, etc. Il permet de compléter le repas. Autre originalité – pour l’instant Grand Frais ne dispose pas de carte de fidélité et fait peu de promotion.
Son créateur Denis Dumont, pense pourtant d’abord aux clients. Le chiffre d’affaires vient après, au moins lors des premières semaines d’ouverture d’un magasin. « L’esprit commerçant l’emporte sur tout », insiste Jean-Paul Mochet, le nouveau président du directoire de Prosol, le spécialiste des fruits et légumes qui est le pilier central de l’enseigne.

Cette philosophie se traduit par une organisation très particulière. Grand Frais est un groupement d’intérêt économique qui regroupe trois entreprises : Prosol, Despi, – le groupe des bouchers lyonnais Despinasse, pour la viande -, et Euro Ethnic Foods, la société des frères Bahadourian, pour l’épicerie (avec une connotation épicerie fine). A l’origine, le Comptoir central du fromage faisait office de quatrième mousquetaire avec la crémerie. Il a été vite racheté par Prosol qui dispose de ce fait de deux parts de voix dans les décisions du GIE.

Chaque partenaire emploie son personnel, utilise une réserve attenante au magasin et organise sa propre logistique avec ses propres camions. En conséquence, les légumes et les fromages sont toujours manipulés à la bonne température dirigée. Dans la grande distribution « classique », il n’est pas rare que les tomates voyagent à 0 °C avec le poisson.

Produits et approvisionnements locaux
La spécialisation est poussée si loin que Prosol gère ses rayons crémerie avec des équipes différentes de celles des fruits et légumes, alors même que les deux fournisseurs lui appartiennent. Une structure baptisée Grand Frais Gestion assure l’encaissement des magasins et redistribue le fruit des ventes aux différents partenaires. Grand Frais a été créé comme un marché dans lequel l’on paie ses achats en une fois à la sortie, seule concession au modèle d’un supermarché, et non pas chez chacun des commerçants. Les autres charges sont réparties comme dans une copropriété.
Une visite au magasin qui a ouvert en juin à Vélizy, à l’ouest de Paris, suffit à comprendre le concept. A l’entrée, près des caisses, un petit rayon vin qui débouche tout de suite sur les fruits et légumes. Sur le côté droit du magasin, les rayons épicerie, sur le côté gauche la boucherie traditionnelle face à un rayon de poissons préemballés. Au fond règne la crémerie avec ses fromages, ses yaourts, son lait. Pas de grandes marques, ni Nutella, ni Danone. Des produits locaux les remplacent ou des copies comme les yaourts Les Grands Cirés, fabriqués par la Laiterie de Saint-Malo qui produit les Malo…
Les fruits et légumes viennent de producteurs locaux. « Chaque fin de journée, nos entrepôts sont vides », explique Maikel Troost, directeur régional Ile-de-France sud de Grand Frais qui supervise l’ouverture de Vélizy. Vide, cela signifie que les produits ne restent pas dans les zones frigorifiques des jours et des jours. Grand Frais dispose aussi de ses propres mûrisseries de bananes, d’avocats et de mangues afin d’assurer le goût des fruits. L’enseigne construit son succès, dans une ambiance gourmande, sur l’angle mort des Carrefour, Auchan et autres Leclerc : la qualité des fruits et légumes.

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