bhb b marché en France et de 2,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires : Auchan décline. Le géant du Nord créé par Gérard Mulliez, champion des grands hypermarchés, se résout à une restructuration drastique. La direction a annoncé ce mardi matin 2.400 suppressions de postes dans les sièges et les magasins. Rétrécissement des grandes usines à vendre, réduction des rayons non alimentaires à la portion congrue, poussée des marques propres : Auchan suit le chemin que Carrefour, l’autre ténor des grands hypers, a emprunté il y a cinq ans. Un retard qui s’explique par une série d’errements stratégiques.

1. La lourde culture des Mulliez
Auchan appartient à une famille, les Mulliez. Un avantage par rapport à Carrefour et Casino qui, cotés en Bourse, doivent chaque trimestre donner des gages financiers au marché. Dans le Nord, l’Association familiale Mulliez (AFM), qui réunit 900 des 1.500 héritiers familiaux, privilégie le temps long. Trop long parfois. Lorsqu’en 2021, l’AFM décide d’une sortie de crise par le haut avec le rachat de Carrefour, les négociations durent neuf mois. Alors que la direction de Carrefour se prête au jeu des discussions du projet « Merlot », ces dernières stagnent pendant tout l’été. Elles capoteront à la rentrée après leur révélation par « Le Monde » et le niet de la famille Moulin, le premier actionnaire de Carrefour. « Il fallait aller plus vite, regrette un proche du dossier. Et se montrer plus agiles. Lorsque les Moulin ont refusé d’être payés en partie en actions du nouvel ensemble, il suffisait d’augmenter la part du cash pour emporter leur décision. »

2. L’instabilité de la gouvernance
La culture Mulliez, c’est aussi la volonté de fonctionner avec un vivier de dirigeants interne à la galaxie qui comprend aussi Decathlon, Leroy Merlin, Boulanger, Kiabi. Une série de barons du groupe se sont succédé à la tête d’Auchan. En 2018, Wilhelm Hubner, bébé Auchan, artisan du partenariat en Chine avec Alibaba et du succès de l’enseigne en Russie, prend les rênes. Edgard Bonte, membre de la famille, ancien président de Kiabi, ancien membre du conseil de gérance de l’AFM, lui succédera. Le patriarche Gérard Mulliez placera ensuite son petit-fils Alexandre à la vice-présidence en France. Viendra ensuite le tour d’Yves Claude, vétéran de chez Decathlon. Il aura fallu attendre 2024 pour que le distributeur sorte de l’endogamie qui freine les décisions douloureuses pour recruter à l’extérieur Guillaume Darrasse, ex-Coopérative U et Teract.

3. Le poids des hypermarchés
Avec 311 supermarchés et 30 supérettes de proximité au 30 juin 2024, Auchan ne pèse rien, ou presque, sur les marchés des supermarchés et des magasins de proximité. A titre de comparaison, Carrefour et Casino exploitent des milliers de supers et supérettes. Tout Auchan repose sur ses 161 hypermarchés, souvent grands, de 15.000 mètres carrés ou plus. La direction a indiqué lors de la présentation des résultats semestriels vouloir les réduire à 8.000 mètres carrés, le format gagnant de Leclerc, en coupant les rayons non alimentaires. Auchan suit la tendance du secteur, mais avec un poids disproportionné des hypers par rapport à Carrefour, qui en possède plus de 200 mais réalise la moitié de son chiffre d’affaires avec les petits formats.

4. Les prix trop élevés
L’inflation de plus de 20 % des produits alimentaires a relancé la guerre des prix. Une course dans laquelle Auchan est mal placé. Selon l’indice Distri Prix des Editions Dauvers d’octobre, l’enseigne nordiste affiche un indice 106 quand Carrefour est à 98 et Leclerc à… 92. Les 375 millions d’économies de coûts qui seront réalisées avec le plan de restructuration engagé le 5 novembre seront injectées dans la baisse des étiquettes. Selon La Lettre, la fusion des services achats avec ceux d’Intermarché rapportera 380 millions. Sans compter les meilleures conditions qui seront obtenues des fournisseurs. Quand un grand hypermarché Auchan se révèle aussi cher qu’un petit supermarché Intermarché, il lui est difficile de gagner des clients.

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