Des petites voitures jaune pissenlit parsèment le grand parking de l’usine de voitures électriques de Renault à Douai. Ce sont les dernières R5 à batterie, la voiture star de cette rentrée automobile, tout juste sorties des lignes de production. Elles viennent égayer le premier anniversaire d’Ampere, la filiale électrique du groupe au losange.
Pour souffler cette première bougie, le patron de Renault a fait le déplacement dans le nord de la France, en provenance du Maroc où il accompagnait le président Emmanuel Macron en visite officielle. Le contexte est plutôt morose. Les ventes de voitures électriques se sont tassées depuis le début de l’année, à cause de la fin des aides à l’achat en Allemagne.

« L’avenir sera électrique »
« Beaucoup s’inquiètent de ventes de voitures électriques qui plafonnent et des obligations européennes de décarbonation, a reconnu devant la presse le directeur général du groupe au losange, Luca de Meo, qui n’est pas le dernier à en parler. Mais il est important de regarder à long terme : l’avenir sera électrique, quels que soient les cahots sur la route. »
Le groupe table sur une croissance du marché de l’électrique, bon an mal an, de 25 %. « Le marché européen a perdu 4 millions de véhicules depuis 2019 et la croissance se trouve du côté de l’électrique », insiste Josep Maria Recasens, qui dirige Ampere. Les voitures à batterie pèsent 35 % du marché des voitures de plus de 45.000 euros. Il faut maintenant convaincre les 80 % de clients qui achètent moins cher et réclament, poursuit le dirigeant, « des prix abordables et de l’autonomie ».
Et Renault, via sa filiale Ampere, s’y prépare à fond de train, a martelé la direction du groupe mercredi à Douai. Bonne nouvelle du jour, le patron de son partenaire japonais Nissan, Makoto Uchida, s’est fendu d’une vidéo pour annoncer que son groupe a décidé de charger Ampere « d’étudier le développement de son prochain véhicule électrique du segment A ».

Cadeau japonais
Cette demande vient combler le vide laissé par l’échec des négociations sur le partage de la future petite plateforme électrique d’Ampere avec Volkswagen. Ce cadeau d’anniversaire en provenance du Japon vient aussi confirmer, veut croire Luca de Meo, l’attractivité de la plateforme développée actuellement d’arrache-pied par les ingénieurs maison pour la future Twingo tout électrique.
Celle-ci est annoncée pour 2026, soit un temps de développement de deux ans condensé à l’extrême. En plus de ne pas coûter plus de 20.000 euros à l’achat, elle ne devra pas consommer plus de 10 kWh aux 100 kilomètres, contre 13 kWh pour la Model 3 de Tesla.
Ampere développe déjà le Compact EV de Nissan de segment B, et met la dernière touche au SUV milieu de gamme de Mitsubishi pour l’Europe, lequel sera produit à Douai à partir de 2025. De quoi occuper, aussi, les lignes de production de l’usine de Douai et la gigafactory d’AESC (du groupe Envision), ensemble industriel assez unique baptisé Electricity.

300 R5 produites par jour
Aujourd’hui, Renault y produit tous ses modèles électriques. Sur la chaîne de montage se succèdent la R5, le SUV familial Scenic et la Megane E-Tech. Pas de quoi saturer les capacités du site. Avec seulement une équipe et demie, celui-ci produit 52 véhicules par heure, soit un peu plus de 500 par jour. Dont environ 300 R5, en pleine montée en cadence. Le site est dimensionné pour sortir 400.000 voitures par an, voire 600.000 en poussant un peu les murs.
La filiale électrique de Renault, qui ambitionnait initialement d’atteindre le point mort en 2025, est lancée dans une course contre la montre. Objectif : combler l’écart avec les concurrents chinois, référence de l’électrique. « Ampere est en ligne avec son objectif de réduire ses coûts de 40 % d’ici à 2028, entre la première et la deuxième génération de véhicules électriques du segment C [les familiales, NDLR] », assure le groupe dans un communiqué publié mercredi.

Branché sur l’écosystème chinois
C’est que la filiale électrique s’est directement branchée sur l’écosystème chinois, via une équipe de 150 personnes implantée dans l’empire du Milieu. Baptisée « Advanced China Development Center » (ce qui donne le sigle ACDC), cette équipe doit « apprendre de l’écosystème chinois sur les processus de développement et en tirer les bons enseignements pour ses équipes et celles du groupe ».
En premier lieu, elle doit superviser une partie du développement de la future Twingo, confiée à une société d’ingénierie chinoise. Inévitable pour pouvoir développer le projet en deux ans et sortir un produit à moins de 20.000 euros, défend Luca de Meo. « J’ai dû faire avaler ça par la force à mes équipes, qui me disaient que ce n’était pas possible à développer en deux ans », a glissé le patron.

L’équipe chinoise devra aussi s’assurer qu’Ampere ne rate aucun train technologique lancé par les Chinois. « Nous allons apprendre et imiter de nos compétiteurs, reconnaît sans ambages Luca de Meo. Comme nos aïeux l’avaient fait au début du XXe siècle aux Etats-Unis, et comme les Chinois l’ont fait avec nous ces dernières décennies. »

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