Airbus, le géant de l’aéronautique et du spatial, est l’exemple le plus cité en matière de coopération industrielle réussie entre grands pays européens. The Exploration Company rêve de l’imiter et se donne les moyens de ses ambitions. La start-up, qui développe un vaisseau réutilisable pour le fret spatial, a bouclé une levée de fonds de 150 millions d’euros en série B, un record à ce stade pour une jeune pousse européenne du New Space.
Ce financement est « uniquement en equity », précise Hélène Huby, sa patronne. Au passage, cette dernière efface des tablettes la performance d’Eléonore Crespo, qui, jusqu’alors, avait signé le plus gros tour de table d’une dirigeante tricolore dans la tech, avec Pigment (133 millions d’euros en 2024). Cette opération a été menée par Balderton Capital et Plural, avec le soutien de Bessemer Venture Partners, NGP Capital, French Tech Souveraineté et DeepTech & Climate Fonds (DTCF).
C’est la première fois que French Tech Souveraineté et DTCF (financé par le « Zukunftsfonds » et l’ERP Special Fund) investissent ensemble : une illustration de l’originalité de cette jeune pousse qui a été fondée entre Mérignac (Gironde) et Munich (Bavière). « Ma conviction profonde, c’est que si nous voulons construire un géant mondial, il faut le construire entre pays européens. Sinon, cela ne fonctionnera pas : nous allons penser à une échelle trop petite, il n’y aura pas la capacité de financement nécessaire et pas suffisamment de talents », plaide Hélène Huby.

L’Europe dans le sang
Les investisseurs historiques (EQT Ventures, Red River West, Cherry Ventures, Orbital Ventures et Omnes Real Tech Fund) ont aussi remis au pot à l’occasion de ce tour de table sursouscrit. The Exploration Company n’a quasiment que des actionnaires européens. Un bel exploit, alors que le manque de gros fonds sur le Vieux Continent pousse beaucoup de dirigeants dans la deeptech à aller chercher de l’argent aux Etats-Unis ou en Asie. Selon Sifted, sa valorisation serait aux alentours de 450 millions d’euros.
Hélène Huby a l’Europe dans le sang. C’est l’une des raisons qui ont poussé cette normalienne et énarque à mener une partie de sa carrière chez Airbus et ArianeGroup, des entreprises qui créent « des solidarités de fait » entre les pays européens. Avec The Exploration Company, la quadragénaire veut prouver que l’Europe peut peser dans la bataille mondiale du New Space.
Avoir des investisseurs européens est aussi crucial, car la société veut travailler avec des clients civils et militaires. « C’est une boîte différente, puisqu’elle s’inscrit dans une logique géopolitique », analyse Hugo Hubert, investisseur chez Omnes Capital. Pour accomplir son rêve, Hélène Huby ne manque pas d’atouts.
Outre sa fine connaissance du marché, elle a une grosse capacité de travail et sait parler avec aisance aux industriels, politiques, militaires et investisseurs des deux côtés du Rhin. Elle a aussi la chance de connaître Emmanuel Macron, chantre d’une Europe spatiale, puisqu’ils ont étudié ensemble au lycée Henri-IV à Paris.

Il faut qu’on soit d’abord fort chez nous avant d’être fort à l’étranger. Pas l’inverse.
Hélène Huby, cofondatrice et directrice générale de The Exploration Company

En trois ans d’existence, The Exploration Company assure avoir tenu presque tous ses objectifs en matière de R&D et de gestion financière. « Cela donne confiance aux investisseurs. Nous leur montrons que nous n’allons pas exploser les coûts et les plannings, ce qui est un risque important dans les projets spatiaux », remet en perspective la patronne.
La société a aussi fait fort sur le plan commercial : elle revendique près de 800 millions de contrats signés. « Nous avons un contrat public avec l’agence spatiale européenne (ESA) et cinq contrats privés avec des stations spatiales américaines », détaille Hélène Huby.

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