Après plusieurs années à réduire la voilure dans leurs réseaux d’agences, les banques de proximité n’ont plus le monopole… de la proximité. Selon une étude OpinionWay pour MoneyVox sur la satisfaction des clients, pour la première fois, les banques traditionnelles – celles disposant d’agences physiques – sont devancées par leurs concurrentes en ligne en matière de proximité.
« L’an dernier, banques traditionnelles et en ligne étaient quasiment ex aequo, les Français étant plus attachés aux banques traditionnelles mais reconnaissant le rapport qualité-prix des banques en ligne, rappelle Maxime Chipoy, président de MoneyVox. Cette année, ces dernières dépassent les banques avec agences sur tous les critères de l’attachement et de la proximité. C’est un vrai avertissement pour les banques traditionnelles. »
Concrètement, alors que l’an dernier, les 5.000 répondants se disaient plus satisfaits par les banques historiques en matière d’écoute de leurs préoccupations, avec 84 % de satisfaction contre 82 % pour les établissements en ligne, le vent tourne brutalement cette année : les marques dématérialisées font un bond en avant pour atteindre 89,5 % de satisfaction, contre 84,6 % pour les banques avec présence physique.
Idem sur la question de l’attachement, où les banques en lignes affichent 4 points de plus que les banques traditionnelles (87 % contre 83 %), alors qu’elles avaient encore 5 points de retard lors de la précédente étude (76 % contre 81 %). Les banques sans agence apparaissent aujourd’hui plus solides et inspirent plus confiance, alors qu’elles étaient à égalité l’an passé.
La disponibilité est la nouvelle proximité
Plusieurs éléments expliquent ce basculement : d’abord, la stratégie même des banques, qui cherchent à réduire la voilure – le réseau français est le plus dense d’Europe – en diminuant les interactions physiques avec un conseiller au profit des appels et des mails. Ensuite, la montée en gamme des banques en ligne qui, pour certaines, ont une palette de produits qui commence à s’approcher de celle des banques physiques. Ou encore, une évolution des attentes des clients, de plus en plus habitués à se servir eux-mêmes, dans tous les domaines, au-delà du monde bancaire.
« C’est une illustration très marquante d’une évolution profonde des attentes et comportements des clients, où la ‘proximité’, en matière de relation bancaire, devient moins une affaire de distance géographique que de disponibilité, pour une part croissante de la population », analyse Olivier Sampieri, associé au Boston Consulting Group.
D’ailleurs, la grande majorité des interactions « humaines » des clients avec leurs banques, y compris « traditionnelles », ne se font plus déjà en agence mais à distance, au téléphone ou par e-mail, poursuit-il. A l’inverse, « certaines banques digitales parviennent très bien à pallier l’absence d’agences pour créer ce sentiment de proximité par la réactivité et la qualité de service ». La crise du Covid a habitué les clients, même les plus réticents, au numérique pour les opérations bancaires courantes, comme un virement, rappelle Frédéric Bois, du cabinet Sémaphore Conseil. « Les banques traditionnelles ont modifié l’organisation des agences avec l’accès à ces dernières uniquement sur rendez-vous, ce qui joue un rôle sur la perception de la proximité, ajoute-t-il. Les clients se rendent en agences pour des opérations plus complexes, et moins fréquentes, comme l’épargne ou le crédit où le conseiller à un rôle primordial dans le conseil et doit être à la hauteur ». Par ailleurs, l’important turnover de conseillers dans les agences a sa part de responsabilité.
Un modèle qui résiste
« Cela reste dans les agences que les particuliers se rendent pour effectuer les actions rentables pour les banques comme les crédits », souligne-t-il. Le modèle français avec un grand nombre d’agences résiste d’ailleurs bien, malgré la baisse de la fréquentation. « En quinze ans, les banques ont supprimé entre 15 % et 20 % de leurs agences mais ça reste beaucoup moins important qu’aux Pays-Bas, au Royaume-Uni ou en Allemagne, note Nicolas Miart, associé chez Circle Strategy. Et les établissements gagnants en termes de revenus sont ceux qui ont gardé leurs agences. »
Tant que les banques conservent les relations rentables avec les clients, c’est-à-dire les crédits, pour lesquels la plupart des particuliers sont encore attachés au rendez-vous physique, la partie est loin d’être jouée, estiment les spécialistes. Cependant, plusieurs acteurs dématérialisés s’y attaquent sans pour autant changer leur promesse d’un service totalement en ligne. Reste à savoir si cela va prendre. « Les banques doivent accélérer leur transformation numérique pour ne pas se retrouver le bec dans l’eau dans dix ans », glisse un spécialiste.
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