On reproche souvent aux grands groupes français d’être frileux avec les start-up. Ce n’est pas le cas de La Poste, qui est l’un des principaux acquéreurs des jeunes pousses de la French Tech et dispose de plusieurs fonds d’investissement (115K, soit 150 millions d’euros; La Poste Ventures, soit 35 millions d’euros ).
Cette stratégie n’est toutefois pas exempte de risques, comme l’illustre le cas d’Epicery. Rachetée en 2021 via sa filiale GeoPost/DPDgroup, cette place de marché, qui digitalise les commerces de bouche, va fermer ses portes à la fin de l’année. « Malgré notre engagement indéfectible à soutenir le commerce de proximité, l’analyse de nos résultats révèle que notre modèle économique n’est plus viable », indique Epicery dans un message diffusé sur son site Internet et envoyé ce jour à ses clients.
La jeune pousse admet avoir été confrontée à une absence de croissance de son chiffre d’affaires, « aggravée par un contexte économique difficile et une concurrence toujours plus intense ». Une allusion à l’inflation des prix alimentaires et à la multiplication de rivaux surfinancés dans le quick commerce et aux partenariats entre les gros distributeurs et des plateformes telles qu’Uber Eats ou Deliveroo.
Plus de 5 millions d’euros de pertes
Lancée en 2016 par Edouard Morhange, Marc Menasé et Elsa Hermal, Epicery permettait aux commerçants de quartier (boucherie, pâtisserie, fromagerie, etc.), d’avoir des revenus additionnels en leur permettant de livrer leurs clients à domicile. Elle a connu un boom pendant le Covid-19, synonyme de fermeture des boutiques, avant d’être avalée par La Poste un an plus tard.
Ce rachat (à hauteur de 88,9 %) devait permettre à la foodtech de se développer dans les grandes villes de l’Hexagone. Mais l’histoire ne s’est pas déroulée comme prévu. Le chiffre d’affaires de la société a stagné entre 2022 et 2023 (à 2,57 millions d’euros). Dans le même temps, ses pertes sont restées significatives (9,56 millions d’euros en 2022, 5,59 millions en 2023). Les chiffres de 2024 ne sont pas encore disponibles.
Pour assurer les livraisons, Epicery collaborait avec Stuart, une start-up qui, elle aussi, avait été rachetée par La Poste. Or, cette dernière a été cédée en 2023 à Mutares, un spécialiste allemand du private equity. Lors de la cession, La Poste indiquait ne pas avoir réussi à intégrer Stuart dans son modèle opérationnel, la croissance attendue dans la livraison instantanée de colis n’étant « pas au rendez-vous »
Equation difficile
Il y a quelques jours, c’était au tour de La Banque Postale, filiale bancaire de La Poste, de se séparer de KissKissBankBank. Ce pionnier du financement participatif, qui accuse de lourdes pertes, a été cédé à Ulule, son concurrent depuis toujours . La start-up avait été rachetée en 2017, en plein boum du marché du crowdfunding.
Depuis l’arrivée de son nouveau patron, fin 2023, la banque publique s’est lancée dans un recentrage stratégique, avec notamment la mission de recentrer la banque sur ses fondamentaux et de prioriser ses investissements. Même sort pour les filiales de KissKissBankBank, comme Lendopolis cédée elle aussi à son concurrent Lendosphere .
Au global, les grands groupes restent les principaux acquéreurs de la French Tech. L’année dernière, ils ont été à l’initiative des trois quarts des opérations de M&A . S’ils permettent aux jeunes pousses d’accroître leur force de frappe et de bénéficier davantage de canaux de distribution, l’équation peut être difficile, en raison des différences de culture, de modèle économique et des besoins d’investissement, en particulier en période de conjoncture morose.
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