Le fait qu’il existe des problèmes qu’un ordinateur, et même tous les ordinateurs terrestres réunis, n’est pas en mesure de résoudre en un temps raisonnable est le principe fondateur d’une grande partie de la cryptographie moderne, science du secret nous permettant la sécurité numérique. Il existe quantité de problèmes qui sont présumés appartenir à cette catégorie, les plus célèbres dans le cadre de la cryptographie étant ceux dits de la factorisation des entiers et du logarithme discret. Un pan entier de la sécurité numérique repose sur leur difficulté, comme les cartes bleues, nos mises à jour logiciel…

L’écueil des ordinateurs quantiques
Malheureusement, les avancées en physique quantique laissent entrevoir l’arrivée d’un nouvel outil qui pourrait bouleverser l’ordre établi : l’ordinateur quantique. Cet ordinateur « nouvelle génération », n’ayant pas grand-chose à voir avec nos ordinateurs, fonctionnerait en remplaçant les bits, ces 0 et ces 1 qui constituent le langage universel de toutes les machines autour du globe, par des qubits, objets issus des principes de la physique quantique et qui représentent à la fois un 0 et un 1 en « superposition ».

Cette différence fondamentale offre de nouvelles possibilités algorithmiques puissantes, comme l’a démontré P. Shor en 1994, en prouvant qu’un ordinateur quantique fonctionnel (c’est-à-dire un ensemble de qubits sur lequel on serait capable d’effectuer un certain nombre d’opérations prédéfinies) était en mesure de résoudre les problèmes de la factorisation et du logarithme discret bien plus efficacement que ne le pourrait jamais un ordinateur classique. Adieu nos cartes bleues ! Depuis, d’autres domaines où les ordinateurs quantiques pourraient s’avérer révolutionnaires ont été découverts, de façon plus positive cette fois. C’est par exemple le cas de la chimie où le calcul quantique pourrait permettre d’améliorer la modélisation des états d’une molécule.

Aujourd’hui, nous sommes encore loin d’avoir un ordinateur quantique fonctionnel : ces fameux qubits sont difficiles à manipuler et la route est encore longue à la fois sur le plan théorique et pratique. Les annonces de suprématie quantique dont nous parlions plus haut, c’est-à-dire la réalisation d’une tâche avec un ordinateur quantique qui est hors d’atteinte de nos ordinateurs du quotidien, concernaient en réalité des problèmes qui avaient été spécialement conçus dans le but même d’être plus faciles pour un ordinateur quantique que pour un ordinateur classique. Les applications prometteuses des ordinateurs quantiques, par exemple casser notre sécurité numérique, restent pour l’instant hors de portée des acteurs les plus avancés.

Les efforts investis dans la poursuite de la suprématie quantique sont cependant à la hauteur de la tâche, et une véritable course est lancée entre les grands acteurs du domaine, comme Google ou IBM. La menace n’est donc pas à prendre à la légère pour les cryptographes : on pourrait bien voir arriver un ordinateur quantique fonctionnel d’ici une dizaine d’années.

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