Frilosité des quinquas

“Avec la prise de conscience grandissante que nous connaissons aujourd’hui, les marques ont compris qu’il fallait s’adresser à nous différemment, remarque Sophie Kune, auteure de Ménopausée et Libre et créatrice du compte Instagram Menopause stories. Mais ces produits ont toujours plus ou moins existé. Les produits “peau mâture” ou “anti-âge” deviennent peu à peu des crèmes pour la “ménopause”.” Ce changement n’est évidemment pas innocent. Il révèle une prise de conscience des femmes : ce mercredi 8 janvier, une étude OpinionWay réalisée pour le site médical Deuxième Avis et dévoilée par Le Parisien montre que pour 78 % de la population, le sujet ne serait plus tabou. 81 % des interrogés déclarent même qu’elle serait “mieux acceptée par les femmes d’aujourd’hui”.

Sophie Kune a elle-même pu constater cet engouement, son compte Instagram passant en moins de trois ans d’un millier d’abonnés à 14 000. “De plus en plus de marques me sollicitent – ainsi que d’autres influenceuses – pour parler de ménopause, souligne Sophie Kune. Elles peuvent vendre des cosmétiques, des sous-vêtements, des compléments alimentaires… Et elles ont compris qu’il fallait s’adresser à nous”. Face à cet intérêt, les abonnées de Sophie Kune restent pourtant sceptiques. “Quand j’ai pu évoquer sur mon compte certains produits aidant à mieux vivre sa ménopause, j’ai vite eu des commentaires mécontents du type : ‘ça y est, les marques ont compris que c’était un business juteux !'”, raconte-t-elle.

Une pléthore d’offres
Maquillage, livres de développement personnel – près de 300 ouvrages sur le sujet se bousculent sur les rayonnages de la Fnac -, crèmes en tout genre… “Comme dans les pays anglo-saxons, beaucoup de compléments alimentaires existent, note Juliette Mauro, présidente de l’association Femtech France. Nous n’en sommes qu’aux prémices en France, mais de nouvelles start-up arrivent”. Parmi elles, Omena ou Menorebelle, des applications qui entendent accompagner ses utilisatrices “pour les aider à se sentir mieux” pendant leur ménopause. Ou encore Athana, qui vend des boîtiers imitant la cryothérapie, afin de soulager des bouffées de chaleur. “Ces dispositifs aident cependant seulement à gérer les symptômes de la ménopause, et ne sont pas des traitements, prévient Juliette Mauro. Nous manquons encore de recherche sur le sujet”.

Malgré l’intérêt naissant pour le secteur, les premières intéressées sont souvent mal informées, peu convaincues de l’importance de leur propre mal. “Bouffées de chaleur mais aussi syndrome dépressif, prise de poids, troubles du sommeil, difficultés de mémorisation, douleurs articulaires… Des symptômes qui touchent 3 femmes sur quatre, dont 1 de façon invalidante”, liste le Dr Brigitte Letombe, gynécologue et membre du Gemvi. La ménopause s’étire pourtant dans le temps. Pendant la quarantaine, la production d’ovaires et d’oestrogènes – les hormones féminines – chute. Cette première étape, la “périménopause” (ou “préménopause”), dure en général entre deux et quatre ans, et s’accompagne des premières bouffées de chaleur, ou encore de sueurs nocturnes. Vient ensuite la ménopause, et sa ribambelle de symptômes – insomnie, fatigue, irritabilité voire dépression… La période dure environ un an après les dernières règles. Enfin vient la post-ménopause, où les risques d’ostéoporose, de maladies cardiovasculaires, ou de hausse du cholestérol augmentent. “En dépit de tous ces symptômes (de la ménopause), la moitié des femmes ménopausées assurent : ‘J’ai des troubles oui, mais je peux gérer seule'”, soupire la gynécologue.

A l’heure actuelle, seules 6 % des femmes sont traitées pour leur ménopause et bénéficient d’un suivi médical approprié. D’après la praticienne, ce pourcentage devrait en réalité s’élever à 25 %. “Or, les quinquagénaires d’aujourd’hui sont loin d’être recluses. Elles sont souvent au top sur le plan social et professionnel. Quand elles se rendent compte qu’elles ne sont plus performantes parce qu’elles ne dorment plus ou qu’elles n’arrivent plus à se concentrer, elles tentent de trouver des solutions là où elles peuvent”. Y compris en dehors du champ médical. “Mais les solutions proposées aujourd’hui ne sont que des accompagnements, insiste la gynécologue. Les seules choses qui ont aujourd’hui une efficacité sur des symptômes invalidants sont des traitements hormonaux. Et ils ne sont prescrits que par le corps médical”. La ruée vers l’or attendra.

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