L’intelligence artificielle rame à Wall Street. La rhétorique de la technologie révolutionnaire imprègne toujours les discours ambitieux des dirigeants d’entreprises et les rapports enthousiastes d’analystes, mais en Bourse, la vague est retombée. La décrue est particulièrement notable sur les fonds thématiques : le fonds indiciel coté (ETF) BOTZ, spécialisé dans la robotique et l’intelligence artificielle, a perdu plus de 15 % depuis son récent pic, le 18 juillet.

Même Nvidia, dont l’action est la valeur emblématique de l’IA, est emporté. Le champion des semi-conducteurs a perdu plus de 8 % en Bourse, soit 100 milliards de capitalisation effacée. Les difficultés boursières du concepteur de puces graphiques, des composants électroniques particulièrement bien adaptés pour les applications d’IA générative, témoigne d’une certaine fatigue sur les marchés. Après avoir très largement contribué au rebond fulgurant de Wall Street au premier semestre, l’IA fait moins rêver.

Remontée des taux
Certes, l’environnement s’est détérioré sur les marchés en général. Les sujets d’inquiétude ne manquent pas, à commencer par l’impact du ralentissement économique en Chine. Les valeurs technologiques, dont celles liées à l’IA, souffrent en outre de la remontée des taux d’intérêt de long terme. Aux Etats-Unis, les taux évoluent à leur niveau le plus élevé en plus de quinze ans. Ils avoisinent les 4,30 % pour les Treasuries à 10 ans, alors que beaucoup d’investisseurs comptaient sur des taux stables, ou en repli. Le discours du gouverneur de la Fed, Jerome Powell, à Jackson Hole ce vendredi sera suivi de près par les investisseurs, dans l’espoir de gagner un peu de visibilité sur la trajectoire de la politique monétaire américaine.
Dans ce contexte, les entreprises aux valorisations les plus élevées sont les plus vulnérables. Et après la fièvre acheteuse du premier semestre, bon nombre des sociétés les mieux valorisées du marché se retrouvent dans la thématique de l’IA. Le décrochage est brutal. Le cours de C3.ai, qui détient le « ticker » (symbole boursier) « AI » à Wall Street, a fondu d’environ un tiers depuis début août.

Upstart Holdings, qui utilise l’intelligence artificielle pour évaluer le risque de crédit des clients des banques, a perdu plus de 50 % en août. Mais même après ces baisses remarquables, ces deux valeurs affichent encore des progressions spectaculaires depuis le début de l’année : +140 % pour Upstart Holdings et +170 % pour C3.ai.

Les particuliers en retrait
Les investisseurs particuliers, pourtant généralement peu regardants sur les fondamentaux économiques des entreprises, se sont mis en retrait ces dernières semaines. « Compte tenu de la force et de la durée du rebond en Bourse, nous pensons que les investisseurs particuliers sont arrivés à un point où il est plus intéressant pour eux de vendre et de cristalliser leurs gains plutôt que d’acheter opportunément lors des baisses », explique Giacomo Pierantoni de Vanda Research.
Pour autant, parier sur une chute des cours des champions de l’IA est loin d’être sans risques. L’effervescence boursière du premier semestre a laissé des traces. La facture a été particulièrement salée pour les gérants qui pariaient à la baisse sur Nvidia cette année. Ils affichaient des pertes théoriques de plus de 10 milliards de dollars à la fin juillet, selon le cabinet spécialisé S3.

Valeur emblématique de l’IA en Bourse, Nvidia est scruté de près par les investisseurs. Les prochains résultats du groupe américain devraient faire office de juge de paix pour l’ensemble du secteur. Une nouvelle bonne surprise a toutes les chances de raviver l’engouement, alors qu’une déception risque d’accélérer le repli de la thématique à Wall Street.

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