Certains traders ont cru à un bug mais non, le bitcoin a bien repris plus de 10 % sur 24 heures dans la nuit de lundi à mardi, approchant les 35.000 dollars, un niveau qu’il n’avait plus atteint depuis mai 2022. Sur une semaine, la hausse est même de près de 20 %. Voilà la reine des cryptos, sa dauphine l’ether (en hausse de 7,5 % à 1.800 dollars) et tout un pan du marché, enfin sortis de l’« hiver crypto ». Une série d’événements avaient déstabilisé le marché depuis un an et demi. Il y avait eu le crash de Terra , puis de Celsius , 3AC , FTX , la hausse des taux , plusieurs procès , etc.

Deux facteurs, au moins, expliquent cette envolée. Lundi, une cour d’appel fédérale américaine a officialisé une victoire partielle de Grayscale contre le gendarme de la Bourse américaine (SEC) dans sa tentative de convertir son fonds Grayscale Bitcoin Trust en un fonds indiciel coté indexé sur le bitcoin au comptant (ETF bitcoin spot). Les analystes veulent y voir le signe que la SEC autorisera bientôt les ETF bitcoin de BlackRock, de WisdomTree ou de Fidelity, par exemple.

L’effet BlackRock
Justement… Lundi toujours, l’analyste expert en ETF chez Bloomberg, Eric Balchunas, a révélé sur X (ex-Twitter) l’apparition du sigle IBTC à la Depository Trust and Clearing Corporation – supprimé dans la journée de mardi. Celui-ci renvoie à iShares Bitcoin Trust, le futur ETF bitcoin spot de BlackRock. L’inscription de ce « ticker » auprès de cette société, qui fournit des services de compensation et de règlement-livraison pour le Nasdaq, rappelle l’analyste, est une étape nécessaire avant toute cotation.
« Cela ne veut pas dire que [l’ETF] est techniquement approuvé, modère-t-il, mais l’ajout d’un ticker se produit généralement juste avant un lancement. » Le milliardaire et PDG de Galaxy Digital , Michael Novogratz, table sur la fin 2023. La patronne d’Ark Invest, Cathie Wood , partage le même optimisme.

Un impact sous-estimé ?
Des ETF à terme sur le bitcoin et l’ether existent déjà, mais les ETF au comptant auraient une autre portée, car les fonds seraient tenus d’acheter de la crypto – et non des contrats à terme. A l’échelle de géants comme BlackRock ou Fidelity, cela provoquerait un « flux de capitaux absolument conséquent », pointe Alexandre Baradez, responsable de l’analyse marchés chez IG France. Pour lui, « beaucoup d’analystes ne se rendent pas compte de l’impact que cela aurait. Le bitcoin deviendrait un produit d’épargne que l’on pourrait intégrer aux plans retraite, via des produits régulés, facilement accessible. Ce serait un vecteur de captation d’épargne énorme ».
Si les ETF étaient approuvés, et si les volumes suivaient, ils pourraient durablement changer la structure du marché du bitcoin, estime l’analyste d’IG. Autrefois tributaire des spéculateurs qui voulaient tirer profit de la forte volatilité, le cours du bitcoin serait davantage lié aux gros fonds institutionnels, explique-t-il.

Valeur refuge, le retour ?
Autre explication avancée par les observateurs : depuis les attaques du Hamas, le bitcoin s’essaie – à nouveau – au statut de « valeur refuge » . Tous les métaux, dont l’or – qui teste actuellement la barre des 2.000 dollars -, et l’argent, sont fortement repartis à la hausse, et le bitcoin adopte cette posture.
Il y a aussi l’effet taux. « La courbe de la hausse des taux aux Etats-Unis a atteint son pic. Même si quelques réajustements à la hausse ne sont pas à exclure, nous allons vers une détente, complète l’analyste chez IG. Ce qui est intéressant, c’est que le bitcoin n’a pas du tout été sensible à la nouvelle phase de poussée des rendements obligataires ces dernières semaines, alors que les marchés actions la subissent assez fortement. »

Explication technique aussi : en cassant le plafond de verre des 30.000 dollars , le bitcoin s’est hissé vers un nouveau support potentiel à 35.000 dollars. Enfin, la perspective de la réduction de moitié de son émission (le « halving ») en 2024 agit comme une prophétie autoréalisatrice, où les traders achètent en prévision d’une hausse. Dans un rapport mi-octobre, Morgan Stanley s’appuie d’ailleurs en partie sur ce phénomène pour annoncer « le printemps des cryptos ». Mais, questionne Simon Peters, analyste de marchés chez eToro, « le bitcoin pourra-t-il tenir la cadence ? »

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