C’est peu dire que le fameux « consensus de Davos » est changeant. Il fut un temps où les Etats et les frontières apparaissaient comme des entraves aux affaires, voire des concepts d’un autre siècle. La guerre en Ukraine, la crise au Proche-Orient et les tensions entre blocs ont brisé ces certitudes.

Les CEO « globaux » ne mettent plus leur drapeau dans leur poche, se ruent sur les programmes de subventions publiques massifs tels que la loi IRA américaine et souscrivent aux discours appelant au « réarmement ». Vu de Davos, le monde apparaît plus fragmenté et inquiétant que jamais, l’humeur du temps est au repli sur soi et si le thème du Forum, « Rebâtir la confiance », était bien choisi, tout reste à faire.
« Djène-aïe » : c’est le mot de l’année au Forum de Davos. « C’est curieux, dans toutes les sessions où je suis allé, le mot est sorti dans les dix premières minutes, quel que soit le sujet », témoigne un patron français. GenAI, pour intelligence artificielle générative, le terme générique d’une technologie qui s’est répandue comme une traînée de poudre avec le lancement, fin 2022, de ChatGPT-3.
Les anciens du Forum se rappellent avoir connu une pareille excitation avec Internet à la fin des années 1990, quand un jeune startuppeur nommé Jeff Bezos était venu raconter sa librairie en ligne. Il s’agit là aussi d’une « general purpose technology » (une autre GPT, une « technologie à but général »).

L’intelligence au bout des doigts
« Internet, c’était l’information au bout des doigts, explique Satya Nadella, le patron de Microsoft. ChatGPT, c’est l’intelligence au bout des doigts. » Les applications sont infinies, de la recherche tout en amont jusqu’à la relation client tout en aval. « Ça pourrait fondamentalement accélérer la science » , s’emballe Nadella, pourtant d’ordinaire très posé. « Ça va très vite », confirme Paul Hudson, le patron du groupe pharmaceutique Sanofi.
« GenAI s’applique dans tous les domaines, constate Jean-Marc Ollagnier, le patron Europe du consultant Accenture. Dans la recherche sur les nouveaux matériaux, dans la personnalisation de la relation client, dans la quête de gains de productivité … » Erik Brynjolfsson, un professeur d’économie de l’université américaine Stanford irrémédiablement techno-optimiste, veut d’ailleurs croire que « 2024 sera l’année des gains de productivité ».
La joie n’est hélas pas sans nuages. Des questions se posent sur l’emploi, l’éthique, la désinformation . Même Sam Altman, le jeune patron d’Open AI qui a lancé ChatGPT, en convient : « C’est une technologie très puissante. Elle aura des effets massifs sur le monde, qui pourraient être négatifs. Il faut la rendre sûre. »

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