En décembre dernier, le groupe Accor annonçait un partenariat avec Amazon afin de mettre en place une intelligence artificielle sur son site. Une décision qui ne passe pas pour Emmanuel Bobin, CEO de l’accélérateur d’Open Tourisme Lab, qui regrette que la startup française Quicktext, spécialiste dans ce domaine, n’ait pas été contactée.
Les grands groupes privilégient-ils les GAFAM aux startups françaises ? C’est le constat que fait Emmanuel Bobin dans un post LinkedIn publié il y a quelques jours. Remonté, le CEO d’Open Tourisme Lab écrit : « On peut s’inquiéter de la consistance des grands groupes français à choisir des GAFAM au lieu de collaborer avec les start-ups françaises. […] En privilégiant les géants technologiques étrangers, les entreprises du CAC 40 compromettent non seulement l’écosystème entrepreneurial local, mais aussi la souveraineté technologique nationale. ».
Le directeur de l’accélérateur dédié au tourisme fait référence au partenariat récemment signé entre le groupe Accor et Amazon Web Services pour développer un assistant de voyage intelligent. Proposé sur le site de réservation ALL.com, il permettra aux clients de trouver les meilleures expériences en fonction du style de voyage qu’ils préfèrent. Or, selon lui, « la France possède le leader mondial dans le domaine, en l’occurrence Quicktext ».
La startup, créée en 2016, compte aujourd’hui 130 employés dans 18 bureaux dans le monde. Elle a équipé 1700 hôtels dans 76 pays et a généré 600 millions de dollars de demandes de réservation en 2023. Elle n’a pas été contacté par le groupe Accor. Ce que regrette Emmanuel Bobin et l’intéressée elle-même.
Une prise de risque moins importante ?
Quicktext a connu une situation similaire avec NH Hotel Group il y a peu de temps. « Ils ont préféré travailler avec IBM », précise Daniel Doppler, Président de l’entreprise.
Selon lui, la prise de risque est moins grande avec les géants de la tech : « Les grands groupes font souvent appel à d’autres grands groupes qu’ils vont payer cher pour des raisons de couverture. Personne ne s’est fait licencier parce qu’une collaboration avec IBM a échoué. En revanche, si une collaboration ne fonctionne pas avec une startup, c’est forcément à cause d’un salarié ou d’une équipe ».
l rappelle également le cas du rachat de la startup Manawa par Alentour, plateforme de distribution d’activités : « On a lancé Alentour avec l’argent de la Caisse des dépôts, qui a ensuite racheté Manawa pour la développer. Désormais, tout le groupe repose sur Manawa. Pourquoi ne pas avoir investi dans Manawa dès le départ ? Accor va faire ce que l’on fait, mais en moins bien », avance-t-il.
Accor signataire du programme « Je choisis la French Tech »
« Les grands groupes du tourisme privilégient les GAFAM aux startups françaises et c’est un problème », constate Emmanuel Bobin, d’autant que le groupe est signataire du programme « Je choisis la French Tech ». Lancé en 2023, il répond à 4 objectifs : renforcer la souveraineté technologique de la France, renforcer l’impact économique de l’écosystème French Tech, augmenter les revenus des startups et stimuler l’innovation de celles-ci. Pour le CEO d’Open Tourisme Lab, le constat est clair : « Le bilan n’est pas au rendez-vous ». « Dans ce genre de projet, l’enjeu de la souveraineté des données est pourtant clé », ajoute Daniel Doppler.
Les startups ne font plus rêver ?
Pour Emmanuel Bobin, ce cas particulier est révélateur : « Les startups ne sont plus aussi bankable qu’il y a 10 ans. Ce phénomène a commencé il y a deux ans environ. Auparavant, il y avait un côté rafraîchissant, exotique, de travailler avec une startup. Mais ces collaborations n’ont pas toujours été couronné de succès. Les jeunes entreprises n’ont pas toujours réussi à suivre les exigences des grands groupes. Le Covid a fragilisé la trésorerie des startups et a gelé les levées de fonds. Pour les grands groupes, c’est désormais une zone à risque. C’est pourquoi il est important de créer de la réassurance ».
Depuis 2023, Open Tourisme Lab entend prendre le leadership de France Tourisme Lab, premier réseau mondial d’incubateurs et d’accélérateurs touristiques lancé par la DGE en 2016. « Nous voulons rappeler à chacun ses engagements et les traduire en actions. Je pense qu’il y a un vrai travail de lobbying à effectuer auprès des décideurs. Nous avons déjà perdu la bataille des OTA, ne perdons pas celle de l’IA », affirme Emmanuel Bobin.
Un cas isolé selon Accor
Contacté par nos soins, Accor affirme que ce partenariat avec Amazon n’est pas représentatif :
« Nous travaillons très largement avec des acteurs français, de toute taille tout comme avec les GAFAM. Amazon Web Services avec qui nous avançons sur le cloud est l’un d’eux et ce projet s’intégrait dans ce programme plus large. A noter qu’au moment du choix malheureusement aucune startup française ne répondait au cahier des charges. Dès que nous pouvons soutenir la French Tech, nous le faisons ! Pour vous donner quelques-unes des directions prises, cela passe par les partenariats, nous en avons noué différents avec Artefact, Sunday ou Contentsquare pour utiliser des solutions développées dans l’Hexagone. Nous avons également investi dans des startups telles que D-Edge, Gekko ou encore Worklib et développons parfois des solutions conjointement avec leurs équipes ou encore faisons de l’intrapreneuriat comme avec FullSoon. Nous travaillons également à co-construire des solutions technologiques avec d’autres entreprises françaises. Nous sommes pleinement investis dans le maillage local et prenons ce rôle à cœur. »
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