Comme ses prédécesseurs, il parle de « la » bio et non pas « du » bio. C’est le signe des promoteurs historiques, des militants de l’agriculture biologique. Pourtant, Henri Godron n’a ouvert son premier Biocoop qu’en 2013, dans la Manche, après une carrière de commercial dans la banque, et il n’a été élu qu’il y a un mois à la présidence du premier réseau spécialisé français du secteur.

« Je me suis tout de suite impliqué dans notre organisation, explique celui qui a remplacé Pierrick de Ronne, à la présidence depuis quatre ans. En 2023, nous avons eu des débats, mais au final notre ligne n’a pas changé. »Biocoop, qui a poussé loin le curseur du militantisme avec des publicités stigmatisantes (« N’achetez pas des fraises en hiver », « N’achetez pas des pommes traitées chimiquement », etc.), reste fidèle à ses racines et à ce qui le distingue de ses concurrents. Cela tombe bien, Henri Godron croit que la crise du marché du bio s’estompe.

Un tournant à la rentrée 2023
Après une décennie de croissance à deux chiffres, le bio a été l’une des premières victimes de l’inflation alimentaire qui a atteint 20 % en deux ans. Les consommateurs se sont détournés de prix en moyenne supérieurs de 50 % à ceux des produits conventionnels. Les ventes ont plongé de 4 % en France en 2022, et même de 13 % dans les grandes enseignes de supermarchés au premier semestre 2023.
« Nous avons vu un tournant à la rentrée 2023 », explique le nouveau président de Biocoop. Les clients militants étaient restés, les occasionnels sont revenus. L’enseigne affiche une progression de 2,3 % de ses ventes. le gain de 2 points de part de marché chez les spécialistes (à 45 %) montre que Biocoop a aussi profité de la consolidation du secteur. Les boutiques indépendantes ont souffert. Biocoop lui-même a fermé 39 magasins l’an passé (sur 298).

« Les points de vente les plus récents ont été les plus touchés, car les deux premières années d’exploitation sont les plus critiques en matière d’amortissement », explique le dirigeant.

Baisse des prix
Sans suivre son concurrent Naturalia, filiale de Monoprix, qui a ouvert ses rayons aux produits locaux non bio, pour le non alimentaire surtout, Biocoop, comme les autres spécialistes, a aussi bénéficié des effets positifs de l’inflation. Parce qu’elle n’utilise pas d’intrants chimiques, l’agriculture bio a moins souffert du déclenchement de la guerre en Ukraine. Les prix ont moins monté et l’écart avec le conventionnel s’est réduit, voire inversé sur certains articles comme l’huile d’olive. Signe des temps, Bio c’Bon et So.bio, les deux marques du groupe Carrefour, ont annoncé mardi la baisse de 300 prix.
La crise a perturbé certaines filières de production comme celles du lait et du porc – des éleveurs ont été poussés à la « déconversion » -, « mais je crois au rebond du marché sur le long terme », prêche Henri Godron, apôtre d’une « agriculture plus simple ». « Nous fermerons encore des magasins en 2024, mais nous en ouvrirons aussi une douzaine », prédit le nouveau président de Biocoop, qui affirme que « la crise du bio est derrière nous ».

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