Légère secousse, coup de frein ou mise à l’arrêt ? Tandis que les partis d’extrême droite sortent renforcés de ces élections européennes , d’aucuns voient là une menace d’assombrissement des transitions « vertes ». Depuis le traité de Rome, en 1957, les politiques communes de l’Union européenne permettent aux Etats membres de se départir volontairement de leurs compétences.
Ce, dans l’agriculture, le commerce ou encore les transports, secteur où, à partir de 2009, le Dieselgate (scandale de tromperie des clients quant au véritable niveau de pollution des moteurs Diesel) « a conduit le régulateur européen à se montrer plus restrictif envers les constructeurs automobiles », dixit Diane Strauss, la directrice en France de Transport & Environnement. Fondée en 1989, cette fédération regroupe à ce jour une soixantaine d’organisations non gouvernementales engagées en faveur de l’environnement et du droit des consommateurs, et compte des bureaux en Belgique, en Italie, en Espagne, en Allemagne, au Royaume-Uni et dans l’Hexagone.
Accessibilité et neutralité carbone
De quoi faire de T&E un acteur de poids dans l’élaboration de certaines politiques publiques, comme l’illustre sa participation aux réflexions sur le « Green Deal », ou Pacte vert pour l’Europe .
A la fois observatoire et think tank sur le sujet de la décarbonation des transports les plus polluants (depuis les secteurs routier, aérien et maritime, jusqu’aux sujets de l’énergie et des chaînes de valeur industrielle), T&E oeuvre notamment en faveur de l’accessibilité et de la neutralité carbone des transports .
Un enjeu auquel répondent en partie les politiques communes. « Depuis les élections européennes de 2019, qui se sont accompagnées d’une vague citoyenne en faveur du climat, la Commission européenne a inscrit dans la loi les objectifs de réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 et d’atteindre la neutralité d’ici à 2050, et ce, grâce à la réouverture d’un panel de textes, de types directives et règlements », rappelle Diane Strauss.
Le RN et LR rétifs à la fin des moteurs thermiques
Outre l’ambition de décarbonation, cette politique commune impliquant Etats et industriels « positionne le ‘made in UE’dans la compétition internationale, à l’heure où les filières des batteries ou des carburants de synthèse représentent un Eldorado », selon Diane Strauss. Et d’ajouter que « l’Europe a, jusqu’alors, bien fait les choses, en étudiant la faisabilité industrielle, en réalisant une analyse d’impact, et en fixant des dates, jalons et sanctions ». Entre autres exemple : l’interdiction de la vente des voitures thermiques neuves à partir de 2035.
Toutefois, sur fond d’un contexte social et économique tendu, cette dynamique peut-elle être freinée, notamment du fait des résultats des élections européennes de 2024, où les partis d’extrême droite sont arrivés en tête en France, en Autriche, en Italie, et deuxième en Allemagne et aux Pays-Bas ? Quid de la suite dans la mesure où la plupart de ces partis ont déjà prouvé leur propension à diaboliser la décarbonation au sein de l’hémicycle du Parlement européen ?
« Une teinte très conservatrice au sein des institutions européennes ne promet pas nécessairement un retour en arrière réglementaire, mais elle fait peser un risque sur la mise en oeuvre des politiques communes », estime Diane Strauss, en référence, notamment, à Jordan Bardella, le patron du Rassemblement national, habitué à fustiger la fin de la vente des véhicules neuf à moteur thermique.
Une prise de position paradoxale qui « agite le véhicule électrique comme un épouvantail incarnant l’Europe technocratique et injuste ». « A l’inverse, ne pas interdire la vente de véhicules neufs à moteur thermique tend à maintenir les ménages modestes captifs de la hausse des prix des carburants, » conclut-elle, en rappelant que « la perspective de transports pesant 50 % des émissions en 2030 impose de bâtir une Europe souveraine ».
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