Agent immobilier, installateur d’alarme ou encore voyagiste… Pour faire face à la pression sur leurs marges sur leur métier traditionnel de prêteur ou pour trouver de nouveaux relais de croissance, les banques n’hésitent pas à explorer de nouveaux marchés, loin de leur zone de confort.

On les avait vues devenir opérateur de téléphonie ou loueur de voitures mais la diversification s’accélère encore. Dernier mouvement en date : le groupe BPCE, qui a justement placé la diversification au coeur de son nouveau plan stratégique, a noué en mai un partenariat dans la télésurveillance avec Verisure. Il s’aligne ainsi sur ses concurrents qui, tous désormais, proposent une offre de protection du domicile.
Le mouvement est logique pour les établissements financiers pour qui le crédit immobilier fait office de produit d’appel : ils ne réalisent pas d’importantes marges sur le crédit, mais montent à bord du projet immobilier du client pour tenter de l’équiper. Cela passe par de l’assurance-emprunteur, de l’assurance-habitation et donc… des systèmes d’alarme. De quoi générer, grâce à des formules d’abonnement, des revenus stables et réguliers pour les prêteurs.

Tentatives balbutiantes
Les banques travaillent ainsi avec des sociétés partenaires, ou leurs propres filiales (dans le cas du Crédit Mutuel et de Crédit Agricole), qui voient de leur côté un intérêt à confier leur distribution aux réseaux bancaires.
Si la télésurveillance est bien installée dans le paysage, d’autres tentatives de diversification sont plus balbutiantes… et plus disruptives. Leur point commun ? Ces services, en apparence très éloignés du secteur bancaire, contribuent en réalité à consolider de nouvelles lignes de métiers.
C’est le cas dans la filière du paiement, où les banques ont compris qu’il était devenu possible de « suivre » le client dans ses opérations du quotidien, et notamment dans ses déplacements et ses achats. Chaque transaction génère des commissions, et de précieuses data.

BNP Paribas est ainsi devenu opérateur de péage, en emportant, par le biais de sa filiale Axepta, le marché du système de paiement de l’A79, un axe ouvert fin 2022 qui traverse l’Allier d’est en ouest, et qui inaugure le péage dit « en flux libre ». Concrètement, l’automobiliste ne s’arrête plus comme actuellement à une barrière de péage pour reprendre sa route, mais passe sans freiner sous un portique capable de scanner la plaque : le paiement se fait automatiquement (si l’on est inscrit) ou par la suite, grâce à une appli ou une borne sur une aire d’autoroute.
Le paiement sur autoroute a également inspiré Lyf, la fintech de paiement détenue par BNP Paribas et Crédit Mutuel ainsi qu’Auchan, Casino, Mastercard et Oney (contrôlé par BPCE). Lyf équipe par exemple les boutiques Argedis, filiale de TotalEnergies dans les stations-service, avec un service de scan mobile, permettant aux clients d’enregistrer eux-mêmes leurs achats à partir de leur smartphone.

Recyclage d’ordinateurs
Autre exemple inattendu, chez Crédit Agricole, au travers du financement d’équipement et du leasing. Ces métiers sont très appréciés car peu risqués et peu gourmands en fonds propres. La banque verte soutient ainsi CAL & F, sa filière consacrée à ce type de métiers au travers d’une… usine de recyclage de matériel informatique et de téléphonie.
Présent à Lunel (Hérault), ce centre de reconditionnement appartient à Olinn, une entité rachetée en 2021 : avec 225 collaborateurs, pour moitié dans les bureaux et pour moitié dans l’usine, cette dernière revendique 4 millions de matériels IT traités et réemployés à ce jour. Cette entité offre à la fois le financement (grâce à des formules de location) du matériel qu’elle a sourcé et remis en état, et ce travail industriel de recyclage IT. Un peu comme le ferait le gérant d’une flotte automobile.

Réinventer le métier
Ce type de stratégie ressemble de plus en plus à une réinvention du métier, où les banques remontent la chaîne de valeur pour raisonner en termes d’« univers de besoin ». L’idée est de capter des commissions sur la vente de services non bancaires en immobilisant peu de fonds propres.
En la matière, les fintechs sont à la manoeuvre. Revolut, la licorne britannique valorisée 41 milliards d’euros, a pour ambition de devenir une « super appli » couvrant les besoins de la vie quotidienne. D’où son incursion dans le métier des agences de voyages. L’initiative, lancée en 2021, ciblait sa clientèle historique, intéressée par l’absence de frais à l’étranger promise par la néobanque. D’abord centrée sur les réservations de chambres d’hôtels, l’offre s’est étendue à tout l’univers du voyageur : assurance-annulation, visites guidées, lounges dans les aéroports, cartes SIM virtuelles…

A l’origine, Revolut reversait du « cashback » à ses clients. Puis l’appli a basculé sur un système de points, qui se convertissent en « miles » auprès des compagnies aériennes. « Depuis le lancement, plus de 350.000 réservations ont été faites sur la plateforme, indique un porte-parole, avec une hausse de 20 % par an. »
Cependant, toutes ces tentatives n’ont pas été couronnées de succès. Revolut avait tenté de lancer une conciergerie pour ses clients haut de gamme, sans succès. Idem pour la téléphonie : Crédit Mutuel, après s’être lancé à grand bruit dans les forfaits téléphoniques, est resté simple distributeur, cédant sa filiale à Bouygues Telecom.

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