Gros émetteur de gaz à effet de serre , le numérique peut aussi contribuer à lutter contre le réchauffement climatique ou à s’y préparer. L’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) mise en tout cas désormais sur l’intelligence artificielle (IA), à la fois pour fournir des outils de diagnostic et pour simuler le futur. Pour rappeler l’importance du sujet – et des financements associés -, l’organisme public a précisément choisi ce thème pour son « Atlas annuel des cartes de l’anthropocène », dévoilé jeudi.

« L’irruption de la data transforme totalement le pilotage des politiques publiques en matière de zéro artificialisation nette (ZAN), d’implantation des énergies renouvelables, ou de gestion des forêts, par exemple », insiste Sébastien Soriano , directeur général depuis 2020 de l’organisme public chargé de cartographier la France.

Interpréter les photos aériennes
L’utilisation de l’IA permet notamment d’interpréter des photos aériennes dans un délai record. « On cartographiait auparavant un tiers de la France en dix ans, grâce à l’IA, on peut traiter toute la France en trois ans », affirme le dirigeant. L’IGN a notamment commencé à cartographier le territoire en 3D avec des Lidar (radars laser), un vaste projet lancé en 2021. « On a ainsi créé le troisième plus grand jeu de données mondial sur l’occupation des sols, pour trois fois moins cher qu’avant. »
Les usages de l’IA sont multiples. Après la loi sur l’accélération des énergies renouvelables du printemps 2023, l’IGN a bâti un portail dédié à destination des décideurs locaux, qui présente les zones d’installation possible d’éoliennes ou de centrales photovoltaïques. Ce portail est en ligne depuis décembre dernier. Il utilise aussi l’IA pour mettre à jour bien plus vite ses cartes des risques d’inondation ou de feux de forêt.
Autre exemple, il travaille sur une cartographie des contours des forêts, qui permettra de détecter automatiquement par satellite si les obligations légales de débroussaillement sont respectées. « Nous sommes de même en train de mettre en place un observatoire de la haie, avec l’Inrae et l’OFB », poursuit Sébastien Soriano. Les projets en cours sont nombreux.
Mais l’IGN souhaite maintenant passer à la vitesse supérieure, en modélisant l’impact du réchauffement climatique à venir. Il veut ainsi créer des jumeaux numériques des territoires, permettant de simuler l’érosion du trait de côte ou l’évolution de la forêt, en fonction de différents scénarios de réchauffement et d’adaptation. « Cela permettra de créer de précieux outils d’aide à la décision pour les autorités locales », explique Sébastien Soriano.

Arbitrages budgétaires
Reste toutefois à trouver les financements. « Nous sommes face à un mur d’investissements », insiste le patron de l’IGN. « Il faudrait décupler les fonds consacrés à ce sujet ». Selon lui, seuls 20 millions d’euros ont été débloqués à ce jour.

Le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) s’est déjà saisi du sujet, afin de recenser et de coordonner les initiatives prises dans ce domaine par les acteurs publics de la transition écologique : l’IGN, mais aussi Météo France, le BRGM, le Cerema, l’Inria, le CNES, etc. Il est en train de monter pour cela une équipe de trois personnes, qui sera opérationnelle en octobre. Compte tenu des arbitrages budgétaires requis, reste à voir si Matignon, dont dépend directement la planification écologique, arbitrera en faveur de tels investissements.

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