Alors que les inondations se multiplient cet automne en France, il sera bientôt possible d’y voir plus clair sur les zones les plus exposées aux risques naturels. Et sur le retrait ou non des assureurs, échaudés par les sinistres à répétition. C’est en tout cas l’engagement de la Caisse centrale de réassurance (CCR).

L’établissement public, qui partage avec les assureurs privés le coût de l’indemnisation des catastrophes naturelles (« cat nat »), a officialisé ce jeudi la création d’un observatoire de l’assurabilité. Cette mission lui a été confiée par Bruno Le Maire et Christophe Béchu, anciens ministres de l’Economie et de la Transition écologique. Elle découle des travaux de la mission Langreney sur l’assurabilité du territoire, menacée par le réchauffement climatique, qui augmente la fréquence et le coût des sinistres.
La seule mesure reprise jusqu’à présent a été l’augmentation de 66 % de la quote-part des cotisations d’assurance qui financent le régime « cat nat ». Inédite après vingt-cinq ans de stabilité, elle contribuera à la hausse attendue des prix de l’assurance-habitation, automobile et de l’immobilier d’entreprise, au 1er janvier prochain. Les discussions visant à pérenniser durablement le système « cat nat » vont néanmoins reprendre avant la fin du mois, avec la présentation attendue du nouveau plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC) et l’examen d’une proposition de loi spécifique au Sénat.

Trois types d’événements climatiques couverts
Le futur observatoire de la CCR, dont une première version devrait être publiée au printemps 2025, sera composé de deux cartes, a détaillé jeudi matin Edouard Vieillefond, directeur général du réassureur public. La première recensera les zones les plus sensibles aux inondations, au retrait-gonflement des argiles (RGA) qui provoque des fissures sur les maisons récentes, et enfin les cyclones tropicaux. Ces trois périls sont les principaux risques climatiques couverts par le régime « cat nat », qui s’applique aussi aux séismes et éruptions volcaniques, mais pas aux tempêtes en métropole et à la grêle.
La future carte s’appuiera sur les données de la CCR et de sources externes, comme celles du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). Elle a vocation à être plus complète que les plans de prévention des risques des communes, de qualité hétérogène et parfois inexistants.
Ce pourrait être la première étape d’une nouvelle cartographie nationale, et opposable en droit, des risques naturels. « Ça fait partie des sujets du PNACC, indique Edouard Vieillefond. Mais ça prendra des années »,
La deuxième carte de la CCR recensera « les parts de marché des assureurs, pour voir s’ils sont bien toujours présents, ou pas, dans les zones tendues et moins tendues », explique le dirigeant de CCR. Le réassureur public dispose déjà de données précises, à l’adresse, dans le cadre de ses relations avec ses clients assureurs, qui lui cèdent une partie de leurs risques. L’analyse se concentrera pour le moment sur les maisons individuelles et ne portera pas sur les biens des entreprises assurées, qui ont parfois plusieurs sites.
Les résultats seront en revanche publiés au niveau de la commune, voire des départements ou la région. L’objectif : ne pas rendre identifiables les assureurs présents ou absents des zones difficiles. Il ne s’agit pas de faire du « name and shame », prévient Edouard Vieillefond. Ces travaux ne doivent pas non plus déstabiliser le marché immobilier local.

Bonus-malus
Les données serviront en revanche à la CCR à rétribuer plus ou moins chaque assureur. En tenant compte de spécificités géographiques (petites compagnies régionales…) et de l’historique de leur présence.
Le CCR verse en effet chaque année une rétrocommission aux compagnies, en échange de l’apport d’une partie de leurs primes d’assurance-dommages. Cette commission sera à l’avenir fortement dépendante de leur maintien ou non dans les zones tendues, comme l’avaient révélé « Les Echos ».
L’enjeu financier, de « 150 millions d’euros en vitesse de croisière » peut sembler limité, au regard de la centaine d’acteurs qui commercialisent des contrats de dommages aux biens des particuliers. « Mais ce n’est pas complètement négligeable » et ce critère pourra évoluer « en volume et en contenu », concède Edouard Vieillefond.
Ce nouveau système fait écho à l’idée d’un bonus-malus prônée par le rapport Langreney et reprise à son compte par le précédent gouvernement. La fédération France Assureurs ne fait pas de commentaires à ce stade.

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