L’hiver ne fait que commencer mais les chiffres sont déjà impressionnants. Depuis le début de l’année, la France a exporté 75 térawattheures (TWh) d’électricité vers ses voisins européens, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie, le Benelux et dans une moindre mesure l’Espagne qui, avec ses grands champs solaires, bénéficie de prix encore plus attractifs que l’Hexagone.
Ce score est tel que Marc Benayoun, le directeur exécutif d’EDF chargé du pôle Clients, Services et Territoires, estime que la France est en passe de battre tous ses records. « On attend autour de 90 TWh d’exportations d’électricité cette année », a expliqué ce dernier, à l’occasion d’une conférence de presse ce jeudi. Soit largement plus que le record historique de 77 TWh atteint il y a plus de vingt ans… en 2002.

Une demande atone
Pour EDF, cette performance traduit « le regain de production des centrales nucléaires » et « l’accélération des énergies renouvelables ». Cette année, le parc de 57 réacteurs du groupe devrait produire 340 à 360 TWh, un niveau encore en deçà des belles années mais largement supérieur à l’année 2022, qui avait été catastrophique. Ce score d’exportations exceptionnelles, EDF le doit aussi à l’écart de prix qui profite à la France, en matière d’électricité, sur les marchés de gros. Désormais et depuis la fin de la crise de production du nucléaire tricolore, les Français payent à nouveau leur électricité une quinzaine d’euros moins cher que les Allemands sur les marchés de gros.
L’autre facteur qui pèse largement dans l’explosion de ce niveau d’exportations, c’est la faiblesse de la demande d’électricité en France. « Sur tous nos segments de clientèle, la demande est en baisse de 8 % à 10 % par rapport à avant la crise », explique Marc Benayoun, qui concède que le groupe EDF n’avait pas prévu que la demande se limite à 400 TWh en France cette année. C’est environ 10 % de ce qu’attendait le groupe en 2019 à cet horizon.

Ruée des géants des data centers vers EDF
Les raisons de ce coup de frein sont connues : ralentissement de la vente de véhicules électriques, réindustrialisation plus difficile qu’anticipé mais aussi pérennité des écogestes et des économies d’énergie. En dépit de ce contexte, EDF garde son cap. Il vise 150 TWh de consommations supplémentaires d’ici à 2035 en France, grâce d’abord à la demande des véhicules électriques mais aussi à celle des data centers et des industriels. Dans le détail, le groupe attend 70 TWh de demande supplémentaire liée au transport, 60 TWh issus de l’industrie et 20 à 30 TWh des centres de données, avec un vrai décollage des connexions au réseau « d’ici à 2028-2029 ».
« La demande électrique des data centers est en train d’exploser », confirme Marc Benayoun, qui explique discuter avec trois géants du secteur qui demandent la mise à disposition d’une puissance allant jusqu’à 1 GW pour un seul site « soit l’équivalent d’un réacteur nucléaire » par data center. C’est considérable et lié aux besoins de l’intelligence artificielle. A ce jour, la puissance moyenne d’un centre de données implanté en France oscille plutôt autour de 100 MW.

De quoi mettre l’approvisionnement national sous tension ? Pas vraiment, estime EDF. « On a largement assez d’électricité pour approvisionner ce type de sites, la question clé c’est notre capacité à les raccorder très rapidement : pour ces sites il faut de la haute tension, ce sont donc des pylônes visibles dont l’installation implique des débats publics parfois trop longs aux yeux des acteurs internationaux », précise le dirigeant. 

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