Prix encore trop élevés, aides à l’achat en baisse… La plupart des facteurs expliquant la baisse des ventes de voitures électriques ces derniers mois sont connus. Mais les « wattures » souffrent aussi de la prudence qu’elles suscitent chez les spécialistes du leasing, ce mode de financement automobile de plus en en plus répandu.
Les professionnels redoutent que les modèles à batterie achetés aujourd’hui ne génèrent des montagnes de pertes à moyen terme, avec la dépréciation des stocks de véhicules. Un risque évalué à 8 milliards d’euros à l’échelle européenne, selon une étude réalisée il y a quelques semaines par le cabinet Corporate Value Associates (CVA).
Pour de nombreux professionnels, le leasing, ou location longue durée (LLD), représente l’avenir du secteur. L’utilisateur n’achète plus la voiture, il la loue, le plus souvent durant trois ans. Il a ensuite l’obligation de la restituer, contrairement à la location avec option d’achat (LOA) qui prévoit une possibilité d’acquisition au terme du contrat.
Le système préféré des entreprises
« Le leasing opérationnel avec services est devenu depuis longtemps la norme pour les grandes entreprises, qui y trouvent de la visibilité et évitent les mauvaises surprises au moment de la revente, explique Markus Collet, associé chez CVA. Cela leur permet d’externaliser la maintenance, l’assistance, et plus globalement toute la gestion de flotte. Ces dernières années, les sociétés de plus petite taille s’y sont mises, ainsi que de plus en plus de particuliers. » Selon CVA, le leasing couvrira 57 % des immatriculations en Europe à l’horizon 2030, contre 36 % en 2021.
Pour les « leasers » comme Arval ou Ayvens, la rémunération repose sur deux pieds : les mensualités que verse l’utilisateur, et la revente du véhicule sur le marché de l’occasion à l’issue du contrat. Le paramètre essentiel de l’équation est la valeur résiduelle, c’est-à-dire le prix que le propriétaire peut en tirer sur le marché de l’occasion, qui détermine par ricochet le montant des mensualités de la LLD.
Pour fixer le montant de cette valeur résiduelle, des spécialistes compilent des montagnes de données à partir des transactions enregistrées sur le marché. Pour les voitures essence et diesel, le mécanisme est bien rodé, même si la santé du marché a évidemment un impact au moment de la revente. Ce n’est pas le cas avec la voiture électrique, qui a donné lieu depuis l’an dernier à de très mauvaises surprises pour les professionnels.
Des prix de revente plus bas que prévu
Sur le marché de l’occasion, « on n’arrive pas à les vendre », résume un important concessionnaire français. Ou alors en acceptant un gros rabais par rapport à la valeur prévue. « Actuellement, les prix de revente des véhicules électriques sont nettement plus bas que ce qui était escompté », confirme Markus Collet.
Le leaser britannique Zenith, qui a misé très tôt sur l’électrique avec 30 % de voitures à batterie dans sa flotte de 77.000 véhicules, en a fait l’amère expérience. Son compte de résultat 2023, clos au 31 mars, fait apparaître un bénéfice moyen de 3.700 livres par voiture essence ou diesel revendue au terme du contrat… et une perte de 2.000 livres par véhicule pour les modèles électriques.
Selon la société spécialisée Indicata, le délai moyen pour écouler une voiture électrique d’occasion en France est longtemps resté à 150 jours, soit trois fois plus qu’une diesel. L’indicateur est descendu à 116 jours en juin, une baisse des stocks obtenue grâce à de gros discounts. Selon l’observatoire de La Centrale, le prix de vente moyen des véhicules électriques de seconde main a reculé de 20 % sur un an, soit deux fois plus que le marché.
Tesla porte une part de responsabilité. Au printemps 2023, le leader de l’électrique a sabré ses prix catalogue pour relancer des ventes. Avec par exemple 11.500 euros de baisse en trois mois pour une Model 3 ! Conséquence, la valeur des Tesla d’occasion a dégringolé, faute de quoi les acheteurs auraient trouvé plus avantageux d’en acheter une neuve. Net leader des ventes, le constructeur a entraîné par contagion tout le marché avec lui. « Le secteur a pâti de ces repositionnements permanents », déplore Xavier Chardon, le président de Volkswagen Group France.
La concurrence des modèles neufs
Mais d’autres facteurs viennent saper la valeur de revente des voitures électriques. La principale raison est la tendance à la baisse des prix des modèles neufs. Les constructeurs occidentaux s’efforcent de baisser l’écart de 30 % environ qui demeure avec les modèles thermiques. Sans compter la concurrence des constructeurs chinois, qui tirent eux aussi les prix vers le bas.
Les Peugeot 208 ou Renault ZOE vendues ces dernières années avec un prix catalogue largement supérieur à 30.000 euros se retrouvent donc sur le marché de la seconde main face des R5 neuves à 25.000 euros, ou des Citröen C3 à 23.300 euros avant bonus. Une pression à la baisse qui n’existe pas dans les thermiques, où les nouvelles générations affichent des prix stables ou en hausse.
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