Il devait succéder à Paul Bulcke à la tête de Nestlé en 2017. Le conseil d’administration lui avait alors préféré Mark Schneider, un « outsider » venu du monde médical allemand, un pur financier, qui avait enrichi le groupe Fresenius. Laurent Freixe, 62 ans est finalement arrivé aux commandes en septembre dernier, présenté en interne comme « l’homme de la situation » alors que Nestlé traverse une période très éprouvante.
Cette valeur de fond de portefeuille a perdu 26 % sur cinq ans à la Bourse de Zurich, 23 % sur les seuls derniers mois. Le chiffre d’affaires stagne, le géant suisse de l’agroalimentaire a perdu des parts de marché au profit de marques moins chères, et les prévisions sont ternes. Charge à Laurent Freixe de sortir le leader mondial de l’ornière.
Trente-huit ans dans la maison
Laurent Freixe pratique la maison Nestlé depuis trente-huit ans. Il en a gravi tous les échelons et en connaît tous les arcanes. Il y est entré à l’âge de 24 ans, armé de ses diplômes de l’Ecole des hautes études commerciales du Nord (Edhec) et de l’Institut international de management de Lausanne.
Après avoir fait ses premières armes comme responsable des ventes et du marketing pendant treize ans, il a été nommé à la direction de la division nutrition. Puis, il a été responsable de divers pays, dont la Hongrie et la péninsule ibérique, avant de devenir vice-président de la région Europe en 2008, puis d’être nommé à ce poste pour toute la région Amérique en 2014.
Très apprécié des équipes, Laurent Freixe fait, dit-on, souffler un vent nouveau entre les murs du siège de Vevey, sur les bords du lac Léman. Décrit comme discret et ne cherchant pas les coups d’éclat, il correspond parfaitement à l’image que cultive le groupe. Il se donne deux ans pour renouer avec une croissance de l’ordre de 4 %, plus conforme aux performances historiques du groupe.
En quelques semaines, il a réorganisé le management, décidant à la fois d’alléger ses directions et de les rapatrier à Vevey. Laurent Freixe veut mettre en place « une collaboration plus étroite entre les membres basés au siège ». Les décisions doivent se prendre plus vite et ainsi « apporter un élan plus puissant aux initiatives mondiales » afin que le leader mondial gagne en dynamisme et reprenne des parts de marché.
Tous les responsables des principales unités […] me rendront compte désormais directement.
Laurent Freixe, directeur général de Nestlé
Avec cette nouvelle organisation qui concentre les pouvoirs, le nouvel homme fort de Nestlé compte bien veiller au grain. « Tous les responsables des principales unités qui stimulent notre performance et notre transformation me rendront compte désormais directement. Cela est crucial », a-t-il commenté. Les missions sont clairement définies.
Il faut « se concentrer davantage sur les consommateurs et les clients » et relancer l’innovation. Laurent Freixe mettra également « davantage l’accent sur la transformation numérique de Nestlé en une organisation connectée en temps réel, de bout en bout, alimentée par les données et l’intelligence artificielle ».
Marques renforcées
A l’inverse de son prédécesseur, qui a réduit les dépenses de publicité afin de préserver les marges, Laurent Freixe a dit son intention, devant les investisseurs réunis le 20 novembre en « capital markets day », de réaliser des efforts accrus en direction des marques. Le budget dédié passera ainsi de 7 % à 9 % du chiffre d’affaires d’ici à la fin 2025.
Ce changement de cap, surtout consacré aux 30 marques milliardaires, a déjà été illustré par l’annonce d’un partenariat entre KitKat et la Formule 1 signé mi-novembre, « le plus important pour une marque Nestlé à date ». Il sera lancé durant la prochaine saison de F1 (2025) et il se poursuivra en 2026. KitKat bénéficiera ainsi d’une exposition majeure avec cette vitrine de prestige.
Au chapitre des mesures phares, le nouveau patron de Nestlé a annoncé aux investisseurs qu’il crée une entité mondiale distincte pour les eaux et boissons haut de gamme. Celle-ci sera placée sous la houlette de Muriel Lienau, directrice générale de Nestlé Waters Europe. Les eaux (Perrier, Vittel, Hépar, Contrex), mises en cause pour pratiques illégales et tromperie du consommateur, représentaient l’an dernier 3,6 % du chiffre d’affaires du groupe. « La nouvelle direction évaluera la stratégie pour cette activité », a indiqué le groupe.
Une formule qui ne peut exclure une potentielle mise en vente ou une forme de désengagement, telle que le géant suisse l’a pratiquée à plusieurs reprises dans certains de ses domaines d’activité.
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