« L’Amérique devrait libérer le peuple britannique de son gouvernement tyrannique. Oui, Non ? ». C’est avec ce post, sous forme de sondage, qu’Elon Musk, propriétaire du réseau social X devenu bras droit de Donald Trump, a ouvert la semaine. Ce message provocateur arrive après une longue liste de sorties similaires, ces derniers jours, de la part du milliardaire libertarien, qui a littéralement pris en otage la rentrée politique de janvier au Royaume-Uni.
Notamment depuis les émeutes raciales de l’été dernier, le patron de Tesla et de SpaceX, qui se mêle de plus en plus de politique en Europe, a pris en grippe le gouvernement de Keir Starmer. Au point que le Premier ministre travailliste a dû s’exprimer ce lundi après avoir tenté d’éviter toute confrontation publique avec l’influent homme d’affaires.
Le bras de fer intervient à un moment où Donald Trump menace de diviser le Royaume-Uni et l’Union européenne. Ces tensions seront l’un des dossiers à régler par Peter Mandelson, un des grands ministres de Tony Blair, qui a été nommé ambassadeur du Royaume-Uni à Washington et avait plaidé pour de bonnes relations avec Elon Musk.Deux poids, deux mesures
Le milliardaire d’origine sud-africaine s’est désormais saisi de l’affaire des viols d’enfants par des réseaux de pédophiles d’origine indo-pakistanaise, entre la fin des années 1990 et jusqu’en 2013. Il a accusé Keir Starmer sur X d’être « complice du viol de la Grande-Bretagne ». Il accuse en général les institutions britanniques, de la police à la justice en passant par les politiques, de faire deux poids deux mesures, en fermant les yeux sur l’ampleur du scandale, tout en sanctionnant les prises de parole, sur les réseaux sociaux, des critiques venues de l’extrême droite, comme celles du militant Tommy Robinson.
Keir Starmer était le directeur du Crown Prosecution Service (CPS) entre 2008 et 2013, soit l’équivalent de procureur général en France. « Une ligne a été dépassée », s’est insurgé le chef du gouvernement Labour lundi en défendant en particulier l’une de ses secrétaires d’Etat, traitée de « sorcière du mal » par Elon Musk parce qu’elle aurait refusé en octobre une nouvelle enquête nationale sur le sujet, optant pour une enquête par les autorités locales d’Oldham.
Il a dénoncé « ceux qui propagent mensonges et désinformation » et « ne sont pas intéressés par les victimes ». Dans son viseur également, les personnalités politiques qui se saisissent de cette affaire et « sautent dans le train de l’extrême droite ». La leader des conservateurs, Kemi Badenoch, a demandé une « enquête nationale » sur le sujet.Mensonges et désinformation
Les accusations contre Keir Starmer se concentrent sur 2009, lorsque la décision avait été prise de ne pas poursuivre des pédophiles présumés à Rochdale, près de Manchester, car les avocats pensaient que les victimes ne seraient pas crédibles. Il n’y a aucune preuve que Keir Starmer ait été au courant des détails de cette affaire.
Celle-ci a ensuite été réouverte en 2011 et selon le procureur régional interviewé dans le « Financial Times », Keir Starmer « était 100 % derrière cette décision ». Le Premier ministre et ses défenseurs affirment qu’il a laissé un Crown Prosecution Service bien plus sévère dans ce genre d’affaires, en particulier dans le cas où des considérations raciales pourraient conduire les autorités à ne pas regarder les choses en face.Enquête nationale
Une enquête nationale a été lancée en 2015 pour comprendre pourquoi les autorités locales avaient failli aux victimes, qui se comptent au moins en milliers (« des centaines de milliers » de « petites filles britanniques », selon Elon Musk). Le ministre de la Santé Wes Streeting a expliqué que son gouvernement ne voulait pas relancer d’enquête nationale car le temps était venu de la mise en place des recommandations de celle-ci et des enquêtes locales. Ce qu’auraient pu faire les Tories, au pouvoir pendant quatorze ans jusqu’à juillet dernier, a pointé du doigt Keir Starmer.
Maigre consolation pour le Premier ministre britannique, qui comptait focaliser l’attention ce lundi sur de nouvelles réformes pour le système de santé, le milliardaire américain en croisade contre le wokisme s’est désolidarisé de Nigel Farage, l’influent leader du parti d’extrême droite Reform UK et nouvel élu à Westminster.« Pas les qualités » pour diriger Reform UK
Alors qu’il l’avait rencontré à Mar-a-Lago le mois dernier, chez le futur président américain, Elon Musk vient d’estimer que Farage n’avait « pas les qualités » pour diriger ce parti. Une rumeur circule que le patron de Tesla pourrait financer Reform UK à hauteur de 100 millions de dollars.
Nigel Farage n’a pas voulu s’associer à Elon Musk pour défendre Tommy Robinson et accuser la secrétaire d’Etat qu’a défendue Keir Starmer. « Le fait que Musk me soutienne ou soutienne Reform ne veut pas dire qu’en tant que grandes personnes, nous devons être toujours d’accord sur ce que l’autre dit », avait déclaré dimanche Nigel Farage à un média britannique. En ajoutant : « Mais je crois à la liberté d’expression, et je pense qu’il est un héros. »
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