Opinion | Lutter contre la pollution plastique, maintenant ou jamais !
À travers le monde, près d'un million de bouteilles en plastique sont vendues chaque minute. Depuis 2015, ce sont plus de 6,9 milliards de tonnes de déchets plastiques qui ont été produites, dont 9 % ont été recyclées, 12 % ont été incinérées et 79 % ont été accumulées dans des décharges ou dans la nature. Les plastiques représentent 85 % des déchets dans les mers et les océans. Ces chiffres, au-delà d'être alarmants, appellent à une réaction concertée d'ampleur de la part de la communauté internationale pour lutter contre la pollution plastique dans le monde et préserver les milieux marins. Un texte revu à la baisse Alors qu'ont lieu les négociations de la dernière chance à Busan (Corée du Sud) pendant la cinquième - et dernière - session de négociations du Traité mondial contre la pollution plastique, la France doit se mobiliser pour obtenir un traité aussi ambitieux dans ses exigences que contraignant dans ses provisions pour apporter une réponse efficace à la hauteur des enjeux. Le plastique représente une menace environnementale et de santé publique majeure qui ne peut plus être ignorée. LIRE AUSSI : ZOOM - Le plastique, un poison pour l'homme Il est urgent et indispensable que notre société accélère les analyses de l'évaluation des risques liés au plastique et prenne les mesures nécessaires, en se référant notamment au principe de précaution. Et pourtant, alors que la pollution plastique est en constante augmentation, depuis le début des négociations, le texte du traité a été revu à la baisse. Aujourd'hui, ces négociations se jouent davantage entre pays préoccupés par la préservation d'intérêts politiques et économiques qu'entre nations engagées pour la préservation de notre planète, prenant ainsi en otage l'humanité tout entière. Nous regrettons d'ailleurs le manque de représentation de la société civile dans ces négociations. Fausses bonnes idées Nous mettons en garde contre les fausses bonnes idées qui pourraient irriguer le texte du traité en cas de statu quo. Si le recyclage fait partie de la solution, il ne suffit pas. Seuls 9 % des produits plastiques fabriqués à travers le monde sont recyclés et tous les plastiques ne sont pas recyclables. Il faut aller plus loin et être plus exigeant ! Pour cela, nous appelons notamment à inscrire l'interdiction de principe des plastiques à usage unique d'ici 2040 dans le traité. Cessons de cultiver l'illusion confortable selon laquelle le recyclage pourra résoudre à lui seul le problème de pollution plastique et de production de déchets plastiques. Pour réduire la pollution plastique, c'est l'entièreté du cycle de vie qui doit être prise en compte. Il faut inclure dans le traité la notion « d'empreinte plastique » similaire à celle d'empreinte carbone. Elle permettra de mesurer et d'évaluer l'impact réel des produits fabriqués en plastique. LIRE AUSSI : EN CHIFFRES - Où produit-on le plus de plastique dans le monde ? CHRONIQUE - De l'utilité d'un « GIEC » du plastique ! Enfin, et surtout, il faut s'assurer de l'efficacité du traité, pour ne pas aboutir à une énième contrainte réglementaire non respectée, non appliquée voire décriée. Pour cela, nous souhaitons un traité international de type convention spécifique assortie d'annexes techniques. Ce type de texte permettra de s'entendre sur des objectifs précis au sein du traité et de le faire évoluer de façon souple grâce à ses annexes techniques. Alors que l'impact des activités humaines sur le changement climatique n'a jamais été aussi évident, que la récente élection américaine semble inaugurer un recul des engagements environnementaux internationaux, la France, qui fait partie de la Coalition pour la Haute ambition pour ce trait, a un rôle de leader à jouer. Nous appelons de nos voeux qu'elle se saisisse pleinement de cette dernière chance pour obtenir un texte réellement protecteur de notre planète et de ses citoyens. Nathalie Van Den Broeck est présidente de Surfrider Foundation Europe, rapporteure de l'avis du Conseil économique social et environnemental sur le Traité international sur la pollution par les plastiques. Sabine Roux de Bézieux est présidente de la Fondation de la mer, rapporteure de l'avis du Conseil économique social et environnemental sur le Traité international sur la pollution par les plastiques.