L’essor du bitcoin préoccupe les banques centrales
La popularité retrouvée d'un bitcoin, qui vient de franchir la barre des 100.000 dollars réjouit la cryptosphère. Mais, au sein des grandes banques centrales, le coeur est beaucoup moins à la fête. Même si cette menace semble encore très éloignée, elles redoutent que les cryptoactifs ne viennent concurrencer leurs propres monnaies. Au risque de porter atteinte à la stabilité monétaire dont elles sont les garantes. « Depuis quelques semaines, et particulièrement depuis l'élection de Donald Trump qui a fait bondir le bitcoin, on sent une plus grande fébrilité, souligne une bonne connaisseuse de l'univers des banques centrales. Cela pourrait même pousser la Banque centrale européenne (BCE) à accélérer ses travaux sur l'euro numérique. » Moyen de paiement alternatif Les inquiétudes des grands instituts d'émissions portent d'abord sur le risque de voir les cryptos s'imposer comme un moyen de paiement alternatif. Cet usage pourrait se démocratiser auprès du grand public. La chaîne de grands magasins Printemps accepte désormais les règlements en bitcoin. Cela pourrait créer un engouement nouveau, avec le risque que la volatilité inhérente aux cryptos classiques affecte la valeur des portefeuilles dédiés des particuliers. LIRE AUSSI : DECRYPTAGE - A plus de 100.000 dollars, le bitcoin confirme sa percée vers les sommets DECRYPTAGE - Le bitcoin doit aux ETF son extraordinaire envolée Dans le domaine des entreprises, la récente expérience du géant des paiements numériques PayPal a déclenché un signal d'alarme. Ce dernier possède sa propre crypto stable (stablecoin en anglais), le PYUSD, qui est adossé au dollar. Et il l'a utilisée pour régler une facture au cabinet comptable EY. Jusqu'à présent les paiements interentreprises en cryptomonnaies étaient plutôt réservés aux entreprises du secteur. Elles pourraient se multiplier. Coinbase affirme ainsi être contacté par un nombre croissant de sociétés appartenant au classement Fortune 500 pour expérimenter des paiements en crypto. Perte de surveillance Si cet usage devenait plus répandu, de nombreux paiements échapperaient au système bancaire, et donc à la surveillance des banques centrales qui les supervisent. Avec à la clé, estiment les banquiers centraux, un risque accru en termes de défaut de contrepartie, d'opacité et de solidité des intermédiaires. D'où l'émergence de projets plus ou moins aboutis de monnaie numérique de banque centrale pour les paiements. La Chine teste depuis 2020 son yuan électronique, le e-CNY, avec des volumes en constante croissance. La BCE semble de son côté de plus en plus décidée à lancer son euro numérique, même si celui-ci ne sera probablement pas disponible avant 2028. LIRE AUSSI : DECRYPTAGE - Etats-Unis : Donald Trump désigne le pro-crypto Paul Atkins pour reprendre en main le gendarme de Wall Street Mais un autre risque, encore plus systémique, inquiète les grands instituts d'émission. Celui-ci est lié à la tokenisation de la chaîne des transactions financières. L'idée est d'utiliser la technologie de la blockchain pour toutes les étapes de création d'un titre financier, une obligation par exemple, depuis son émission jusqu'au règlement-livraison, c'est-à-dire le paiement et le transfert de propriété. Cette évolution aurait le mérite d'accélérer le processus en assurant la sécurité des opérations. Toutefois, à l'heure actuelle, la phase de règlement-livraison n'est pas aussi solide que pour les transactions physiques. Classiquement, ces opérations entre établissements dépositaires des titres se concluent en monnaie de banque centrale. C'est-à-dire, en Europe, avec leurs fonds conservés par la BCE qui offrent une sûreté plus forte que les sommes qu'elles ont simplement à leur bilan. Sécurité des transactions financières Or, il n'y a pas d'équivalent de cette monnaie de banque centrale dans l'univers des cryptos. Ce qui freine actuellement la démarche de tokenisation. Certes, les stablecoins pourraient représenter une solution, puisque la valeur de ces jetons est censée être arrimés à celle d'une grande devise « fiat » comme le dollar. Mais leur solidité est égale à celle de la société qui les émet. Bien loin de celle d'une banque centrale. Faute d'une alternative convaincante disponible suffisamment rapidement, certains acteurs de marchés pourraient tout de même être tentés d'utiliser les cryptos stables, avec tous les dangers que cela comporte. La BCE a donc lancé un projet pilote sur la tokenisation des transactions financières, afin de fournir une solution aussi sûre que pour les opérations physiques. La Banque de France est particulièrement en pointe dans cette initiative, avec une chaîne d'opérations entièrement numérique grâce à une monnaie numérique de banque centrale de gros utilisée pour le règlement livraison. Plusieurs tests ont jusqu'ici validé ce dispositif. Le conseil des gouverneurs de la BCE doit décider de se lancer, ou non, dans une phase plus dynamique en 2025.
A plus de 100.000 dollars, le bitcoin confirme sa percée vers les sommets
2024, année de tous les records pour le bitcoin et les cryptos. Un mois après l'élection de Donald Trump, le bitcoin (BTC) vient de franchir les 100.000 dollars, à près de 104.000 dollars (98.000 euros). Après avoir frôlé ce cap symbolique des 100.000 dollars il y a dix jours, le bitcoin a profité ces dernières heures de la désignation par Donald Trump de l'avocat républicain pro-crypto Paul Atkins pour devenir le nouveau patron de la SEC (Securities and Exchange Commission), le régulateur des marchés financiers. Il aura fallu à peu près autant de temps au bitcoin - plus de sept ans - pour grimper de 1 à 1.000 dollars, et pour s'envoler de 10.000 (décembre 2017) à 100.000 dollars. Il lui avait en revanche suffi de dix mois en 2017 pour avancer, à pas de géant, de 1.000 à 10.000 dollars. La leader des cryptos vaut désormais le quart du prix d'une maison aux Etats-Unis, estimé autour de 400.000 dollars par la Réserve fédérale. Le bitcoin vaut plus qu'un kilo d'or, qui se traite autour de 85.000 dollars. En 2016, après l'élection surprise de Donald Trump, le bitcoin avait bondi de 50 % en trois mois. Il avait alors atteint un premier seuil psychologique à 1.000 dollars. Mais, à l'époque, le nouveau président n'était guère intéressé par les cryptos. Le bitcoin n'était pas un enjeu électoral ni un objet de discorde, comme aujourd'hui, entre démocrates et républicains. Jugée anecdotique ou condamnée à disparaître à terme, la crypto ne faisait de l'ombre à personne. Huit années plus tard et presque autant de crises, la victoire du républicain a offert une nouvelle échappée solitaire à la leader des cryptos. Elle s'est effectuée dans des volumes très élevés, que ce soit sur le marché au comptant ou sur les dérivés, constate Kaiko Research. Les traders sur options n'excluent pas une poussée jusque vers 120.000 dollars. Avec l'ether, le bitcoin est dans le peloton de tête des progressions depuis la victoire de Donald Trump, qui veut réconcilier l'Amérique avec les cryptos. Cette année, le bitcoin gagne 144 %, derrière le dogecoin (390%), ripple (291%) et TRON (207%). C'est la quatrième crypto la plus performante du Top 10 en 2024. L'autorisation d'ETF sur les cryptos, ces fonds cotés en Bourse à Wall Street (New York Stock Exchange et Nasdaq), a surtout profité au bitcoin. Ce sont les souscriptions massives dans ces instruments, après la victoire de Trump, qui ont contribué à son ascension fulgurante. Wall Street, tout autant que les plateformes de crypto américaines comme Coinbase, est devenu le marché directeur du bitcoin. C'est lui qui donne le ton à toute la cryptoplanète, alors que c'était l'Asie aux débuts de l'ère des nouvelles monnaies virtuelles. La conquête des 100.000 dollars Dernier cadeau des démocrates Le secteur des cryptos espère que les Etats-Unis vont redevenir, sous Trump, la patrie de la prise de risque décomplexée et de la dérégulation. Il a versé 135 millions de dollars à la campagne du républicain et en espère un retour sur investissement : un environnement réglementaire propice au développement et à la poursuite de la démocratisation de l'investissement en bitcoin. Mais, un dernier « cadeau » de l'administration démocrate pourrait mettre un terme provisoire à cette cryptoeuphorie. Si le département de la Justice décidait, avant la passation de pouvoir au camp républicain, d'inculper le géant Tether, leader des cryptos stables (ou stablecoins), le marché pourrait connaître, à nouveau, de violentes secousses. Comme les autres actifs (actions, obligations, or), les cryptos devraient au moins profiter d'un environnement monétaire plus favorable et de liquidités plus abondantes. « La récente baisse des taux de 25 points de base de la Réserve fédérale constitue un environnement favorable pour les cryptos. La préférence de Donald Trump pour les taux bas […] renforce l'attrait du bitcoin », estime Marion Labouré, analyste spécialisée sur les cryptos à la Deutsche Bank. Comme Musk l'a fait par le passé, Donald Trump veut faire bouger les lignes sur le bitcoin. Parmi les membres de sa nouvelle équipe, la plupart ont déjà investi sur les cryptos, selon leurs déclarations de patrimoine. Aucun n'est idéologiquement hostile au bitcoin. Un conseil des actifs cryptos et numériques, regroupant les principales firmes du secteur, devrait être créé à la Maison-Blanche. Un signe de plus de la bonne volonté des républicains à l'égard des cryptos et du changement de cap à 180 degrés par rapport aux démocrates.
Amazon revient dans la course à l’IA avec de nouveaux modèles
Amazon a dévoilé ce mardi toute une famille de modèles d'IA, capables de rivaliser avec les produits stars d'OpenAI, de Meta et de Google. Lors de l'événement annuel « reInvent » de la filiale cloud Amazon Web Services (AWS) à Las Vegas, le patron du géant américain de l'e-commerce a fait une apparition surprise sur scène. Andy Jassy a annoncé pas moins de 6 nouveaux modèles d'intelligence artificielle. La famille de modèles Nova comprend notamment quatre modèles fondamentaux, allant du plus petit, Micro, qui coûte le moins cher pour effectuer des tâches simples, au plus grand et au plus cher, Premier. Un autre modèle, Canvas, permet de générer des images, tandis que Reels peut créer des vidéos, de six secondes seulement pour l'instant. Le géant américain de la tech devrait maintenir la cadence l'an prochain. Au premier trimestre, Amazon dévoilera un modèle « speech-to-speech », reposant exclusivement sur la voix. Et au milieu de l'année prochaine, le groupe de Seattle lancera un modèle « entièrement multimodal », qui pourra comprendre et générer du texte, des commandes vocales, des images et des vidéos. Amazon à la traîne ? Le groupe fondé par Jeff Bezos a pâti, ces dernières années, d'une réputation de retardataire dans l'IA, derrière Google et Microsoft. En mai, le patron de sa branche cloud, Adam Selipsky, a démissionné après trois ans seulement à son poste. Il a été accusé d'avoir manqué le virage de l'IA générative, pendant que Microsoft, le grand rival d'Amazon dans le cloud, investissait avec succès dans OpenAI. Il a été remplacé par Matt Garman, qui a fait de l'IA une priorité.
John Lewis Christmas ad achieves highest effectiveness score this decade
The retailer put its products, flagship store and a family focus at the heart of its Christmas ad, which has seen its best score for potential effectiveness since 2019. By Amrit Virdi 15 Nov 2024 John Lewis’ latest Christmas ad, ‘The Gifting Hour’, has scored a 4.6 star rating on System1’s Test Your Ad platform, making it the brand’s most effective ad since ‘Excitable Edgar’ in 2019. This year’s advert depicts a woman frantically trying to find a gift for her sister in the Oxford Street flagship store before she falls through a rack of dresses and is transported to a world of memories she and her sister have shared from teenage arguments to pregnancies and happy memories in their childhood home. The rating is based on a 5.9-star scale that predicts the ad’s potential to drive long-term brand growth and market share. The last time the ad scored within the 4-star range was in its 2020 efforts. The 2024 ad, created with Saatchi & Saatchi, also saw its highest brand fluency (recognisability) score for over a decade, which System1 puts down to the advert’s focus on the store and products. John Lewis strayed away from its traditional theme of using brand characters this year, as the advert forms part of a trilogy that kicked off in September. The product-focused ads have highlighted the return of its ‘Never Knowingly Undersold’ price promise, which was brought back in September to enhance value perceptions of the brand. John Lewis positions itself as ‘home of gifting’ with festive love letter to physical retail Charlotte Lock, customer director at John Lewis, told Marketing Week that releasing the adverts in a trilogy helped to drive conversion at Christmas, and that the ad would cement John Lewis as the “Christmas gifting destination” after being “dormant for a few years”. “Shoppers start thinking about Christmas and thinking about buying in September. This was the right time to bring back Never Knowingly Undersold as people were starting to think about purchasing. We had to make sure there wasn’t just awareness, but there was consideration and conversion,” she said. She also shared that the first two chapters of the trilogy have generated “fantastic results”, with organic search up 17% year on year and the Net Promoter Score up by 10 points. Jon Evans, CMO of System1, says “thoughtful gifting” has been the “common thread” in John Lewis ads over the past decade. “It’s what makes ‘The Gifting Hour’ such a great Christmas ad too,” he adds. Last year’s Christmas ad from the retailer scored 3.6 stars on the System1 rating, beaten by Aldi and M&S Food. This was higher than its score in 2022 (3.3 stars) and in 2021 (3.1 stars). “The lifetime bond between the sisters means love, family and gifts are among the strongest associations viewers have with the ad,” adds Evans on this year’s effort. “John Lewis continues to make Christmas ads like nobody else, and the people have spoken – it’s one of their best.” Lock hopes this year’s ad will reach a wider demographic with in-store events and a social-first TikTok campaign and competition, run alongside singer Richard Ashcroft, accompanying the ad.
Fin des cookies tiers : le marketing digital repensé par les marques
Finalement, la fin des cookies tiers, avec ou sans Google s’avère un puissant moteur d’innovation. Elle pousse les entreprises à adopter des approches plus éthiques et centrées sur l’utilisateur. Elle ouvre la voie à un paysage digital plus respectueux de la vie privée et plus engageant pour les consommateurs. C’est l’opinion de Lilia Sadiki, directrice data […]
Budget 2025 : les compagnies aériennes vont devoir rembourser le trop-perçu de taxe
La chute du gouvernement Barnier aura au moins une conséquence positive pour les passagers ayant acheté un billet d'avion au départ de la France pour 2025. Les compagnies aériennes qui, comme Air France, avaient anticipé l'augmentation de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TSBA) prévue en 2025 vont devoir leur rembourser du trop-perçu. Avec la censure du gouvernement, toutes les dispositions fiscales inscrites dans le projet de loi de finance 2025 devraient ainsi être mises sur pause pour une durée encore incertaine, le scénario le plus probable étant que le Parlement vote une loi d'urgence reconduisant le budget 2024, dans l'attente d'un nouveau gouvernement. Il faudra sans doute attendre un nouveau projet de loi de finance rectificative, début 2025, pour que ces dispositions nouvelles puissent éventuellement refaire surface. LIRE AUSSI : Censure : le projet de budget 2025 a-t-il encore un avenir ? De quoi compliquer sérieusement les prévisions budgétaires des entreprises. A lui seul, le triplement de la TSBA devait se traduire par un milliard d'euros de prélèvements supplémentaires sur le transport aérien, dont 280 millions pour le groupe Air France. Chaque semaine qui passe sans cette mesure serait donc autant d'argent économisé pour les compagnies et leurs clients. Mais il est à craindre que cette surtaxe réapparaisse en cours d'année. Il serait même possible que l'augmentation, qui avait été fortement atténuée par des amendements au Sénat, soit plus importante que prévu, afin de compenser le manque à gagner du début de l'année. Les crédits d'impôts dans les limbes Même incertitude pour l'une des mesures les plus décriées du budget 2025 : le relèvement pour deux ans du taux d'imposition des bénéfices des grandes entreprises de plus d'un milliard d'euros de chiffre d'affaires. Si Air France-KLM et les autres compagnies aériennes françaises étaient susceptibles d'échapper à cette ponction supplémentaire, les grands noms de l'aéronautique étaient clairement dans le collimateur. Safran avait ainsi estimé ce supplément d'impôt à 500 millions d'euros sur la période 2025-2026, dont plus de 300 millions rien qu'en 2025, avec un taux d'imposition qui serait passé de 25 % à 36 %. En l'état actuel des choses, son taux d'imposition ne bougera pas. Mais là encore, le répit n'est peut-être que provisoire. Face à cette incertitude, le groupe n'a pas modifié ses prévisions financières dans l'immédiat, mais il pourrait avoir à le faire lors de la présentation des résultats 2024, en février. LIRE AUSSI : Aéronautique : Safran livrera plus de moteurs Leap en 2025 D'autant que d'autres mesures susceptibles d'affecter le budget 2025 des entreprises à la hausse ou à la baisse, sont également en suspens. Parfois pour le mieux, comme la baisse du crédit d'impôt recherche et la réduction des exonérations de charges sur les bas salaires qui étaient autant de pierres dans le jardin des industriels. Mais c'est aussi le cas des rares mesures favorables aux entreprises. Les compagnies aériennes se réjouissaient notamment de l'instauration d'un crédit d'impôt sur les achats de carburant d'aviation durable, qui devait représenter une ristourne fiscale d'environ 50 millions d'euros en 2025, essentiellement pour le groupe Air France. La mesure n'entrera pas en vigueur au 1er janvier. Pas plus que la suppression annoncée de la taxe Tiruert, qui renchérit le prix des carburants d'aviation durables en France. Et rien ne garantit, là encore, que ces dispositions, issues d'amendements, seront reprises dans une loi de finances rectificative.
Rwanda : six mois après la réélection de Paul Kagame, les défis ne manquent pas
Au mémorial de Kigali, les touristes défilent, visages sombres. Nombreux sont ceux qui découvrent la violence du génocide rwandais : 1 million de morts en 3 mois entre avril et juillet 1994. Et une barbarie indescriptible : un taux d'exécution quatre fois supérieur à celui enregistré au plus fort de l'Holocauste. Partout au Rwanda, le génocide reste tapi dans les cœurs, enfoui dans les esprits. LA NEWSLETTER AFRIQUE Tous les mardis à 16h45 Recevez le meilleur de l’actualité africaine. En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisations et notre politique de confidentialité. Le Rwanda n'oublie pas : Les cérémonies d'avril dernier, qui ont eu une résonance internationale, sont là pour en témoigner. Et les 100 jours dédiés aux commémorations, chaque année, aux quatre coins du pays, soulignent à quel point ce pays se souvient. Mais le Rwanda avance. Et continue à renaître de ses cendres. À ne pas se laisser engloutir par son passé. Quel pays peut se targuer d'être reparti de zéro et de s'être reconstruit aussi vite ? Difficile de trouver pareil cas d'école. À lire aussi Rwanda : « Il n'y a pas que des collines ! » Le Rwanda est un petit pays de l'Afrique des grands lacs. Une tache verte au milieu du continent africain, coincé entre l'Ouganda, la Tanzanie, la RDC et le Burundi… connu pour ses gorilles. Un petit pays qui s'est relevé sur le terrain fécond de la résilience, et a articulé son action autour de 3 piliers : sa réussite économique, son image – séduisante qui attire des touristes du monde entier – et une ouverture d'esprit qui le projette dans le futur. La réussite économique est incontestable. Le Rwanda a, ces dernières années, navigué entre des taux de croissance de son PIB de 7 à 8 % , atteignant même 10,9 % en 2021, le Rwanda a même vu son PIB par habitant presque quadrupler depuis 1995 ! Ses atouts ? l'agriculture, d'abord. Un emploi sur deux y est encore lié, le thé et le café sont des fers de lance des exportations. Le Rwanda a aussi su créer un environnement attractif pour les investissements internationaux. Et est à la pointe en matière de numérique, d'investissements étrangers, d'incubation de start-up… Le Rwanda a su s'appuyer sur le volontarisme d'une population entière qui a cru et voulu ce miracle économique et s'en est donné les moyens. Dans ce contexte, la capitale, Kigali, est devenue la vitrine de cette renaissance économique. Elle attire l'œil pour sa sécurité sans faille, son bitume impeccable, ses jardins coquets et soignés et son intransigeance en matière de développement durable : depuis 2004, le pays a pris un parti drastique : celui d'interdire toute production et toute importation de sacs en plastique. À lire aussi Rwanda : « La région du lac Kivu est comme un diamant brut » Un petit pays qui joue dans la cour des grands en matière de tourisme Autre atout : le tourisme. Ce petit pays joue désormais dans la cour des grands dans ce domaine, avec une offre hôtelière qui rivalise avec les lodges les plus huppés du Botswana ou de Zambie, réputés pour être les plus chers du monde. Comment ce pays inconnu attire-t-il une clientèle fortunée sur une terre de massacres ? Voilà un cas d'école qui pourrait être étudié dans les plus grandes écoles de commerce. « Visit Rwanda », la campagne de publicité vantant le pays s'est invitée ces dernières années dans tous les magazines et jusque sur les maillots de foot des clubs les plus prestigieux. La compagnie aérienne, RwandAir, affiche une des stratégies les plus ambitieuses du continent africain à l'image de son slogan « Voler le rêve de l'Afrique ». Enfin, le Rwanda a su habilement protéger et faire rayonner son joyau : ses gorilles des montages. Le pays est un des trois au monde avec l'Ouganda et la RDC où l'on peut encore apercevoir un des 1 200 gorilles des montagnes du monde. « Le nom du Rwanda éveille une curiosité, c'est certain. Le génocide a su, d'une certaine manière, faire connaitre le pays. Ensuite, nous avons capitalisé sur notre rebond via un marketing intelligent et très efficace. D'un pays qui a su repartir de zéro, le Rwanda est aujourd'hui propre, sûr, en constant développement avec des atouts incontestables comme les gorilles des montagnes », confirme Marcel Walter, le fondateur de l'agence de voyages locale Mapendano. À lire aussi Vincent Duclert : « Le génocide au Rwanda est le grand scandale de la Ve République » Le petit pays aux mille collines attire donc les touristes premium à fort pouvoir d'achat, ceux qui cherchent à s'affranchir du tourisme de masse. En majorité Anglo-saxons, ils viennent séjourner incognito dans des hôtels à 7 000 dollars la nuit dans la forêt tropicale de Nyungwe ou dans le parc des Volcans, proche de l'Ouganda, et traquent les gorilles des montagnes pour la modique somme de 1 500 dollars l'heure. Ils peuvent aussi faire du golf en plein Kigali, un parcours 18 trous, dessiné par le joueur sud-africain Gary Player a été ouvert en plein centre de la capitale il y a 3 ans. Mais si tous les regards sont braqués sur le Rwanda, c'est aussi pour sa trajectoire futuriste qui promeut l'émancipation de la femme rwandaise et l'intègre au pouvoir décisionnel. À lire aussi Au Rwanda, les femmes prennent le pouvoir Le Rwanda est le seul pays du monde où les femmes soient majoritaires au Parlement. Depuis l'élection de Paul Kagame, elles détiennent toujours une large part des portefeuilles ministériels, proche de 40 %. le pays est un modèle en matière d'égalité entre les sexes en Afrique. Les femmes tiennent les rênes de la société qu'elles soient chefs d'entreprise, juges, magistrates, ministres ou députées… c'est une innovation magistrale en matière de développement, dans une Afrique où les femmes sont très souvent invisibles des lieux de décision politique. À découvrir Le Kangourou du jour Répondre Dès 2003, la Constitution rwandaise avait instauré un quota de 30 % de femmes dans toutes les instances étatiques de prise de décision. Depuis, ce seuil a été systématiquement dépassé. Ainsi, c'est tout le pays qui en a profité, porté par d'ambitieuses politiques sociales, notamment en matière de sécurité sociale ou d'éducation. Le Rwanda ne crie pas victoire, et garde cette humilité chevillée au corps. Il reste, c'est vrai, tant à faire pour ce pays : L'enjeu désormais est que les inégalités soient réduites, que l'essor du pays profite à toutes les classes sociales, que Kigali ne soit pas la vitrine tech du pays. Enfin, que le pays limite sa dépendance à l'aide internationale puisque 45 % des revenus de l'État en dépend encore.
Éthiopie : l’« abiymania » ne fait plus rêver Paris
La tension était palpable, le 29 novembre, au siège de l'Union africaine (UA). Devant la presse, le ministre des Affaires étrangères français, Jean-Noël Barrot, s'est contenté de se féliciter, aux côtés du président de la Commission de l'UA Moussa Faki, de la reprise du dialogue stratégique avec l'instance panafricaine. La dernière session datait de 2019. LA NEWSLETTER AFRIQUE Tous les mardis à 16h45 Recevez le meilleur de l’actualité africaine. En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisations et notre politique de confidentialité. La veille au soir, un communiqué du ministère des Affaires étrangères tchadien a pris le ministre par surprise, quelques heures après son départ de N'Djamena. Le Tchad met un terme à sa coopération militaire avec la France. Les quelque 300 militaires tricolores présents sur son sol sont donc priés de quitter le territoire. Il a fallu près de 24 heures au Quai d'Orsay pour publier une déclaration de réaction par laquelle il « prend acte et entend poursuivre le dialogue pour la mise en œuvre de ces orientations ». À lire aussi Au Tchad comme au Sénégal, l'armée française n'est plus la bienvenue Sept millions d'euros supplémentaires pour le Soudan À la une des médias, ce retournement de situation, dans le dernier pays sahélien à abriter des forces françaises, a éclipsé le motif principal de la visite de Jean-Noël Barrot au Tchad. Il s'est rendu à Adré, dans un des plus vastes camps d'accueil des quelque 3 millions de Soudanais réfugiés à l'étranger pour fuir la guerre amorcée le 15 avril 2023. « C'est au Soudan qu'a lieu la crise humanitaire la plus grave de notre époque », insiste le ministre sur son compte X. À la frontière soudanaise, il a annoncé 7 millions d'euros supplémentaires « pour soutenir l'action des organisations onusiennes et non gouvernementales dans la lutte contre le choléra et dans l'accompagnement des femmes et enfants en bas âge ». Le chef de la diplomatie française a en outre exhorté les puissances étrangères impliquées dans le conflit opposant les Forces armées soudanaises aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) à « cesser de jeter de l'huile sur le feu ». Il s'est en revanche bien gardé de nommer les Émirats arabes unis, qui livrent, avec le consentement du gouvernement tchadien, des armes aux FSR via l'aéroport international du maréchal Idriss Déby à Amdjaras, à 300 km au nord d'Adré. Ce soutien est bien connu de la communauté diplomatique et a récemment été documenté par le Sudan Observatory Conflict. Mais Jean-Noël Barrot s'est contenté de dénoncer le veto imposé le 18 novembre par la Russie concernant une résolution de l'ONU appelant à un cessez-le-feu et à la protection des civils au pays des deux Nils. À lire aussi L'Égypte et le Soudan s'opposent à un nouvel accord sur le Nil Une quête « légitime » d'accès à la mer À Addis-Abeba, Jean-Noël Barrot a rencontré son homologue, Gedion Timotheos, ainsi que le Premier ministre Abiy Ahmed. Ce dernier a obtenu le prix Nobel de la paix en 2019 pour ses efforts de réconciliation avec l'Érythrée, avant de plonger sa nation dans une guerre civile dans la région septentrionale du Tigré qui a tué au moins 500 000 militaires et 360 000 civils. Malgré la fin de ce conflit en novembre 2022, le pays reste ravagé par les combats dans la région voisine de l'Amhara et dans plusieurs zones de la vaste Oromia. À lire aussi Éthiopie : l'abiymania ne fait plus rêver Une source diplomatique affirme que la question des violations des droits de l'homme a été abordée et que le ministre a « encouragé les autorités [éthiopiennes] à faire des progrès sur ce dossier ». Après les nombreuses exactions perpétrées au Tigré qui restent à ce jour impunies, l'armée fédérale utilise en effet des drones pour tenter de contrer les rebelles Fano en Amhara, sans épargner les civils. Dans le même temps, la liberté d'expression frôle le néant comme le démontrent l'assassinat de l'opposant oromo Bate Urgessa en avril, la détention d'au moins quatre journalistes d'après Reporters sans frontières ou encore la suspension, entre le 14 et le 21 novembre, de trois organisations défendant les droits humains. Abiy Ahmed entretient par ailleurs des relations exécrables avec ses voisins régionaux, à commencer par la Somalie depuis la signature, le 1er janvier, d'un accord de principe avec la république autoproclamée du Somaliland qui fournirait à Addis-Abeba un port commercial et une base militaire sur la mer Rouge. « Il est légitime que l'Éthiopie, le pays enclavé le plus peuplé, recherche un accès à la mer », a déclaré une source diplomatique française en marge de la visite du ministre. Avant de préciser que « ces discussions ne doivent pas engendrer des tensions dans la Corne, au moment où les pays de la Corne de l'Afrique sont confrontés à des défis importants » incluant le terrorisme. À lire aussi France-Éthiopie : ce que contient l'accord de défense signé par Macron et Ahmed Nouveau projet patrimonial et remise de 3 500 artefacts À découvrir Le Kangourou du jour Répondre Ce traité suscite pourtant l'inquiétude de la communauté internationale tandis que la Somalie dénonce une violation de sa souveraineté nationale. C'est cependant la collaboration scientifique, culturelle et éducative qui était au centre du déplacement du chef de la diplomatie française – outre la session de vendredi consacrée au dialogue stratégique avec l'UA. Samedi 30 novembre, dans l'enceinte du musée national d'Éthiopie, le fossile de Lucy, qui a été découvert il y a 50 ans, a été exceptionnellement présenté au ministre, alors que les visiteurs doivent habituellement se contenter d'une réplique. Jean-Noël Barrot a annoncé le lancement du projet « Patrimoine durable en Éthiopie » dans la continuité de la participation de la France à la restauration des églises monolithiques de Lalibela et du musée du Palais national. Et ce, afin de « continuer à mobiliser des méthodes qui placent les communautés locales, les autorités politiques et religieuses et les recherches scientifiques au cœur de l'action en faveur du patrimoine », a expliqué le ministre. Cette visite a également été l'occasion de remettre 3 500 objets archéologiques éthiopiens qui étaient étudiés en France depuis les années 1980. À lire aussi En Afrique de l'Est, Emmanuel Macron veut poser les jalons d'une nouvelle coopération Avant de s'envoler vers Dakar, Jean-Noël Barrot s'est rendu au lycée franco-éthiopien Guébré-Mariam pour signer un accord intergouvernemental avec le ministre de l'Éducation éthiopien, Birhanu Nega, prévoyant notamment le financement de la scolarité de 10 % d'élèves issus de milieux modestes. Au Sénégal, le ministre a assisté aux célébrations du 80e anniversaire du massacre de Thiaroye, qui vient d'être reconnu comme tel par le président Emmanuel Macron. Jeudi 28 novembre, peu avant l'annonce surprise du Tchad, le président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, a exprimé, lui aussi, son souhait de tourner la page de la coopération militaire avec l'Hexagone.
Le projet d’euro numérique de la BCE entre dans le vif du sujet
Le projet titanesque de l'euro numérique avance pas à pas. Dans un rapport rendu public ce lundi, la Banque centrale européenne (BCE) fait un point sur l'avancée des travaux concernant son projet de monnaie numérique de banque centrale. Etablissement d'un règlement, sélection des potentiels fournisseurs de la plateforme et de l'infrastructure technique, et consultation des parties prenantes ont ainsi mobilisé les équipes ces six derniers mois. Pour rappel, en octobre 2023, après une phase d'investigation de deux ans, la BCE avait décidé de lancer la phase de préparation du projet qui doit durer jusqu'en octobre 2025. C'est à ce moment-là, quand la proposition de règlement soumise par la Commission européenne en juin 2023 aura terminé son parcours législatif, que le Conseil des gouverneurs décidera ou non de lancer l'euro numérique. Il ne devrait ensuite devenir réalité qu'à partir de 2028. « Ce rapport relate les progrès techniques qui ont eu lieu », explique Alexandre Stervinou, directeur des Etudes et de la Surveillance des paiements et responsable du projet d'euro numérique à la Banque de France. Des appels d'offres ont ainsi été passés pour établir les différents composants techniques de l'euro numérique, auxquels ont répondu en septembre et octobre les acteurs de marché, principalement européens, et les banques centrales nationales. Des offres qui sont à présent à l'étude au siège de la BCE à Francfort. « C'est un point très important dans cette phase de préparation car si nous décidons d'émettre cet euro numérique, il faut que nous ayons la capacité technique de passer à l'action », ajoute-t-il. Limite de détention « La mise en place du rulebook [recueil de règles, ndlr] avance également pour étudier comment pourrait en pratique fonctionner un euro numérique avec les consommateurs, les commerçants et les banques », explique Alexandre Stervinou. LIRE AUSSI : Les trois défis que devra relever Wero, la solution de paiement des banques européennes La Banque de France à la pointe des expériences de monnaie numérique pour les transactions financières Des discussions ont notamment eu lieu avec tous les intéressés sur un élément stratégique pour les banques : la manière d'évaluer la limite de détention appropriée pour l'euro numérique. En effet, les établissements de crédit sont très inquiets de voir leurs dépôts en monnaie commerciale, sur lesquels ils s'appuient pour accorder des crédits, siphonnés par l'euro numérique. Les banques ont ainsi mis en avant que la limite de détention devrait correspondre aux dépenses en cash mensuelles des consommateurs, ce qui plaiderait pour un montant assez bas. A l'inverse, les représentants du secteur de la consommation ont souligné que, si la limite de détention était trop basse, elle pourrait décourager les consommateurs de s'en servir. Ils ont par ailleurs ajouté que si les banques craignaient une fuite des dépôts, elles pourraient s'en prémunir en offrant des taux d'intérêt attractifs. Préoccupations des banques Alors que les banques françaises étaient très remontées contre le projet d'euro numérique, il semble que leurs préoccupations aient été entendues. « Les impacts possibles sur les dépôts sont des questions légitimes, explique Alexandre Stervinou ». LIRE AUSSI : Euro numérique : des effets potentiellement lourds pour La Banque Postale Pour la BCE, il était important également de voir comment cet euro numérique pourrait s'intégrer dans un paysage de moyens de paiement européen déjà riche avec la carte bancaire, les portefeuilles électroniques comme Apple Pay ou maintenant wero. C'était un autre motif de grogne des banques, qui voient l'euro numérique comme un concurrent direct de Wero qui vient d'être lancé en France, en Belgique et en Allemagne et est financé par les établissements bancaires. « Intégré à wero, l'euro numérique pourrait être un facilitateur de son adoption », plaide au contraire Alexandre Stervinou. Le rapport souligne également que les frais que devraient payer les commerçants pour accepter l'euro numérique seraient « justes », compte tenu du fait qu'ils ne pourraient pas le refuser. Un argument important au moment où les grands commerçants français et européens s'inquiètent de l'envolée des frais de paiement par carte. « Nous avançons également sur le modèle économique possible de l'euro numérique, qui est calqué sur le modèle économique du paiement par carte bancaire, en étudiant les pistes pour en faire un modèle attractif pour les banques et commerçants. », ajoute Alexandre Stervinou. Reste aussi à résoudre la question du respect de la vie privée. « Nous allons dans le sens d'un respect de la vie privée très important », explique ainsi Alexandre Stervinou. En effet, l'euro numérique devra pouvoir apporter les mêmes avantages que le cash en ce domaine. Une des options pourrait également être donnée au consommateur de rendre automatiquement tous les petits paiements de proximité possibles hors ligne, pour en faciliter l'usage.