Une plante qui en vaut trente pour purifier l’air des molécules toxiques
Elle a l'air innocent d'une plante verte, mais son nom commercial la trahit : Neo Px est une plante biotechnologique capable de purifier l'air intérieur, la première d'une potentielle longue lignée de végétaux aux super pouvoirs. "C'est l'équivalent de 30 plantes d'intérieur ordinaires", assure Lionel Mora, cofondateur de la start-up Neoplants, depuis une serre de Lodi, à deux heures de San Francisco. "Elle capture, élimine et recycle certains des polluants les plus nocifs que l'on peut trouver chez soi". Plusieurs milliers de pothos Il y a plus de 5 ans, cet entrepreneur français a rencontré Patrick Torbey, docteur en édition du génome, qui rêvait de créer des organismes vivants "avec des fonctions". "Il y avait des plantes autour de nous, et on s'est dit que la fonction la plus puissante qu'on pourrait leur ajouter, c'est de purifier l'air", raconte Lionel Mora. Plusieurs milliers de pothos, des plantes vertes mouchetées de blanc, hautes d'une vingtaine de centimètres, attendent d'être placées dans leur pot ad hoc, puis emballées et expédiées. "On fait le maximum pour envoyer le plus de plantes possibles toutes les semaines, mais ce n'est pas assez pour répondre à la demande pour l'instant", commente le patron. La start-up implantée près de Paris a commencé fin avril à commercialiser son premier produit aux Etats-Unis, où elle a obtenu l'agrément des autorités. Un premier marché particulièrement propice puisque de nombreux Américains ont déjà des purificateurs d'air. En outre, "ils sont sensibles au problème des feux de forêt. Or la combustion émet du benzène, et c'est l'un des composés organiques volatiles (COV) que nous ciblons", note Lionel Mora. Des plants de pothos dans une serre de la startup Neoplants à Lodi, le 1er mai 2024 en Californie. Crédit : AFP - Andri Tambunan Molécules toxiques Même sans vivre en Californie ou dans une ville à la circulation automobile dense, l'air intérieur peut être deux à cinq fois plus pollué que l'air extérieur, selon l'agence américaine de protection de l'environnement, essentiellement à cause des COV. Et ouvrir les fenêtres ne suffit pas. Car ces molécules sont émises en continu par de nombreux solvants, colles et peintures, et donc par les produits d'entretien, meubles et murs des maisons et bureaux où les humains passent la grande majorité de leur temps. "Ces substances présentent de nombreux risques pour la santé, dont le cancer", notamment pour les plus jeunes, les plus âgés et les personnes déjà fragilisées, souligne Tracey Woodruff, professeure en sciences reproductives à l'université UCSF, et spécialiste des polluants chimiques. "Elles peuvent irriter les voies respiratoires, affecter le développement du foetus, entraîner des fausses couches, et sont aussi associées à des déclins cognitifs et neurologiques, comme la maladie de Parkinson", énumère-t-elle. Neo Px n'absorbe pas elle-même les COV. Elle est vendue - minimum 120 dollars - avec des sachets de poudre, suffisamment pour six mois, qui contiennent un microbiome, essentiellement une souche bactérienne. Cette bactérie colonise les racines de la plante, son terreau et ses feuilles, explique Patrick Torbey, le directeur technologique, dans le laboratoire de l'entreprise à Saint-Ouen, en banlieue de Paris. C'est elle qui "absorbe les COV, pour grandir et se reproduire. La plante est là pour créer cet écosystème pour la bactérie. Donc on a un système de symbiose entre plantes et bactéries", détaille-t-il. Plantes génétiquement modifiées Par la suite, Neoplants compte produire des plantes génétiquement modifiées, dont le métabolisme ferait directement le recyclage. Et à plus long terme, elle espère s'attaquer à des problèmes liés au réchauffement climatique. "On pourrait augmenter la capacité des arbres à capter le CO2", lance l'ingénieur. Ou encore "développer des semences qui résistent mieux à la sécheresse", propose de son côté Lionel Mora. Cette vision, couplée avec l'expertise scientifique de l'équipe, a incité Vincent Nallatamby, directeur produit chez Google, à investir dans la start-up dès ses débuts. Il possède désormais son propre pothos dopé au microbiome, qui passe inaperçu dans son salon de San Francisco déjà bien garni en plantes d'intérieur de toutes tailles. "C'est plutôt ma femme qui en prend soin, sauf celle-ci. Celle-ci, c'est moi !", plaisante-t-il en montrant le pot de la Neo Px, dont le réservoir permet à la plante de réguler elle-même ses besoins en eau. "Je suis souvent séduit par des objets technologiques que j'ai envie d'avoir à la maison", relate-t-il. "C'est une des premières fois où je n'ai eu aucun mal à convaincre mon épouse."
Le khat, qu’est-ce c’est ?
Connaissez-vous le khat, un arbuste endémique de la Corne de l’Afrique et du Yémen ? La mastication des feuilles produit des effets euphorisants et stimulants qui rappellent ceux des amphétamines, mais à un degré bien moindre que l’un de ses alcaloïdes plus connu, la cathinone. Un Yéménite mâchant du khat. Sanaa, Yémen, janvier 2010. © AHMAD GHARABLI / AFP Les feuilles et les tiges les plus tendres de cet arbuste sont mâchées par des millions de personnes dans la Corne de l’Afrique et dans le sud de la péninsule arabique pour leurs propriétés euphorisantes, et le sentiment de bien-être qu’elles provoquent. Mais détrompez-vous, le khat, ou de son nom taxonomique Catha edulis, n’est pas si exotique que cela. Des diasporas éparpillées dans le monde entier en consomment de manière licite ou illicite, tout dépend de la réglementation du pays d’accueil. Les bouquets de feuilles voyagent en Europe, en Amérique du Nord, et jusqu'en Chine : le khat est devenu global ! Le khat ou qat, qu’est-ce que c’est ? Des tiges de khat fraîchement cueillies dans la main d'un fermier kenyan du comté de Meru, province centrale du Kenya en mai 2022. Le khat est également connu sous le nom de miraa au Kenya - © Simon MAINA / AFP Le khat prend plusieurs noms, jusqu’à 80 dénominations courantes selon les traditions culturelles. Khat - ou qat - est un mot arabe qui signifie arbuste. L’espèce appartient à la famille des celastracées et pousse de préférence en altitude. Le mode de consommation le plus courant est la mastication des feuilles et des tiges issues des rameaux les plus jeunes de l’arbre. Les effets actifs de la plante se dissipant très vite après la récolte, les feuilles fraîches sont acheminées au plus vite des lieux de culture vers les points de vente. Plus rarement, les feuilles peuvent être consommées en infusion, fumées avec du tabac ou encore sous la forme de brisures, vendues sous l’étiquette "henné" ou "thé" pour être ensuite réhydratées au Coca-Cola. Il procure une sensation d’euphorie, supprime fatigue et sensation de faim. Un arbuste endémique de la Corne de l’Afrique Le khat est cultivé dans l’Est africain (Ethiopie, Somalie, Djibouti, Erythrée) et le sud-ouest de la péninsule arabique. Le mode de culture varie selon la géologie et le climat des régions, en montagne, entre 1700 et 2000 mètres d’altitude, à l’état d’arbuste en Ethiopie ou d’arbre au centre du Kenya. Il peut être associé à d’autres cultures, vivrières ou de rente, telles que le café qu’il supplante même quelquefois en tant que produit d’exportation plus lucratif. Un fermier yéménite récoltant du Khat, à la périphérie de Sanaa, avril 2016- © MOHAMMED HUWAIS / AFP Des vendeurs de khat emballent des pousses pour le transport sur un marché en plein air dans le comté de Meru, en septembre 2016.© TONY KARUMBA / AFP La popularité dont le khat jouit auprès des populations de la Corne de l’Afrique et du Yémen reste peu connue en Occident. Sous nos latitudes, nous connaissons mieux une autre plante aux vertus stimulantes originaire de la même région… le café ! Bien après les descriptions de chroniques royales éthiopiennes et les écrits arabes du Moyen Âge, le premier Européen à décrire la plante et à la goûter est un naturaliste suédois, Pehr Forsskål. Il est l’un des membres d’une expédition danoise, lancée en 1761 qui s’est terminée par la fin tragique de la presque totalité de ses membres y compris Forsskål. Les observations botaniques de ce dernier consignent des détails précis sur les usages et les effets de Catha edulis, qu’il a goûté. L’expérimentation ne l’enthousiasme que très peu, le végétal étant amer, sans attrait gustatif pour celui qui n'est pas habitué. D’une culture de niche à une culture de rente La consommation du khat est restée longtemps confinée à sa zone de culture. Car 24 à 72 heures après sa cueillette, les substances actives de la plante se dissipent. Avant l’arrivée de transports modernes, la circulation de la plante était plutôt limitée à sa zone de production. Plus près de nous, l’anthropologue française Céline Lesourd, travaillant dans l’est éthiopien, raconte dans ses publications les trajets effectués en train par les « contrebandières » éthiopiennes du khat vers Djibouti. Elle constate que les circulations du khat dans la région sont le fait des femmes, alors que la culture de l’arbuste est celui des hommes. Cette culture de niche s’est étendue au Kenya, en Ouganda, en Tanzanie, au Congo, au Zimbabwe, en Zambie, en Afrique du Sud, à Madagascar et aussi loin qu’en Afghanistan pour devenir une culture de rente. Et sa circulation a suivi les routes des diasporas contemporaines des communautés de la Corne d’Afrique et du Yémen. "La consommation et le commerce des feuilles demeurent dans un réseau d’initiés. Des Éthiopiens, Somaliens, Kenyans et Yéménites, du Danemark au Minnesota comme dans le quartier londonien de Camden, mâchent pour adoucir l’exil", explique Céline Lesourd, pour le site The Conversation. L'Agence européenne des drogues (EUDA) estime qu’il y aurait 20 millions de consommateurs dans le monde, à mettre en perspective avec la consommation mondiale de tabac s’élevant à 1,3 milliard de fumeurs (chiffres de 2020). Elle constatait dès 2011 que cette consommation était restreinte aux cercles des immigrés de première génération en Europe. L’usage du khat reste la plupart du temps une consommation de convivialité dans ces cercles émigrés loin de leurs régions d'origine, et de plus, une consommation genrée : mâcher du khat se fait traditionnellement entre hommes. LIRE AUSSILe qat, la plante qui assoiffe le Yémen Le khat n’est pas sur la liste des stupéfiants interdits de l’ONU Alors que deux des alcaloïdes les plus actifs de la plante, la cathinone et la cathine figurent sur la liste de la Convention de 1971 sur les substances psychotropes, l’arbuste, lui, n’est visé par aucun texte international. Son usage est interdit en France depuis 1957, époque où celle-ci détenait encore des colonies sur les rives de la mer Rouge. D’autres pays européens comme la Grande-Bretagne ou les Pays-Bas ont interdit le khat dans les années 2010. L’interdiction de la consommation et de l’importation du khat concerne la Belgique, le Danemark, l’Allemagne, la Grèce, la France, l’Irlande, l’Italie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Slovénie, la Finlande, la Suède, la Norvège, la Suisse et l’Amérique du Nord. Depuis 2024, un débat s’est amorcé au Kenya, pays où culture, consommation et exportation sont jusqu’ici admises par les autorités nationales car elles génèrent des revenus conséquents au secteur agricole. Certaines provinces kenyanes veulent interdire la consommation pour lutter contre les dommages sanitaires et sociaux, en particulier chez les plus jeunes. LIRE AUSSIDu chemsex aux drogues festives : addiction et dangers des cathinones de synthèse Quels sont les effets recherchés du khat ? Le khat procure une sensation de bien-être, d’euphorie, d’exaltation, d'amélioration de l'estime de soi, de lucidité, de la concentration et de la vigilance sans aucun effet hallucinatoire. C’est un coupe-faim et un stimulant anti-fatigue : conducteurs de poids-lourds et étudiants disent en prendre pour empêcher l’endormissement. La cathinone présente dans les feuilles induit des effets plus légers que l'amphétamine conditionnée pure sous forme de comprimé ou en poudre. Et comme l’amphétamine, cet alcaloïde incite au contact avec les autres, il est dit entactogène. Les sensations se manifestent graduellement lors de la mastication, mais sont de courte durée : "100 à 300 g de feuilles de khat permettent une mastication de trois à six heures. La quantité de cathinone peut varier de 30 à 200 mg par 100 g de feuilles fraîches ; la mastication permet d’en extraire 90 %, ce qui correspond à une dose faible à moyenne d’amphétamine, mais le mode d’ingestion lent et laborieux limite le cumul des doses et réduit les possibilités de forte concentration dans le plasma". Quels effets secondaires pour le khat ? Système cardiovasculaire : risque accru d'hypertension et d'accidents cardiovasculaires. Et de complications cardiovasculaires chez les patients atteintes d’un syndrome coronarien aigu. Fonctions neurocomportementales : les recherches s’intéressant spécifiquement aux effets de la plante restent rares selon les constats des auteurs (3 seulement en 2021, à la parution de cette revue systématique) d’une synthèse des études existantes dans la revue scientifique PLOS. Pourtant, en s’appuyant les modèles pharmacologiques plus étudiés de la cathinone et des amphétamines, ils concluent qu’une consommation à long terme produit "des déficits significatifs" dans plusieurs domaines cognitifs : apprentissage, la vitesse et coordination motrice, fonctions d'inhibition de la réponse, flexibilité cognitive, mémoire à court terme, mémoire de travail et résolution des conflits. Santé buccale : une consommation régulière et un usage à long terme amène des caries, des lésions de la muqueuse, des saignements gingivaux, une perte de dents. Santé mentale : les mâcheurs de khat sont-ils plus susceptibles d’être déprimés ou anxieux ? Rien n’est prouvé quant à la relation entre cette consommation et des problèmes de santé mentale. Les études disponibles font état de résultats contradictoires. Polyconsommation de psychotropes. Pour contrebalancer les effets stimulants du khat qui provoquent de l’hypertension, certains calment leur cœur battant la chamade avec de l'alcool fort ou du cannabis afin de trouver le sommeil. Cette consommation croisée débouche donc quelquefois sur d’autres plus addictives. Des effets à long terme sur le plan sanitaire : perte d'appétit, anorexie, jusqu’à la dénutrition, perte de sommeil.
Fnac Darty lance le passeport digital sur ses produits électroménager
Fnac Darty annonce qu’il lance le premier passeport digital dédié au suivi des produits électroménager. Cette identité numérique est destinée à allonger la durée de vie des produits. Ce dispositif est conçu avec la société ecosystem et avec la technologie de blockchain d’Arianee. un prestataire de services de technologie qui était parti au départ sur […]
L’Oréal Paris anime une opération publicitaire exceptionnelle liée à la série Cat’s eyes de TF1
L’Oréal n’est pas un leader du marketing pour rien. L’Oréal Paris lance une opération publicitaire clé à l’occasion de la diffusion de la série Cat’s eyes sur TF1 et dont il est le maquilleur officiel. C’est un dispositif de marque exceptionnel. Trois soeurs se lancent dans des cambriolages La série Cat’s eyes est inspirée d’un […]
Les émissions de CO2 ont coûté près de 100 milliards d’euros à l’économie française en 2023
C'est une petite révolution dans l'élaboration des comptes nationaux réalisée par l'Insee. Pour preuve, le directeur général Jean-Luc Tavernier est venu en personne, ce mardi, présenter les résultats de ce que l'Insee appelle « les premiers comptes nationaux augmentés ». Une façon de « repousser les frontières de la comptabilité nationale », a-t-il indiqué. En clair, il ne s'agit pas de renoncer aux indicateurs traditionnels comme le produit intérieur brut (PIB), mais de leur adjoindre d'autres variables liés notamment à la soutenabilité environnementale. A cet effet, l'Insee publie une mesure rénovée de l'empreinte carbone de la France. Il s'agit d'intégrer aux émissions dites « résidentes » (donc provenant de la production nationale et de l'activité des ménages sur le territoire) les émissions importées résultant des biens fabriqués à l'étranger et consommés en France. La différence n'a rien d'anodine puisqu'elle augmente nos émissions de 240 millions de tonnes de carbone. L'empreinte carbone globale de la France s'élevait ainsi à 644 millions de tonnes équivalent CO2 en 2023 soit 9,4 millions de tonnes en moyenne pour chaque Français. Pour 50 euros dépensés, on émet en moyenne 10 kg de CO2. Nicolas Carnot Directeur des études et synthèses économiques à l'Insee Les importations se décarbonent Si les émissions importées sont supérieures aux émissions résidentes - elles représentent 56 % de nos émissions globales - on peut toutefois se satisfaire de voir leur courbe baisser depuis une quinzaine d'années pour suivre une évolution similaire aux émissions résidentes. Signe, non pas que la consommation des Français en biens et services importés a baissé, mais que la composition carbone de ces biens et services s'est améliorée, donc que la production de nos partenaires commerciaux à l'international se décarbone, à l'image de celle de la France. La majorité de nos émissions importées provient de l'Union européenne suivie par la Chine. « Bien que 5 fois plus intenses en gaz à effet de serre par euro que la production domestique, les importations se décarbonent au même rythme que le PIB », notent les experts de l'Insee. La composition carbone des biens et services importés par la France s'est améliorée ce qui explique la baisse des émissions totales de CO2.Les Echos L'Insee s'est par ailleurs appliquée à valoriser les coûts implicites des émissions de gaz à effet de serre, à savoir le coût des dommages induits par le réchauffement climatique (inondations, sécheresses…) et les coûts de décarbonation. « Du fait des émissions induites par les activités économiques, la création nette de valeur (le produit intérieur net) est plus faible qu'ordinairement mesuré », indique la note de l'Insee. Ce produit intérieur net ajusté (Pina) est inférieur de 4,3 % en 2023 au produit intérieur net usuel. C'est-à-dire une perte de près de 100 milliards d'euros (94 milliards précisément) par rapport à ce que la France aurait pu créer l'an dernier comme richesse si elle n'avait pas eu à faire face aux coûts du dérèglement climatique et de la décarbonation. Un prix du carbone difficile à évaluer Cette comptabilité nationale carbone, si on peut la baptiser ainsi, comporte tout de même une bonne nouvelle : grâce aux efforts déployés pour limiter nos émissions elles ont baissé de 5,6 % par rapport à 2022 - la France a économisé 21 milliards d'euros en 2023. Une somme qui correspond aux dommages évités l'an dernier grâce à la baisse des émissions. Un gain qui ne sera pas de trop pour financer le coût de la décarbonation évalué à 929 milliards d'euros d'ici à 2050 par les équipes de l'Insee. LIRE AUSSI : DECRYPTAGE - Le réchauffement climatique freinera la croissance nettement plus que prévu DECRYPTAGE - Le réchauffement climatique pèse aussi sur la dette publique Des chiffres à prendre avec prudence car ils dépendent d' un prix du carbone encore délicat à évaluer. L'Insee a choisi de retenir la valeur d'action pour le climat (VAC), établie par la commission Quinet, dont le dernier rapport date de 2019 et qui fixait la valeur de la tonne de carbone à 250 euros en 2030. Cette commission doit réactualiser prochainement ces prévisions. « Le PIB reste incontournable, mais il faut le compléter par d'autres variables qui sont difficiles à monétiser, reconnaît Jean-Luc Tavernier, sans compter qu'il n'y a pas que le réchauffement climatique, mais aussi la biodiversité, l'eau ou encore la qualité de l'air dont il faudrait tenir compte, qui sont encore plus compliqués à évaluer. »
Comment la France compte réduire ses émissions de CO2 de 50 % d’ici à 2030
« On a tous en tête le drame de Valence ! Il est plus qu'urgent d'accélérer la baisse de nos émissions de gaz à effet de serre. » En présentant la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) et la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), enfin publiées ce lundi, la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher a rappelé l'enjeu crucial d'établir de telles trajectoires : faute d'action vigoureuse, les événements météo extrêmes, comme ceux qui ont touché la ville espagnole la semaine dernière, vont continuer à se multiplier et à s'intensifier. La France travaille sur ces documents de planification écologique, dont la publication fait l'objet d'une obligation légale, depuis la fin de 2022, sous l'égide du Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), une petite équipe dirigée par Antoine Pellion et placée sous l'autorité du Premier ministre. Dette écologique Il s'agit d'expliquer comment la France compte tenir ses objectifs de décarbonation à 2030 (-50 % des émissions brutes et -55 % des émissions nettes, tenant compte des puits de carbone), conformément aux engagements internationaux pris par l'Union européenne. Parallèlement, la PPE vise à inscrire dans le marbre le mix énergétique du pays pour les dix ans à venir, en matière d'électricité mais pas seulement : les carburants ou la chaleur sont aussi concernés. L'objectif est de passer de 40 % à 60 % d'énergie décarbonée d'ici à 2030. Rappelant la « dette écologique » de la France, le Premier ministre Michel Barnier avait promis lors de sa déclaration de politique générale que ces documents de planification, très attendus depuis de nombreux mois, seraient publiés de façon imminente. C'est donc désormais chose faite. Le plan sur la façon dont la France compte s'adapter au réchauffement climatique a, lui, été publié le 25 octobre. LIRE AUSSI : La France mise essentiellement sur les transports, les bâtiments et l'industrie pour se décarboner d'ici à 2030 Le gouvernement joue la continuité dans la planification de la production d'énergie S'ils définissent des trajectoires indispensables aux professionnels, qui ont besoin de se projeter dans l'avenir pour investir, ces documents ne présentent toutefois pas de surprise. Dans l'énergie, conformément à la trajectoire publiée fin 2023, la France développera à la fois des capacités nucléaires et des énergies décarbonées . La SNBC reprend de son côté , à quelques modifications près, les grands leviers déjà publiés par le SGPE dès mai 2023 : la France devra réduire ses émissions de 134 millions de tonnes équivalent CO2 entre 2022 et 2030. La stratégie, qui compte 160 pages, détaille cette baisse par secteur (transport, bâtiment, industrie, etc.), ainsi que les mesures concrètes pour y parvenir : soutien à l'achat de voitures électriques, à la rénovation des logements, à la décarbonation de l'industrie, etc. Points durs Les points durs qui étaient ressortis des travaux du SGPE restent toutefois entiers : comment compenser l'insuffisance des puits de carbone, alors que les forêts françaises mal en point absorbent de moins en moins de CO2 ? Comment hiérarchiser l'utilisation de la biomasse , que tout le monde s'arrache ? Le gouvernement ne tranche pas sur ces points cruciaux, en attente d'arbitrage depuis plus d'un an. La question des moyens reste aussi béante, car de nombreux leviers envisagés par le SGPE nécessitent de lourds investissements. Or le budget 2025 prévoit d'amputer plusieurs enveloppes cruciales pour la transition écologique : le soutien au verdissement du parc automobile, l'aide à la rénovation des logements, le budget de l'Ademe, pour n'en citer que quelques-unes. LIRE AUSSI : En chiffres - Budget 2025 : sur la transition écologique, reculs à tous les étages Planification écologique : 50 « leviers », dans tous les secteurs « L'urgence budgétaire ne rend pas l'urgence écologique moins pressante », a fait valoir Agnès Pannier-Runacher, rappelant au passage que « l'investissement écologique est parfois le meilleur rempart contre des dépenses publiques futures ». La ministre avait publiquement fait savoir que, même si elle est prête à prendre sa part des efforts nécessaires, elle jugeait le budget de son ministère « pas au niveau ». Le document reste aussi très flou sur la façon dont la France attendra la neutralité carbone en 2050 - un objectif pourtant crucial pour le climat. « Le document comporte à cet égard plusieurs encadrés intéressants, sur le transport aérien, la consommation de viande rouge, la fin du chauffage au gaz, la relance du nucléaire, ou encore la récolte de bois », relève Hadrien Hainaut, de l'Institut pour l'économie et le climat (I4CE). « C'est sur ces questions qui fâchent que devrait vraiment porter la consultation sur la SNBC ! » Ouvertes jusqu'à la mi-décembre, les consultations sur la PPE et la SNBC feront l'objet de décrets courant 2025.
La Banque Postale entame la vente à la découpe de KissKissBankBank
La Banque Postale choisit de céder KissKissBankBank par petits bouts. Le groupe bancaire vient en effet d'annoncer la vente de Lendopolis, une plateforme de financement participatif spécialisée dans la transition écologique, à son concurrent direct, Lendosphere. Il s'agit de la première étape dans la revente de KissKissBankbank et de l'ensemble de ses filiales (à l'exception de Microdon). La plateforme Lendopolis n'a « pas été épargnée par le contexte économique difficile, sur fond d'inflation et de hausse historique des taux d'intérêt qui ont fragilisé son modèle en matière de marge », explique La Banque Postale, interrogée par « Les Echos ». « Son modèle économique à marge faible et sur des cycles de vente long nécessiterait un fort investissement pour assurer sa pérennité et sa croissance », poursuit la banque. Concernant la séparation de KissKissBankBank de sa filiale, « les synergies économiques étaient limitées, les séparer n'était pas un sujet », confie un proche du dossier. Pour l'heure, la banque publique ne donne pas plus de détails concernant la cession de KissKissBankBank - qui avait été racheté en 2017 , en plein boum du marché du crowdfunding - et de ses filiales, à savoir Goodeed (régie publicitaire solidaire) et Youmatter (média et formation RSE). Une revue stratégique est cependant toujours en cours, indique la banque, dans le cadre de son « plan de transformation » et le « recentrage de ses activités bancaires ». C'est notamment la mission du nouveau patron de La Banque Postale, Stéphane Dedeyan, nommé officiellement au printemps, après le départ de Philippe Heim. Nouveau leader européen Les détails financiers de l'opération réalisée avec Lendosphere n'ont pas été communiqués. La plateforme de Lendopolis, sa marque et ses équipes seront maintenues. Tout comme les contrats d'apporteur d'affaires qui lient l'entreprise de 13 personnes à La Banque Postale. Autrement dit, les offres d'investissement de Lendopolis resteront accessibles aux clients bancaires et patrimoniaux de la banque, via le réseau des bureaux de postes et de sa banque privée. LIRE AUSSI : DECRYPTAGE - Les recettes de ces start-up pour réussir leur campagne de crowdfunding Le patron de Louvre Banque Privée, filiale de La Banque Postale, quitte ses fonctions « Cette cession permet de maintenir l'impact sociétal de cette activité et de consolider la valeur créée », souligne La Banque Postale. Avec Lendosphere - détenu par le fonds d'investissement 123 IM -, le nouvel ensemble a de quoi s'imposer comme l'un des leaders européens du financement participatif pour des projets d'énergies renouvelables. Ensemble, les deux entreprises représentent un total de 600 millions d'euros de financements réalisés (330 millions pour Lendosphere, 300 millions pour Lendopolis) et près de 100.000 investisseurs inscrits sur l'une des deux plateformes. « C'est une opération transformante pour Lendosphere, explique Laure Verhaeghe, cofondatrice de la plateforme. Nous doublons de volume et nous bénéficions d'un réseau de distribution (les agences de La Banque Postale, NDLR) très complémentaire du nôtre. » Spécialisé dès l'origine sur les énergies renouvelables, Lendosphere assure être rentable depuis sa création et enregistrer une « croissance à deux chiffres » chaque année. De son côté, créé en 2014 par les fondateurs de KissKissBankBank, Lendopolis a basculé exclusivement sur le financement des énergies renouvelable en 2019 ce qui lui a permis de réduire à zéro son taux de défaut. La plateforme assure qu'elle devrait atteindre la rentabilité cette année.
Frais de livraison des livres : le stratagème d’Amazon pour contourner la loi
Incorrigible Amazon. Treize mois après l'entrée en vigueur de la loi sur les frais de livraison du livre, dite aussi « loi anti-Amazon », le groupe tente de s'engouffrer dans une brèche juridique. Depuis le mois d'octobre 2023, un seuil de 3 euros est imposé aux frais de port pour les commandes en ligne de livres inférieures à 35 euros. Celui-ci vise à rééquilibrer le jeu concurrentiel entre le géant de l'e-commerce d'un côté et ses rivaux de l'autre : de la FNAC au Furet du Nord, en passant par les librairies indépendantes, dont les coûts de livraison sont moins facilement amortissables, étant donné les effets de taille. Mais le géant américain vient de tenter une percée dans ce dispositif. « Les clients d'Amazon.fr bénéficient désormais de la livraison gratuite dans plus de 2.500 points de retrait pour leurs achats de livres », a annoncé Amazon, mardi, dans un communiqué. Remise en cause du prix unique Les réactions dans le milieu du livre, mais aussi des politiques, ne se sont pas fait attendre. « C'est scandaleux et désespérant. C'est un flagrant contournement de la loi qui se fait au détriment des libraires », assène la sénatrice Horizons Laure Darcos, qui a porté cette loi sur les frais de livraison du livre, promulguée fin 2021. Mardi, la ministre la Culture, Rachida Dati, a annoncé, au Sénat, qu'elle allait saisir le médiateur du livre - l'autorité chargée de la conciliation des litiges portant sur le principe du prix unique du livre fixé par la loi Lang de 1981. Pour mémoire, la loi Darcos a pour objectif de compléter cette dernière. La raison ? La forte accélération de l'e-commerce a rendu la loi Lang moins opérationnelle ces dernières années. « Il faut qu'il y ait un prix unique de tous les livres, le livre qu'on va acheter à la librairie comme le livre qu'on reçoit à la maison », avait appelé de ses voeux Emmanuel Macron en mai 2021. LIRE AUSSI : DECRYPTAGE - Librairies indépendantes : une situation économique et financière sur le fil du rasoir Taxer le livre d'occasion : la question qui agite l'industrie du livre En 2014, une première loi sur le sujet, déjà surnommée « anti-Amazon », avait vu le jour. Celle-ci visait à mettre fin à la gratuité sur les frais de port du livre mais ne définissait pas de grilles tarifaires précises et par paliers. Résultat : Amazon l'avait immédiatement rendue caduque en facturant la livraison de livres… 0,01 euro. Nouveau texte, nouvel angle d'attaque. Amazon souligne dans son communiqué que la livraison gratuite qu'il propose « est disponible pour une sélection de points de retrait situés dans des commerces vendant notamment des livres ». Amazon fait valoir que la loi le permet. Une interprétation de texte qui n'est pas la même pour tout le monde. Loin de là. Possible contestation en justice « Cela s'apparente à un contournement de la loi qui dit que les frais de port peuvent être gratuits lorsque le livre est retiré dans un commerce de vente au détail de livres. La question est donc de savoir si un 'locker' [casier, NDLR] implanté dans un hypermarché correspond à cette définition. Pour notre part, nous en doutons », réagit Guillaume Husson, délégué général du Syndicat de la librairie française (SLF), dont les adhérents pèsent plus des trois quarts du chiffre d'affaires national des librairies indépendantes. Celui-ci se réserve le droit de porter le dossier en justice. « C'est une possibilité. A ce stade, rien n'est arrêté. » « Amazon contourne l'esprit de la loi et essaie de jouer avec l'interprétation du texte », abonde Eric Lafraise, directeur des relations extérieures du Syndicat des distributeurs de loisirs culturels, regroupant notamment les enseignes Cultura et Le Furet du Nord. « A l'époque des débats sur la loi, l'idée de celle-ci était de faire venir davantage de personnes dans les librairies. Pas vers des lockers. » Amazon rétorque que le dispositif passera certes par des lockers, mais que le retrait se fera aussi au comptoir ou à l'accueil des magasins concernés. LIRE AUSSI : DECRYPTAGE - Goncourt, Renaudot : pourquoi la France est la championne du monde des prix littéraires Pourquoi les livres de grands patrons peinent à trouver leur public Craignant que cette loi ne fasse tache d'huile en Europe, Amazon est parti en croisade contre elle, arguant entre autres que ces frais de livraison entravent le pouvoir d'achat. Ce à quoi ses opposants rétorquent que le géant de l'e-commerce ne fait strictement aucun geste tarifaire pour l'ensemble des autres produits culturels et de grande consommation. Pour eux, cette politique, concernant uniquement les frais de livraison du livre, s'apparente à du dumping visant à gagner des parts de marché et à évincer les autres acteurs. Faisant feu de tout bois, Amazon multiplie les prises de parole à ce sujet et les contre-propositions (notamment pour un tarif postal réduit). Mi-2023, la firme avait porté l'affaire devant le Conseil d'Etat, qui l'a renvoyée en mai dernier devant la Cour de justice de l'Union européenne.
Automobile : pourquoi la France fragilise l’objectif européen du 100 % électrique
Des ajustements transitoires, mais sans renverser la table. Après plusieurs réunions interministérielles, le gouvernement français a décidé lundi dernier de soutenir les entreprises de l'automobile menées par Renault qui jugent inatteignables les objectifs CO2 fixés par la réglementation européenne pour 2025. Paris va donc tenter de convaincre ses partenaires européens de retirer ou d'aménager les pénalités auxquelles font face les constructeurs s'ils ne respectent pas la baisse des émissions de CO2 l'an prochain. Sans renoncer, officiellement, à l'objectif européen ultime d'interdire, dans dix ans, en 2035, la vente de voitures thermiques . Le gouvernement français veut croire que, conscients de leurs intérêts de long terme, les constructeurs respecteront la réglementation d'eux-mêmes. Sans avoir besoin d'être menacés. « En 2019, on pouvait se demander si l'offre électrique allait émerger sans sanction, argumente une source au sein de l'exécutif. Mais aujourd'hui, les constructeurs ont investi des milliards d'euros , et ils veulent les rentabiliser. Il leur faut faire du volume et vendre des voitures à batteries. » Disparition de la contrainte carbone Est-ce tenable ? Une voiture thermique rapporte encore bien davantage qu'une voiture électrique. L'incitation est donc grande, chez les constructeurs, de vendre un maximum de véhicules à essence et de ne pas pousser outre mesure ceux dotés de batteries. Malgré les investissements déjà réalisés dans cette nouvelle motorisation. Certains, qui ont cédé à cette tentation, se retrouvent d'ailleurs aujourd'hui en difficulté. Supprimer l'amende, aujourd'hui fixée à 95 euros par grammes de CO2 excédentaire, revient de plus à ramener à zéro la valeur du CO2 dans le calcul de la rentabilité des investissements des constructeurs dans l'électrique. Sans amende, le carbone n'est tout à coup plus une contrainte. LIRE AUSSI : Emissions de CO2, sécurité… Comment l'Europe influe déjà sur nos voitures CO2 : les constructeurs auto à la manoeuvre pour faire pression sur Bruxelles Remettre en cause le point de passage de 2025 revient à fragiliser toute la trajectoire devant aboutir sur la fin du thermique en 2035. « Avec un palier de -15 %, l'échéance de 2025 est la plus facile à tenir, expliquait il y a quelques semaines un responsable du secteur. En 2030, la baisse des émissions de CO2 devra être de 50 % ! Si on n'y arrive pas l'an prochain, nous n'y arriverons pas non plus lors des prochaines échéances. » D'autant moins si le secteur sait qu'il peut faire plier le politique et annihiler toute menace de pénalité. Ouvrir la boîte de Pandore Patrick Pelata, désormais consultant après avoir été longtemps numéro deux de Renault, ne dit pas autre chose. « Si les constructeurs ne passent pas 2025, ils n'y arriveront pas en 2030 et encore moins en 2035, explique-t-il. Aménager l'échéance de 2025 reviendrait de facto à autoriser le secteur à ne pas suivre le plan fixé par l'Europe. » S'ils réussissent à faire sauter les sanctions pour l'année prochaine, pourquoi écoperaient-ils de pénalités en 2030 ? LIRE AUSSI : Les règles CO2, cette nouvelle fracture entre Renault et Stellantis Batteries : le pari à 3 milliards d'euros de la France Au sein du gouvernement français, on reconnaît d'ailleurs entre les lignes qu'on veut adoucir le rythme d'électrification à court terme pour ne pas sacrifier la chaîne de valeur de l'automobile. « Il faut que la transition se fasse dans un calendrier qui laisse au secteur le temps de se transformer et qui soit compatible avec le maintien d'une activité en Europe », explique une source ministérielle. D'autant plus que la France, en s'attaquant aux pénalités pour 2025, pourrait donner un nouvel élan à ceux, nombreux, qui veulent dynamiter l'échéance de 2035. Le mois dernier, le patron de BMW Oliver Zipse a demandé à l'Europe de renoncer à la fin des moteurs thermiques à cette date. L'Association des constructeurs européens (ACEA) fait campagne pour avancer la clause de revoyure à 2025 avec la même revendication sous-jacente, tout comme l'Italie.