Le secteur des cryptomonnaies ou cryptos a aussi ses bouffons , des personnalités numériques chargées de divertir et de faire rire. Et le dogecoin, conçu à son origine comme une plaisanterie est le bouffon du « roi bitcoin », qui domine et s’approprie la moitié du marché mondial. Sur les 9.500 cryptos, qui ont émergé dans le sillage du bitcoin et tenté de contester son monopole naturel, le dogecoin a tout fait pour se démarquer, avec succès. Son cours de 0,2744 dollar (0,2271 euro), en hausse de 1,6 % sur les dernières 24 heures, a été multiplié par 59 cette année.

Le dogecoin figure aujourd’hui au 7e rang mondial du secteur et pèse 36 milliards de dollars. Malgré cet engouement, le dogecoin n’est toujours pas coté sur la plateforme Coinbase , qui a récemment fait son introduction en Bourse . Il est en revanche coté sur Kraken. 

Aboyeur né
Le dogecoin a pris pour mascotte Kabosu, un shiba inu, chien qui appartenait à une professeure japonaise. Cet animal est réputé pour être « vif et très intelligent. Petit, mais bien proportionné, il est doté d’une forte personnalité ». Son principal défaut ? « C’est un aboyeur né ». La mascotte du dogecoin est devenue un mème Internet , une image reprise et déclinée en masse, lui offrant une notoriété mondiale.

Secrets de famille
Son fonctionnement est aux antipodes du bitcoin : l’offre du dogecoin est illimitée à la différence de l’émission maximum de 21 millions de bitcoins . A son origine, 100 milliards de dogecoins devaient être émis au maximum avant que son offre soit changée et devienne illimitée. Chaque année, des milliards de nouveaux dogecoins sont émis à un rythme décroissant et trouvent preneurs dans la folie spéculative qui s’est emparée de la crypto. C’est une devise « inflationniste » à la différence de la leader des cryptos. « Les partisans du bitcoin ne sont pas fans du dogecoin, qu’ils voient comme le jeune frère qui leur fait honte et révèle les secrets de famille. Les cryptos sont censées inaugurer une révolution monétaire sérieuse et pas être une plaisanterie », écrit sur son blog Moneyness , l’économiste John Paul Koning .

Devise des réseaux sociaux
Le dogecoin est en « roue libre » depuis sa création il y a sept ans. Il ne bénéficie d’aucune communauté significative de programmeurs et son fonctionnement n’a pas subi de changement ni d’amélioration depuis 2015. Cette crypto est peu utilisée par des applications. Elle est en revanche très populaire sur les réseaux sociaux et sur le forum Reddit où l’espace de discussion dédié à dogecoin compte 1,5 million d’abonnés, en hausse de 25 % en une semaine selon le magazine « Forbes ».

Rasta crypto
Dogecoin est une monnaie d’échange décentralisée utilisée entre les internautes. Compte tenu de sa très faible valeur (quelques cents), c’est une sorte de pourboire numérique pour récompenser un service, une bonne action, un don. Le dogecoin est aussi utilisé dans le cadre du financement participatif (crowdfunding). Cette crypto a permis de financer la participation d’une équipe de bobsleigh jamaïcaine aux Jeux d’hiver de Sochi en 2014. Une initiative qui se voulait un hommage au film Rasta Rockett .

Le dogecoin s’est envolé cette année

Objectif Lune
C’est depuis l’application de partage de vidéos TikTok que partit en juillet dernier l’envolée spéculative du dogecoin. Objectif ? « La Lune ! » (« To the Moon ! », selon le message martelé par les internautes) soit un prix de 1 dollar, le nouvel objectif de la communauté dogecoin.

Le GameStop des cryptos
La crypto a vraiment décollé en 2021, au moment de l’affaire GameStop, qui a marqué la revanche des boursicoteurs et particuliers face aux puissances de Wall Street et de l’establishment financier. Le dogecoin, populaire dans les milieux alternatifs et musicaux ( le rappeur Snoop Dogg est un fan), est devenu la coqueluche des cryptos et il s’est alors envolé jusqu’à un record de 0,45 dollar. Son faible prix le rend très abordable aux petits investisseurs et spéculateurs. Selon ses partisans, c’est le dogecoin qui conserve le véritable esprit des origines libertariennes des cryptos alors que le bitcoin a vendu son âme à Wall Street et s’est institutionnalisé.

Concentration
Le Dogecoin « est la crypto du peuple », avait ainsi déclaré le milliardaire Elon Musk. Pourtant, sa détention est très concentrée dans les mains de quelques grands investisseurs. 98 portefeuilles détiennent près des deux tiers des Dogecoins. Un seul portefeuille en détient 28 % et cinq 40 % selon TRM Labs. Parmi ces « baleines » (gros investisseurs) figure peut-être le dirigeant de Tesla.

0,00029 dollar à ses débuts
Conçu par un programmeur américain Billy Markus à partir de modèles comme le luckycoin, lui-même inspiré de litecoin, le dogecoin fut lancé en décembre 2013 avec le concours de l’entrepreneur australien Jackson Palmer, le dogecoin se voulait une plaisanterie. Il valait alors 0,00029 dollar et sa capitalisation était inférieure à 2 millions de dollars. Il connaît dès ses débuts une forte volatilité (envolée, krach, piratage du portefeuille Dogewallet…) mais un mois plus tard les volumes sur le dogecoin étaient supérieurs à ceux traités sur toutes les cryptos, bitcoin compris. Sa cotation débute sur une plateforme et les premiers distributeurs de dogecoins sont installés à Vancouver au Canada et à Tijuana au Mexique proche de la frontière américaine.

Parodie
Ce début en fanfare, la jeune crypto décomplexée n’a pas pu le maintenir dans la durée. Elle a végété les années suivantes comme une crypto de niche face à l’explosion du nombre de ses concurrentes et la montée en puissance du bitcoin. En janvier 2018 au début de l’éclatement d’une des plus importantes bulles des cryptos, Jackson Palmer déclarait au magazine « Vice ». « Jamais je n’aurai imaginé que le dogecoin soit encore en vie en 2018 et qu’il ait une valeur de 2 milliards de dollars. Sa valeur tient au fait que des investisseurs peu expérimentés l’ont acheté en espérant que son cours suive l’ascension météorique du bitcoin. Le dogecoin était une parodie pour montrer combien il était facile de lancer une crypto », raconta l’Australien qui avait quitté le projet dogecoin en 2015.

Soutien d’Elon Musk
Une nouvelle génération de spéculateurs en quête d’adrénaline souhaite gagner de l’argent tout en s’amusant. Le dogecoin est fait pour eux. Il a aussi tapé dans l’oeil du milliardaire entrepreneur Elon Musk, qui lui a offert une publicité mondiale. Le 20 décembre dernier, il affichait son soutien au dogecoin à ses 45 millions d’abonnés sur Twitter en livrant ce message : « Un seul mot : Doge ». Et parodiait sa biographie qui indiquait désormais : « ancien directeur général de dogecoin ». L’effet avait été radical. Le cours du dogecoin avait alors bondi de 8 % en cinq minutes et de plus de 17 % en une heure. Elon Musk ne fit pas seulement progresser le prix mais aussi les volumes traités sur le dogecoin. Il récidiva le 25 décembre et le 28 janvier 2021, mais sans impact significatif sur le cours.

Aussi connu que l’ether en France
Dans l’Hexagone, sa notoriété est encore très modeste. Seuls 3 % des Français ont une idée précise de ce qu’est le dogecoin, contre 40 % pour le bitcoin, selon un sondage de l’Ifop pour le compte de Cointribune. Sa notoriété globale (personnes qui ont une idée précise et imprécise de ce qu’est le dogecoin) est de 10 % et déjà comparable à celle de l’ether (11 %), qui est pourtant la deuxième crypto mondiale.

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