Le « Ryanair du train » peaufine son modèle économique, et prépare son lancement prévu pour la fin 2028 sur trois lignes intérieures françaises. Kevin Speed, l’un des nouveaux projets de compagnies privées qui viendraient se mesurer à la SNCF sur la grande vitesse (avec Le Train , Evolyn ou Proxima), a signé un accord-cadre avec SNCF Réseau, le gestionnaire du réseau national.
Le contrat lui garantit ses volumes de sillons nécessaires, pour dix ans renouvelables à partir de son lancement. Ce dispositif juridique, prévu dans les textes européens, se pratique dans le fret mais est une première en France pour le segment voyageurs.
Low cost et haute fréquence
Le projet « low cost et haute fréquence » est très ambitieux pour une start-up, qui devra mobiliser pas moins d’un milliard d’euros, en dette et en fonds propres, pour assurer son décollage.
L’accord-cadre signé en présence du nouveau ministre des Transports, Patrice Vergriete, vise à conforter les premières levées de fonds, explique Laurent Fourtune, un ancien de la RATP et d’Eurotunnel, le chef de file du projet. Au rang des investisseurs, des fonds d’infrastructures notamment seront démarchés. D’ores et déjà, la jeune pousse a décroché un prêt innovation de la BPI.
Elle envisage de lancer des services TGV sur trois lignes, Paris-Lille, Paris-Strasbourg et Paris-Lyon, en desservant six gares intermédiaires telles que TGV-Picardie, Le Creusot ou Lorraine TGV, avec des TGV à haute densité. Cela sans la moindre subvention.
A terme, Kevin Speed vise 16 trajets quotidiens dans chaque sens et sur chaque ligne, embarquant à la fois les usagers du quotidien demandeurs de trajets intermédiaires (Reims-Metz par exemple) ou des clients effectuant tout le parcours. Avec un système de fidélisation, sur le principe « plus on roule, moins on paye par billet ».
Discussions avec Alstom
Le réseau qui serait exploité sous la future marque ilisto requiert à terme un parc de 20 rames neuves, en cours de développement avec Alstom, qui en assurerait aussi la maintenance. Un véritable défi, au vu des importants retards de livraison déjà accumulés par le constructeur avec ses grands clients tricolores, SNCF comme IDFM. Mais trois rames par ligne suffiraient à démarrer fin 2028.
Contrairement aux TGV Duplex en circulation, le parc reposerait sur des trains à un seul étage densifiés à 760 places, capables de pousser à 300 km/h. Avec des portes réservées à la montée et d’autres à la descente, pour limiter au maximum les temps d’arrêt en gare. Ils seront conduits par 150 cheminots, et les effectifs seront plus du double avec les autres salariés.
Séduire des automobilistes
Selon le président de Kevin Speed, le concurrent principal ne sera pas tant la SNCF que la voiture individuelle, sur ces lignes TGV parallèles aux grandes autoroutes.
« L’objectif est de rajouter des clients dans le système ferroviaire. Actuellement, l’automobile représente plus de 80 % du volume. Si on réduit de 3 % seulement le nombre de voitures, il faut mécaniquement augmenter de 25 % les volumes de sièges dans les trains », extrapole-t-il.
Après la montée en régime, l’entrepreneur qui n’a peur de rien vise six millions de passagers par an et par ligne. Son concept pensé pour les voyageurs fréquents « fera baisser le prix des billets de train tout en accroissant les péages pour SNCF Réseau », ajoute Laurent Fourtune, évoquant déjà des prix d’appel canons comme 5 euros pour un Paris-Lille aux heures creuses…
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