HOSPITALITY LAB & PRACTICE FOR BRANDS

Blog2017-10-23T13:43:48+00:00

GDPR : L’hospitalité des marques fait loi en Europe.

GDPR : L’hospitalité des marques fait loi en Europe.

En imposant aux marques de privilégier l’intérêt de leurs clients dans la gestion des données qu’elles détiennent, l’Europe fait de l’hospitalité le vecteur principal de leur croissance.

1. AUJOURD’HUI, LA CROISSANCE DES MARQUES PASSE PAR LA QUALITÉ DE LEUR RELATION CLIENTS.

Dans un monde digital, « Les Marchés sont des Conversations ».

Dès 1999, Doc Searls et ses co-auteurs avaient mis cette idée au coeur de leur “Clue Train Manifesto” (Manifeste des Evidences) (1), démontrant alors avec brio comment le développement du “capital relationnel” de la marque pouvait devenir le principal moteur de la croissance des entreprises.

L’arrivée des sites internet dans la fin des années 1990 avait eu en effet le mérite de faire prendre conscience qu’il pouvait se nouer une relation directe entre l’entreprise et ses clients, sans passer par un distributeur ; et que ces nouveaux liens produisaient énormément de données qu’il était probablement intéressant d’exploiter : ainsi, pour développer plus loin l’idée du “Clue Train”, lorsqu’il s’agit de générer une croissance durable des ventes et des profits, les meilleurs atouts de la marque sont sa légitimité à susciter des échanges autour de son coeur de métier (Conversation), son intelligence à les analyser (Curation), sa capacité à apporter des réponses adaptées aux besoins exprimés (Customization), et finalement son empathie relationnelle, propre à mettre le client en résonance avec la marque (Communion). Autant d’atouts qui précèdent dorénavant la simple « qualité des produits » mis au catalogue, autrefois le principal fer de lance des entreprises.
Une vision depuis partagée par Interbrand(2), qui dans sa publication annuelle du classement de la valeur des marques insiste sur le fait que “la croissance est la conséquence d’une stratégie claire et d’expériences exceptionnelles délivrées au consommateur”.
Voici donc venu le temps pour les marques soucieuses de croissance durable de passer un nouveau contrat relationnel avec leurs consommateurs, où l’achat et la livraison du produit n’est plus la fin mais le début de la relation : un contrat qui couvre d’abord l’usage, et l’expérience qui l’accompagne. Un contrat qui est aussi l’occasion de proposer de nouveaux moments de consommation, de nouveaux services, qui sont autant de chiffre d’affaires supplémentaire pour les marques. Mais un contrat relationnel d’abord fondé sur le respect de l’intérêt du client, notamment en matière d’utilisation de ses données.

 

2. GDPR : UNE RÉGLEMENTATION POUR SAISIR DE NOUVELLES OPPORTUNITÉS DE CROISSANCE.

Selon une étude récente de la Commission Européenne(3), 72% des Européens s’inquiètent en effet de laisser trop de données personnelles aux entreprises, souvent à leur insu, et surtout de ne pas en recevoir de réelle contrepartie. D’ailleurs, la connaissance plus précise du client semble ne faciliter en rien la capacité de l’entreprise à mieux cibler ses offres : selon tous les indicateurs(4), le taux d’ouverture des mails diminue alors que les désabonnements (opt-out) augmentent, ce qui fragilise largement la rentabilité des investissements lourds consentis dans le CRM.
La Commission souligne également que le marché en ligne est constitué à 57% d’échanges avec des opérateurs américains, alors que seulement 4% des échanges se font au travers d’opérateurs pan-européens. Elle estime que si les 100 plus grosses entreprises Européennes faisaient un usage judicieux de leurs données clients, le PNB Européen pourrait s’octroyer 1,9% de progression supplémentaire d’ici 2020, soit plus de 200 Milliard d’Euros de gain potentiel.
C’est avant tout à cette opportunité de croissance que la GDPR s’attaque : permettre une meilleure utilisation des données pour les entreprises grâce à un consentement avéré des consommateurs, favoriser les échanges intra-européens au sein d’un univers mieux sécurisé. Loin d’être une contrainte, la GDPR est une chance de développement de nouvelles sources de revenus pour les marques européennes : elle conduit à un modèle de croissance durable rendu possible par une approche choisie et non plus subie de la consommation. Avec la GDPR, les marques doivent négocier avec chacun de leurs clients un contrat relationnel : elles doivent se mettre à l’écoute, comprendre les besoins, proposer leurs services, et définir les modalités de la relation ; le tout dans la transparence ( accès aux données, droit de modification) qui établit la confiance, l’attachement. Les marques deviennent alors attachantes dans le bon sens du terme, et c’est de cet attachement que nait la croissance durable.
C’est à ce nouveau modèle relationnel qu’appellait lui-même Doc Searls dans son “Clue Train Manifesto” : il lui avait même trouvé un nom, la VRM (Vendor Relationship Management). Une approche basée sur le consentement avéré du client vis à vis de ses fournisseurs (vendeurs) avec un postulat simple : “un consommateur libre a plus de valeur qu’un consommateur captif – pour lui-même, pour les marques et pour l’économie en général”.
Encore faut-il s’entendre sur la définition du consommateur “libre”. Searls le définit en cinq points :
1. Il entre en relation avec les marques de manière indépendante et sans contrainte.
2. Il est le point d’intégration de sa propre donnée (c’est lui seul qui peut relier sa donnée à sa personne).
3. Il a le contrôle de la donnée qu’il génère et collecte. Il décide de ce qu’il veut partager, à qui et comment.
4. Il définit son propre niveau d’engagement avec les marques.
5. Il est libre d’exprimer ses exigences et ses intentions en dehors du contrôle de toute entreprise.
C’est ce consommateur “libre” que la GDPR souhaite aujourd’hui promouvoir, afin d’en faire le vecteur de croissance de l’économie.

3. L’HOSPITALITE DES MARQUES, PRINCIPAL VECTEUR DE LEUR PROPRE CROISSANCE.

Accueillir un consommateur “libre” est sans doute une perspective qui effraie bon nombre de marques, tant elle ont été construites sur la notion d’un marketing manipulateur et insidieux, capable d’influencer jusqu’aux émotions pour enfermer les clients dans un tunnel de vente dont la seule issue est l’achat du produit. Avec la GDPR, ce n’est plus le produit qu’il va falloir vendre, c’est la marque qui doit apprendre à se faire acheter. Et pour cela, il va falloir qu’elle se montre hospitalière vis à vis de ses clients : bienveillante, humaine et proche.
Le produit devient simplement la porte d’entrée à la marque, celui qui va forger les impressions de la première rencontre, et donc le début (et non la fin) de l’histoire. Le produit n’est plus qu’un prétexte, c’est la marque qui devient le réel support de l’expérience pour le consommateur : c’est d’ailleurs à elle qu’il va naturellement s’adresser s’il a besoin d’assistance ou s’il a simplement des remarques à formuler. À la marque de se montrer engageante, accueillante, généreuse et humaine pour fidéliser le consommateur au-delà du premier produit, et pour entretenir une relation proche, intime, qui permettra de continuer à vendre sans qu’il soit besoin de déployer la coûteuse armada publicitaire du premier jour : avoir une stratégie à long terme d’entretien de la relation, plutôt que de s’épuiser dans des efforts permanents de recrutement.
Autant le “tunnel de vente” était indifférencié et anonyme, donc étranger à toute notion d’hospitalité, autant le “cycle de décision d’achat” est personnalisé et fait appel à la relation humaine : c’est de la capacité de la marque à accueillir que dépend la fidélisation du client, et encore plus, sa propension à devenir activement promoteur vis à vis de ses pairs. Pour le dire différemment, c’est du niveau d’hospitalité de la marque que va découler l’amplitude de la réalisation du cycle d’achat, et donc le montant de la valeur créée.
Autant le “tunnel de vente” s’envisageait dans un temps le plus court possible, avec l’espoir de limiter la durée d’exposition nécessaire pour déclencher l’achat afin de réduire les coûts, autant le “cycle de décision d’achat” s’inscrit dans la durée la plus longue possible afin de maximiser les revenus. En se plaçant dans une notion de permanence, on met forcément en exergue la qualité de l’hospitalité, seule capable de générer de la pérennité dans la relation.
Plus le consommateur progresse avec la marque, plus la marque fait preuve de « disponibilité » vis à vis des demandes du consommateur, plus se crée la confiance dans la relation, le consommateur récupérant de plus en plus de valeur d’usage en retour de sa relation avec la marque, la marque obtenant de plus en plus de “permissions” qui lui permettent d’aller encore plus loin dans son service du consommateur.
C’est bien là le cercle vertueux de l’hospitalité des marques : un marketing “on demand” (inbound marketing), un marketing de l’échange, de la confiance, de la permission, du partage de la valeur, où les clients sont aussi des hôtes ; un marketing qui se définit d’abord par rapport au client pour qu’il puisse adopter lui-même la marque, la faire sienne et en devenir à son tour le porte-parole…
Alors que la GDPR fait des marques le gibier de consommateurs devenus madrés, l’hospitalité est la meilleure réponse pour faire de ces mêmes marques les plus désirables des proies : avec bienveillance, humanité et intimité. Assurant ainsi la pérennité de leur croissance.

4. QUELLES APPROCHES POUR LES MARQUES FACE A LA GDPR ?

Ce serait peine perdue pour les marques que de se contenter de « mettre en conformité » leur bases de données tout en espérant garder les mêmes pratiques relationnelles. Car la GDPR est d’abord une invitation à renverser ses pratiques relationnelles pour faire montre d’hospitalité vis à vis de ses clients ; et c’est ce renversement d’attitude qui est lui même porteur de croissance pour les marques. Avec la GDPR, l’hospitalité ouvre pour les marques de nouvelles perspectives de croissance.
Une étude publiée en Mai dernier par le gouvernement Britannique4 s’était alarmée sur le fait que seulement 30% des grandes entreprises du pays avaient commencé à prendre les mesures nécessaires à la mise en conformité de leurs pratiques d’utilisation des données, alors que la transcription dans la loi Britannique vient d’être réalisée en ce mois d’Août, et qu’elle survivra au Brexit. Les autres pays feront-ils preuve de la même insouciance, par rapport à une échéance qui dans la plupart des pays européens, a été fixée à Mai 2018 ?
La GDPR transforme radicalement la manière dont les entreprises utilisent les données. Il va falloir arrêter d’acheter des listes d’adresses, et même se débarasser des listes qu’on aura pu acheter auparavant. Contacter un client exigera d’avoir les permissions nécessaires, sauf à s’exposer à des amendes prévues pour atteindre jusqu’à 4% du chiffre d’affaires.
Il n’y aura donc pas d’échappatoires.
Mais n’est-ce pas justement l’opportunité d’une prise de conscience salutaire dans le futur de la relation client ? Quelle marque aujourd’hui a encore besoin d’avoir accès à des millions de noms dont simplement un infime pourcentage montre un intérêt pour ses propositions ? Ne vaudrait-il pas mieux établir une véritable relation avec moins de clients mais qui ont un véritabe intérêt à avoir un dialogue, un échange, une conversation avec la marque ?
N’est-il pas temps, tout simplement, que les marques apprennent à devenir hospitalières vis à vis de leurs clients ?
Et si la GDPR n’était qu’un manifeste pour l’hospitalité des marques ? Une manière de sauver les marques traditionnelles à l’heure du digital ? La dernière opportunité à saisir avant liquidation ou reprise par les acteurs de la nouvelle économie ?
En développant leur hospitalité pour se mettre en conformité avec la GDPR, ce n’est pas tant l’amende que les marques vont éviter, c’est leur futur qu’elle vont assurer.
Aucune raison d’attendre. Embrassons la GDPR en développant l’hospitalité des marques (5).

 

 

(1) Le Cluetrain Manifesto (Manifeste des évidences) est un texte rédigé par Rick Levine, Christopher Locke, Doc Searls, et David Weinberger. Il est d’abord diffusé sur le web en 1999 comme un ensemble de quatre-vingt-quinze thèses, puis est publié sous forme de livre en 2000 avec les thèses prolongées de sept essais. https://www.amazon.com/Cluetrain-Manifesto-End-Business-Usual/dp/0738204315
(2) Etude 2016 Interbrand : http://interbrand.com/best-brands/best-global-brands/2016/
(3) Etude de la Commission Européenne : https://ec.europa.eu/commission/publications/why-we-need-digital-single-market_en
(4) Citée par Tanya Joseph dans le magazine Marketing Week (UK) du 7 Août 2017, New data laws are a chance to reset customer relationships : https://www.marketingweek.com/2017/08/07/tanya-joseph-data-law/
(5) Cf, “Manifeste pour l’Hospitalité des Marques”, Georges-Edouard DIAS, Edition Netexplo : https://www.amazon.fr/dp/2954667230/

4 scénarios d’évolution pour le métavers –

By |April 28th, 2024|Categories: Scoop.it|

Bien que le métavers se montre plus discret que l’IA dernièrement, les technologies sur lesquelles il repose ne cessent de se développer. Quel pourrait être l’impact de cette innovation sur la société et l’industrie du tourisme à terme ? TMNT, Airbus, Lufthansa et Bauhaus Luftfahrt imaginent quatre scénarios de développement du métavers. Avec la popularité croissante de l’intelligence artificielle, on entend de moins en moins parler du métavers. Pourtant, les technologies émergentes sur lesquelles il repose – réalité virtuelle, blockchain, économie des tokens – ne cessent de se développer. Suivant les cycles propres à l’innovation, le métavers est susceptible de faire, tôt ou tard, un retour fulgurant sur le devant de la scène médiatique. Quel en serait l’impact sur l’industrie du Travel et de l’aéronautique ? En fonction de l’adoption du métavers par le public et du niveau de consolidation du marché ou non, le rapport imagine 4 scénarios impactant le positionnement de cette innovation vis-à-vis du Travel et de l’industrie aéronautique. © TMNT, Airbus, Lufthansa, Bauhaus Luftfahrt C’est la réflexion qui a motivé des équipes de TMNT, Airbus et Bauhaus Luftfahrt, le think tank allemand de l’aérien, à imaginer quatre scénarios de développement du métavers et leurs impact sur le Voyage. L’équipe définit le métavers comme la “convergence des réalités physiques et virtuelles”, un phénomène alimenté par deux éléments fondamentaux que sont l’immersion et la capacité de pouvoir posséder et échanger des actifs numériques. Un métavers élitiste Si dans un futur proche le marché de l’immersion enregistre une faible consolidation ainsi qu’un taux d’adoption minime auprès des consommateurs, il est probable que le métavers devienne une technologie élitiste, selon le rapport. Un scénario dans lequel les expériences immersives offertes par le métavers ont un positionnement haut de gamme et sont réservées à une clientèle de luxe. Compte tenu des coûts d’exploitation élevés de cette technologie, les auteurs imaginent que le métavers constitue un argument commercial uniquement dans l’aviation de luxe.  Un métavers industriel Un second scénario dépeint un futur dans lequel les technologies qui permettent de bâtir le métavers font l’objet d’une forte consolidation mais que l’adoption de cette innovation par les consommateurs est faible. Dans ce futur, les auteurs imaginent ainsi le métavers comme une technologie dont s’est emparée l’industrie en B2B. Un monde dans lequel équipementiers aéronautiques, fournisseurs et compagnies aériennes coopèrent pour bâtir un métavers ouvert et partagé pour des applications industrielles.  Un métavers grand public Le troisième scénario décrit un avenir où le marché du métavers attise la curiosité du grand public et fait l’objet d’une faible consolidation. Un marché fragmenté à l’image de celui des réseaux sociaux actuellement dans lequel une multitude d’acteurs développent des plateformes métavers pour répondre à des cas d’usages spécifiques ou servir une communauté en particulier. Dans cet avenir, les auteurs imaginent “un large éventail d’applications liées aux voyages, de l’inspiration aux services post-réservation, marquant ainsi une ère d’adoption massive.” Un métavers concurrentiel Enfin, l’équipe imagine un scénario dans lequel le métavers et les technologies qui le soutiennent font l’objet d’une forte adoption de la part des consommateurs et d’une forte consolidation du marché. Les auteurs décrivent alors un écosystème du métavers ouvert, dynamique et unifié. En conséquence, l’impact de la technologie sur les usages des consommateurs est important puisqu’à l’image d’internet aujourd’hui, les interfaces et applications immersives font partie intégrante du quotidien dans ce futur hypothétique. Dans ce contexte, le métavers trouve de multiples applications dans le secteur des voyages poussant les compagnies aériennes à investir le domaine pour améliorer l’expérience des passagers ou dégager des avantages concurrentiels. 

La France se mobilise pour ses haies

By |April 28th, 2024|Categories: Scoop.it|

Le printemps 2024 est la saison des haies. Depuis le mois d'avril et jusqu'en juin, les régions sont invitées à répondre aux appels à projets portant sur la plantation, l'animation et la gestion de 50.000 kilomètres de haies et d'arbres interparcellaires d'ici à la fin de la décennie. Annoncé à l'automne dernier par Marc Fesnau, le ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, le « pacte en faveur de la haie » - avec un budget de 110 millions d'euros pour cette première année - traduit une ambition multiple : intégrées à la stratégie bas carbone, ces plantations doivent produire de la biomasse, restaurer la biodiversité champêtre et initier de nouvelles filières de valorisation. Elles permettront surtout de préserver une ressource végétale négligée qui fait aujourd'hui figure de trésor en péril. « Le pacte constitue une victoire de l'appel de la haie, que nous avons lancé en 2023 pour valoriser, protéger et reconstituer des linéaires aujourd'hui en très mauvais état. Il accorde plus de moyens à un réseau d'acteurs de plus en plus dense qui s'apprête à s'engager sur le long terme », se félicite Baptiste Sanson, responsable stratégie et projets du réseau Afac-Agroforesterie. L'association d'utilité publique fédère 400 organisations - collectivités locales, entreprises de toute taille, associations de protection de l'environnement ou têtes de réseau agricole - disposées à secourir les haies. L'art de la trogne Au cours des trois dernières années, deux autres initiatives, le plan de relance en 2020 (qui avait un volet forestier) puis le programme gouvernemental « Plantons des haies » (destiné aux agriculteurs et doté d'un budget de 45 millions d'euros), ont financé de nouvelles plantations. Mais l'urgence demeure. Depuis 1950, 70 % des haies ont disparu des bocages français, qui n'en comptent plus que 750.000 km. Leur régression se poursuit, tantôt à l'occasion de réunification de parcelles, tantôt lors de l'arrêt d'exploitations d'élevage ou simplement pour laisser le passage à des engins agricoles de plus en plus imposants. « La politique agricole, qui a longtemps été défavorable aux haies, les subventionne aujourd'hui au même niveau que d'autres cultures. Mais beaucoup d'argent a été dépensé à fonds perdu puisque pour 1 km planté, 6 km disparaissent », explique Baptiste Sanson. Notre filière est en surproduction et peut produire des plans de qualité supérieure en quantité suffisante. Christophe Ballarin, président du Syndicat national des pépiniéristes forestiers Les services de ces oasis champêtres sont pourtant réels. Les haies freinent l'érosion des sols, retiennent les eaux pluviales, limitent l'évaporation et abritent les cultures du vent. Elles protègent le bétail des intempéries et des chaleurs, hébergent une multitude d'oiseaux, d'insectes et de batraciens et fournissent aux humains des richesses oubliées.  L'art ancestral de la trogne, étroitement lié aux haies, permet de récolter du bois sans couper l'arbre. Les haies peuvent intégrer des arbres à haute jetée pourvoyeurs de bois d'oeuvre tels le chêne ou le merisier, des variétés fruitières ou des arbustes aux fruits exquis tels que le noisetier ou le framboisier. Broyés, les branchages des taillis remplacent la paille dans les étables. Potentiel de biomasse Le programme gouvernemental nourrit tout un écosystème d'entreprises spécialisées, pépiniéristes, paysagistes et autres experts. « Le pacte en faveur de la haie constitue une opportunité intéressante à laquelle nous sommes en mesure de répondre. Notre filière est en surproduction et peut produire des plans de qualité supérieure en quantité suffisante », assure Christophe Ballarin, dirigeant du groupe landais Planfor et président du Syndicat national des pépiniéristes forestiers. Regroupant une trentaine de membres, la petite structure produit chaque année 70 millions de plants forestiers et des centaines de variétés de haies pour un chiffre d'affaires de 30 millions d'euros. Sa plateforme de vente en ligne se classe dans le Top 10 des vendeurs d'arbres et arbustes. Le pacte doit aussi permettre la croissance de pépiniéristes indépendants ou associatifs qui s'appuient sur des entreprises d'insertion ou des centres d'aide par le travail.

TikTok Lite : de l’autre côté de l’écran

By |April 28th, 2024|Categories: Scoop.it|

Pourquoi les dirigeants de TikTok ont-ils lancé une version aussi controversée de leur réseau social - sans doute au pire moment de l'histoire, déjà si bousculée, de leur plateforme - avant de finalement en retirer le très critiqué système de récompense sous la pression de la Commission européenne ? Rappelons les faits : fin mars, une nouvelle venue, TikTok Lite, apparaît sur les magasins d'applications Google Play et App Store, en France et en Espagne, après avoir vu le jour, il y a quelques mois, en Corée du Sud et au Japon. Le fait qu'elle soit « lite », c'est-à-dire conçue pour fonctionner plus rapidement sur les téléphones connectés en 2G ou en 3G, passe inaperçu. Ce qui fait le buzz - ce qui peut déjà constituer un objectif marketing en soi - est qu'elle proposait une rémunération. Les utilisateurs accumulaient des points en découvrant de nouveaux contenus, en « likant » des vidéos, en suivant des créateurs ou en parrainant des amis. Ces points pouvaient être échangés contre des cartes-cadeaux Amazon ou PayPal par exemple, ou contre des cadeaux virtuels à offrir à ses créateurs préférés. TikTok Lite est officiellement réservé aux plus de 18 ans, mais un des systèmes de vérification de l'âge - l'utilisateur doit prendre un selfie - est, avec un peu d'imagination, très facilement bernable… Addiction aux réseaux sociaux Chaque utilisateur ne pouvait accumuler des points qu'une heure par jour, soit un maximum de 2.025 points toutes les 24 heures, rien qu'en regardant des vidéos. Dix mille points (le seuil pour les convertir en carte-cadeau) donnaient droit à un euro. Bref, ce système, addictif, risque de faire passer encore plus de temps aux adolescents sur leur smartphone. Inacceptable, tant le contexte est explosif pour tous les réseaux sociaux, soupçonnés d'être nuisibles pour les jeunes. Le 24 octobre 2023, 33 procureurs américains ont porté plainte contre Meta, la maison mère de Facebook et Instagram, l'accusant d'avoir « déployé des fonctionnalités nocives qui rendent les enfants et les adolescents dépendants » ; au passage, le procureur de Californie, Rob Bonta, avait rappelé qu'une instruction visant TikTok pour des faits similaires était toujours en cours… LIRE AUSSI : DECRYPTAGE - Santé mentale des plus jeunes : les réseaux sociaux sur le banc des accusés 5 questions clés pour comprendre le projet de réguler l'exposition des enfants aux écrans Le lendemain, c'était au tour du Parlement européen de mettre « en garde contre la nature addictive des médias sociaux » ; les députés se disaient « particulièrement préoccupés par l'impact de la dépendance numérique sur les enfants et les adolescents, qui sont plus vulnérables à ces symptômes ». Et en France, à chaque nouveau cas dramatique de cyberharcèlement ou d'hyperviolence des jeunes, le gouvernement pointe du doigt la responsabilité des réseaux sociaux. La situation de TikTok est encore plus difficile. Des deux côtés de l'Atlantique, le réseau, qui appartient à la société chinoise ByteDance, est soupçonné de servir de cheval de Troie aux agences de renseignement de Pékin. Joe Biden a signé mercredi une loi donnant un an à ByteDance pour se séparer de la filiale américaine de TikTok. Sinon l'application sera interdite aux Etats-Unis. ByteDance a annoncé vouloir porter l'affaire en justice. Pourquoi, dès lors, avoir pris le risque de lancer TikTok Lite ? Une première réponse, purement business, explique que ByteDance avait désespérément besoin de booster l'audience de sa vache à lait, en particulier auprès des plus de 18 ans, avant que d'éventuelles sanctions américaines et européennes ne l'empêchent de faire feu de toutes expérimentations. C'est la thèse avancée par le site « The Information », basé à San Francisco. Plus largement, TikTok, au niveau mondial (quelque 1,2 milliard d'utilisateurs actifs mensuels), voudrait rattraper son retard sur Instagram (environ 2 milliards d'utilisateurs). Le 18 avril, la plateforme chinoise a d'ailleurs lancé en Australie et au Canada, un « Instagram killer », TikTok Notes, qui permet de partager non seulement des vidéos, mais aussi des photos. Cobayes Les responsables de ByteDance réalisaient-ils des tests grandeur nature afin de déterminer qui de TikTok Lite ou de TikTok Notes est le plus efficace ? Et si le modèle économique de TikTok Lite était viable ? Une deuxième approche, centrée sur le contenu, révèle peut-être une stratégie à plus long terme : il suffit de passer quelques minutes sur TikTok Lite pour se rendre compte que cette nouvelle application semble proposer plus de contenus générés par une intelligence artificielle et plus de sujets polémiques (extraits de sketches de l'humoriste Dieudonné ; complot américain ayant forcé la Russie à envahir l'Ukraine…) que la plateforme d'origine. LIRE AUSSI : SERIE - La civilisation TikTok TRIBUNE - TikTok : une interdiction peu probable Or pour pouvoir accumuler des points, il fallait regarder uniquement les vidéos proposées par l'algorithme ; le système de récompenses ne s'appliquait pas, en effet, aux clips consultés après une recherche. Impossible donc d'échapper aux images poussées par l'algorithme si l'on voulait s'enrichir (un tout petit peu). Les utilisateurs de TikTok Lite serviraient-ils tout simplement de cobayes à ByteDance, qui testerait leurs réactions aux vidéos générées par l'IA et aux sujets polémiques ? ByteDance aura eu le temps, grâce à ce laboratoire vivant de près d'un mois, d'accumuler pas mal de données…

Elon Musk labels Tesla’s advertising ‘generic’ as it lays off entire marketing team

By |April 28th, 2024|Categories: Scoop.it|

Tesla has laid off its entire marketing team just four months after it was created in a hasty reversal of its nascent advertising efforts, reports claim. The electric car company had famously eschewed traditional marketing efforts but appeared to change tack in 2023 when CEO Elon Musk said the brand would “try a little advertising and see how it goes”, partly inspired by his purchase of the social media platform Twitter (later renamed X). But despite a ‘growth content’ team being formed of around 40 people in the US, overseen by head of global growth content Alex Ingram and growth director Jorge Milburn, the entire unit was laid off on Monday as part of wider layoffs at the company, Bloomberg reports. A small marketing team has been kept on in Europe. Adding insult to injury, Musk took to X to respond to a comment on the Bloomberg story, which criticised the brand’s advertising for being “too generic” and not highlighting what is great about owning a Tesla. Musk replied: “Exactly. The ads were far too generic – could’ve been any car.” What this means for Tesla’s commitment to advertising in the future remains to be seen – but it is reasonable to assume that Musk, who once declared he “hated” advertising, has not been convinced by its first attempts and the prospect of any further work seems small. ‘Range inflation’ is a sign Tesla has lost sight of its customers It comes at a difficult time for the electric car pioneer which has struggled with increased competition and an increasingly poor brand perception. Tesla has embarked on a heavy series of promotional activity to try to stave off competition from China and other US companies, something Marketing Week columnist Mark Ritson described as an “intractable and often existential situation” for manufacturers. Ritson also warned that price cuts are “commodifying” Tesla’s hitherto impressive brand equity. “This very strength is now Tesla’s vulnerability. With each significant discounting event, Tesla could hurt itself,” he cautioned. Its share price has been dropping regularly since December 2023 and while revenue has continued to increase, its profit margins have grown tighter.

A Mayotte, l’urgence permanente

By |April 25th, 2024|Categories: Scoop.it|

Pour rejoindre le quartier de Kaweni, il faut partir de Mamoudzou, la capitale de Mayotte, et prendre la RN1, la grande route qui fait le tour de l'île, puis, après quelques kilomètres, laisser la voiture au bord d'un marché très animé en cette fin de ramadan. La fin du trajet se fait à pied. D'abord en traversant une aire de jeux pour enfants récemment construite à la place d'une friche - « avant, les gens avaient peur de passer ici, car ils craignaient pour leur sécurité », raconte d'entrée Hamidani Magoma, adjoint au maire de Mamoudzou chargé de l'aménagement. Ensuite en montant à travers des ruelles escarpées. C'est la fin de l'école. Par dizaines, les enfants s'égaillent en saluant les visiteurs avec un large sourire. De part et d'autre s'alignent de petites maisons en dur. La municipalité de Mamoudzou présente un programme de construction de huit logements près du cimetière, où des ouvriers, sous une chaleur accablante, s'affairent. Reconquérir les terrains vagues pour en faire du logement social est une priorité. « On proposera des loyers très faibles », explique en marchant Elodie Furic, directrice de la rénovation urbaine de la ville. Mais la réalité s'impose : progressivement, l'habitat en dur du bas de Kaweni laisse la place à des baraques de tôle, les « bangas », comme elles sont surnommées à Mayotte. A l'origine, il s'agissait de cases construites par des adolescents pour marquer leur passage à l'âge adulte. Ils sont devenus un habitat d'urgence pour des familles entières. Kaweni est présenté comme le plus grand bidonville « d'Europe ». Il y en a des dizaines comme celui-là sur l'île et les services de l'Etat sont débordés. « Installés sur des pentes à 50 % » Partout à Mayotte, des Mahorais et des migrants, légaux ou illégaux, habitent dans ces bangas. Certains paient même un loyer, malgré l'absence d'eau potable ou d'électricité. A Kaweni, les bangas, reconnaissables à leurs bâches bleu ciel, grignotent les collines mètre par mètre. « Les gens n'hésitent pas à s'installer sur des terrains avec une pente à 50 %. Cela pose d'énormes problèmes d'aménagement. Il n'y a pas de loi, chacun fait ce qu'il veut et cela donne des bagarres avec la police », reprend Hamidani Magoma. Compter ces habitants relève du défi : selon les pouvoirs publics, sur les 300.000 habitants officiellement recensés à Mayotte - certaines estimations vont bien au-delà et évoquent le chiffre de 400.000 -, le tiers vit dans un habitat insalubre. LIRE AUSSI : ENQUÊTE - Les îles d'outre-mer, premières victimes françaises du changement climatique Mayotte : les malheurs d'un « confetti » français Dans le département, le nombre d'habitants a explosé au cours des dernières années : il a été multiplié par douze en soixante ans et il a augmenté de 50 % depuis 2012. La raison est double : un taux de natalité élevé (quatre enfants par femme en moyenne) et une immigration devenue hors de contrôle. Sur l'île, la moitié de la population est étrangère. Et sur les 100.000 habitants des bangas, la moitié est composée de migrants irréguliers, principalement venus des Comores voisines à bord de pirogues. Route migratoire Mais aujourd'hui, les Comoriens ne sont plus les seuls à venir à Mayotte chercher une terre d'accueil. Les autorités font état de migrants venus d'Afrique (Somalie, République démocratique du Congo…), mais aussi de Syrie, du Yémen ou encore d'Irak. En plus d'être une destination, Mayotte se trouve sur une route migratoire. Les 25.000 expulsions annoncées par les services de l'Etat ne parviennent pas à compenser les arrivées quotidiennes de kwassas kwassas, du nom des canots de pêche traditionnels des Comores devenus transporteurs de migrants. La présence russe pour déstabiliser la région est établie. préfecture de Mayotte La géopolitique s'invite aussi compte tenu de la situation géographique de l'île, qui reste revendiquée par les Comores malgré une indépendance votée par les habitants en 1976. « La présence russe pour déstabiliser la région est établie », lâche-t-on à la préfecture de Mayotte. « Aux Comores, la Russie n'hésite pas à jouer des tensions liées à la situation à Mayotte, allant même jusqu'à se prononcer en faveur d'une Mayotte comorienne », confirme de son côté le dernier rapport de la délégation parlementaire au renseignement. Concrètement, la France accuse la Russie de contribuer à l'arrivée de migrants à Mayotte, en fournissant notamment des moteurs pour les pirogues. Aux Comores, on dit aussi aux malades du choléra d'aller se faire soigner à Mayotte, accuse la France. Le 10 avril, quatre porteurs de la maladie ont été interpellés sur des embarcations en provenance des Comores. Ils venaient de la République démocratique du Congo. Constamment au bord de l'explosion L'île de Mayotte est constamment au bord de l'explosion. La pression migratoire entraîne des conséquences multiples qui font de ce département, statut qu'elle a obtenu en 2011, un endroit à part en France. Outre une proportion inédite d'habitat insalubre, l'île souffre d'une insécurité endémique, principalement du fait de mineurs. Un seul chiffre : le taux de cambriolage est quatre fois supérieur à celui de l'Hexagone, une personne sur deux se dit « souvent » ou « de temps en temps », en insécurité. LIRE AUSSI : TRIBUNE - Mayotte ou la faillite des politiques ultramarines Mayotte devient le 101e département français (2011) Le simple compte rendu de la nuit du 1er avril par les forces de sécurité donne une idée : à 1 h 15, des patrouilles circulant sur la RN1 se sont fait attaquer par une centaine de jeunes à coups de machettes et de cailloux. Après avoir riposté avec des grenades lacrymogènes et des tirs de LBD, les gendarmes ont mis près de deux heures pour dégager les barricades et ramener un semblant de calme. Régulièrement, des bus scolaires et collèges font aussi l'objet d'attaques en règle faites par des bandes de jeunes. Le 10 avril, un record a été battu avec l'attaque de 18 bus scolaires le même jour. Dans les rues, on ne compte plus les voitures de gendarmerie avec des impacts sur leur carrosserie. La nuit, rares sont ceux qui s'aventurent dans les rues. Délinquance « hors norme » Dans une étude rendue en 2021 - la situation s'est dégradée par la suite - l'Insee avait choisi une expression choc pour qualifier la délinquance à Mayotte : « hors norme ». « Les problèmes viennent des étrangers. Ils doivent être ramenés chez eux. On assiste à un remplacement de la population de Mayotte », lâche début avril Laithidine Ben Saïd, maire de Mtsamboro, au nord-ouest de l'île à l'occasion d'une rencontre avec la ministre des Outre-Mer, Marie Guévenoux, à l'assemblée départementale de Mayotte. Les délinquants sont de jeunes Comoriens se retrouvant seuls et de jeunes Mahorais, membres de bandes rivales, qui s'affrontent régulièrement en plus de s'attaquer aux automobilistes ou aux habitations. Face à cette délinquance et à l'immigration, les dérapages verbaux des élus locaux ne sont pas rares. En mars, Salime Mdéré, premier vice-président du conseil départemental, a été condamné à trois mois de prison avec sursis et 10.000 euros d'amende pour provocation à commettre un crime. « Ces délinquants, ces voyous, ces terroristes, à un moment donné, il faut peut-être en tuer. Je pèse mes mots. Il faut peut-être en tuer », avait-il déclaré un an plus tôt avant de regretter ses propos devant le tribunal. Ecoles surchargées Les écoles sont surchargées et sont parfois obligées d'assurer les cours par rotation. « On ne fait pas de l'éducation, mais de la scolarisation de masse et de la garderie », s'alarme un maire de l'île. Souvent, les maires refusent de construire de nouvelles écoles pour ne pas qu'elles servent de pompe aspirante à l'immigration. LIRE AUSSI : TRIBUNE - Mayotte : face au chaos, la nécessité de l'état d'urgence ANALYSE - Immigration : légiférer après la censure La maternité est saturée - sur les 10.000 bébés nés chaque année à la maternité de Mamoudzou, ce qui en fait la plus importante de France. 75 % ont une mère étrangère, souvent sans papiers. L'accès à l'eau potable est structurellement insuffisant (il manque 6.000 m3 par jour). Les infrastructures sont défaillantes. Le chômage est stratosphérique (34 %, soit le plus haut niveau pour un département). L'économie sans aucun dynamisme et le tourisme est quasi inexistant malgré des lagons de toute beauté. Le suivi n'a pas été au rendez-vous Des mesures présentées comme radicales ont été prises, mais les résultats se font encore attendre. Comme l'a rappelé la Cour des comptes, Mayotte avait l'objet de deux plans spécifiques au cours de la dernière décennie. Mais le suivi n'a pas été au rendez-vous. La semaine dernière, le gouvernement a lancé la deuxième opération Wuambushu pour lutter contre l'habitat insalubre et l'insécurité. Le RAID et le GIGN, unités d'élite de la police et de la gendarmerie, sont sur place, ainsi qu'un renfort de plusieurs centaines de policiers portant les effectifs à 1.700. « C'est autant de forces de l'ordre que dans les villes de Nice, Rennes et Montpellier réunies », se félicite-t-on dans l'entourage de Marie Guévenoux. L'opération vise à l'arrestation de 60 chefs de bande et le « décasage » de 1.300 bangas, même si le relogement fait largement défaut. LIRE AUSSI : La France veut redonner du souffle à la coopération régionale dans l'océan Indien CHRONIQUE - Pourquoi l'immigration restera une solution Aujourd'hui, la gendarmerie a le droit de tuer les chiens errants, souvent utilisés par les délinquants pour terroriser la population. Les ventes de machettes, armes le plus souvent utilisées pour les agressions, sont interdites depuis le mois de mars. « La délinquance a atteint à Mayotte un niveau hors norme et la sécurité y est devenue la première préoccupation des habitants. La confiance dans les forces de l'ordre est faible », notait la Cour des comptes dans un rapport publié en juin 2022. Sur place, les habitants ne cachent pas leur impatience. « On souffre ici », lâche une habitante visiblement à bout. « La population est frustrée. La violence peut reprendre n'importe quand », lâche un autre. La crise du stade de Cavani Un brusque regain de tension s'est invité en début d'année. L'occupation du stade de Cavani à Mamoudzou, la capitale, par plusieurs centaines de migrants venus d'Afrique a provoqué un nouvel accès de fièvre dans l'île. Habitants et migrants logés sur le stade se sont retrouvés pour un face-à-face tendu, obligeant le gouvernement à prendre des mesures radicales pour faire baisser la tension : quelque 200 migrants éligibles au droit d'asile ont été transférés dans l'Hexagone. Supprimer le droit du sol, c'est supprimer l'intérêt d'aller accoucher à Mayotte ou de faire une fausse reconnaissance de paternité. Cela ne résoudra pas tous les problèmes, mais cela viendra épuiser les flux liés à la quête d'un titre de séjour. Marie Guévenoux, ministre des Outre-Mer Des barrages montés par des « collectifs » d'habitants ont bloqué l'île pendant de longues semaines avant d'être finalement retirés. A leur tête, des habitants à bout de nerfs. « Les personnes dans le stade venaient de l'Afrique des Grands Lacs. Sont-elles dangereuses ? En bonne santé ? Que va-t-on faire de ces gens en attendant ? On n'a pas les hébergements nécessaires. Le danger est que les gens qui n'ont aucune maîtrise de soi, s'en prennent à tout ce qui passe. Certains Somaliens sont envoyés pour créer une crise ou, je ne sais pas, une guerre civile. Ce sont des jeunes hommes forts », s'alarme la responsable d'un de ces collectifs lors d'une rencontre début avril avec Marie Guévenoux. Fin du droit du sol A peine nommée en février dernier, celle-ci a fait sa première visite officielle à Mayotte. Elle y est retournée début avril, n'ayant d'autre choix que de prendre à bras-le-corps la situation de l'île. « Je suis déjà venue trois fois à Mayotte et je reviendrai début mai. La première fois le climat était d'une extrême tension et l'île soumise à des blocages qui aggravaient la situation sécuritaire », précise-t-elle. Le prix à payer pour la fin des barrages ? La fin du droit du sol, déjà dérogatoire depuis 2018, et celle de la territorialisation des titres de séjour pour les immigrés réguliers et la promesse d'une nouvelle loi pour le développement de Mayotte. « Supprimer le droit du sol, c'est supprimer l'intérêt d'aller accoucher à Mayotte ou de faire une fausse reconnaissance de paternité. Cela ne résoudra pas tous les problèmes, mais cela viendra épuiser les flux liés à la quête d'un titre de séjour. J'assume une mesure radicale et pragmatique », plaide la ministre auprès des « Echos ». A la quasi-unanimité, les élus mahorais sont favorables à la suppression du droit du sol à Mayotte, projet qui nécessite une réforme constitutionnelle . Marie Guévenoux devra aussi convaincre sa propre majorité, qui ne cache pas ses réticences.

Grâce au « halving », le bitcoin divise par deux ses émissions pour doper sa valeur

By |April 25th, 2024|Categories: Scoop.it|

C'est la fin du compte à rebours. Peu après deux heures du matin, dans la nuit de vendredi à samedi a eu lieu le très attendu « halving » du bitcoin, c'est-à-dire la division par deux de la rémunération des « mineurs », les acteurs qui valident, à l'aide de puissants ordinateurs, les blocs qui sécurisent les transactions de la cryptomonnaie. Désormais, ce ne sont plus 900 bitcoins qui seront ainsi émis par jour, mais 450 en moyenne. En général annonciatrice d'une hausse du cours à terme, l'opération n'a pour l'heure pas fait bouger le bitcoin, qui reste autour de 63.700 dollars ce samedi matin. Le protocole qui régit la reine des cryptomonnaies est en effet une mécanique de précision. Tous les quatre ans approximativement, ou plus exactement tous les 210.000 blocs validés sur sa blockchain, cette opération est automatique. Et sa mise en place remonte à la création du bitcoin en 2009. Le concepteur de la cryptomonnaie - caché sous le mystérieux pseudonyme de Satoshi Nakamoto - a décidé qu'il n'y aurait, à terme, pas plus de 21 millions de bitcoins en circulation. Pour préserver sa rareté et donc sa valeur, il a opté pour ce procédé qui permet de ralentir les nouvelles émissions au fur et à mesure que le nombre de bitcoins en circulation augmente. Si, aujourd'hui, plus de 90 % des bitcoins potentiels ont déjà été créés, le volume total ne devrait être atteint qu'en 2140. Un ralentissement programmé des émissions de bitcoin Car, concrètement, les bitcoins sont émis pour récompenser les mineurs qui participent à la validation des blocs - l'enregistrement des transactions dans la cryptomonnaie. Un bloc regroupe un ensemble de transactions, mais comprend également l'empreinte du bloc précédent, et du suivant, formant ainsi une chaîne de blocs - une blockchain - continue et immuable. A chaque nouveau bloc émis, une course informatique est lancée entre les mineurs pour résoudre des équations cryptographiques très complexes.

Les mineurs de bitcoins face à une réduction de moitié de leurs revenus

By |April 25th, 2024|Categories: Scoop.it|

Le choc est violent. « Du jour au lendemain, on perd la moitié de nos revenus », résume Sébastien Gouspillou, le patron de BBGS Mining. Tous les quatre ans environ - ou plutôt tous les 210.000 blocs -, le compte à rebours est relancé. Le « halving » est au coeur du fonctionnement de la blockchain bitcoin et entraîne mécaniquement une baisse de moitié de la récompense des mineurs pour leur travail de vérification des transactions. Avec ce nouveau halving, les revenus des mineurs de bitcoin vont donc diminuer de moitié, passant de 6,25 bitcoins par bloc miné depuis 2020 à 3,125 désormais. Dans le même temps, leurs coûts demeurent cependant fixes, voire augmentent. « Le premier poste de dépenses reste l'électricité », rappelle Sébastien Gouspillou. Car miner du bitcoin a un prix : celui des machines d'abord, et celui de l'énergie pour les faire tourner. En effet, pour miner du bitcoin, il faut résoudre des équations cryptographiques particulièrement complexes et les mineurs sont mis en compétition pour y arriver le premier - une course informatique alimentée par des machines spécialement conçues pour le minage et qui sont très gourmandes en électricité. 10 milliards de dollars de pertes par an Jusqu'à présent, l'augmentation continue des prix du bitcoin a permis de compenser ces coûts d'énergie et a alimenté la croissance du secteur. Depuis que les premières machines spécialisées sont entrées en jeu en 2013, la capitalisation boursière totale de quatorze sociétés minières cotées aux Etats-Unis a atteint environ 20 milliards de dollars, selon un rapport récent de JPMorgan. Mais sur la base du prix actuel du bitcoin, le halving pourrait entraîner des pertes de revenus de quelque 10 milliards de dollars par an pour l'ensemble du secteur. D'après un rapport de Cantor Fitzgerald, publié en janvier, de nombreux géants du minage, dont Marathon Digital, Riot Platforms et Core Scientific, pourraient voir leur rentabilité s'effriter si les coûts pour produire un seul bitcoin ne sont pas compensés par un prix de l'actif assez élevé. Selon la banque d'investissement américaine, le mineur britannique Argo Blockchain et le floridien Hut 8 sont potentiellement les plus  en difficulté après le halving, avec un coût par bitcoin de respectivement 62.276 et 60.360 dollars. De quoi faire trembler les gros noms de l'industrie sur les marchés. Les actions de Marathon Digital, Riot Platforms et CleanSpark ont enregistré une baisse de 17 % à 25 % sur les trente derniers jours. Et le fonds négocié en Bourse Valkyrie Bitcoin Miners a chuté d'environ 28 % ce mois-ci. LIRE AUSSI : DECRYPTAGE - Bitcoin : 3 questions sur le « halving », ce mécanisme qui doit encore accentuer la hausse du cours DECRYPTAGE - Halving du bitcoin : le « choc d'offre » qui affole les marchés Les mineurs parient de leur côté sur une stimulation de la demande suscitée par les ETF Bitcoin au comptant pour atténuer l'effet négatif du halving. Depuis leur approbation en janvier aux Etats-Unis , la dizaine de portefeuilles approuvée a attiré une entrée nette de plus de 12 milliards de dollars. Cette demande a contribué à porter la plus grande crypto à un niveau record de 73.798 dollars à la mi-mars. De plus, cet afflux de liquidité couplé aux inquiétudes liées au halving aurait entraîné une « sous performance » des valeurs boursières des grands acteurs du minage. Celles-ci seraient à la traîne par rapport au prix actuel du bitcoin, explique une note du géant de la gestion d'actifs AllianceBernstein. Et comme le rappelle Sébastien Gouspillou, la rentabilité du minage est toujours dépendante du prix du bitcoin, « halving ou pas ». Consolidation Les coûts élevés et une réduction des marges favorisent la consolidation du secteur : certaines sociétés minières ont acheté des participations dans des concurrents, et même fusionné, comme Hut 8 et Bitcoin Corp, à la fin de l'année dernière. Surtout qu'avec la flambée du cours du bitcoin, les géants du minage se sont constitué de solides réserves pour affronter le halving et se mettre en position d'avaler des concurrents. Dans son dernier rapport, Hut 8 a indiqué que ses réserves totales s'élevaient à 9.105 bitcoins, soit 550 millions de dollars aux prix actuels. LIRE AUSSI : 2028 : comment les cryptomonnaies ont pris le pouvoir DECRYPTAGE - Les traders parient sur la poursuite du super cycle du bitcoin Un autre poids lourd du secteur, Marathon Digital, a accumulé un trésor de guerre totalisant 1,5 milliard de dollars, selon ses derniers comptes, pour lui permettre de financer d'éventuelles acquisitions afin d'augmenter ses capacités. « Nous sommes en mesure d'examiner les opportunités », a déclaré à l'AFP Adam Swick, directeur de la croissance de Marathon. « Le minage du bitcoin a toujours été la course au dernier survivant », souligne le patron de BBGS Mining. Cette consolidation inquiète une partie de l'industrie cryptographique en raison de l'impact du retrait des petits mineurs si leur activité n'est plus rentable. Leur départ pourrait affaiblir la sécurité du réseau, le rendant potentiellement plus vulnérable aux attaques, du moins à court terme, jusqu'à ce que les ajustements ne se réalisent mécaniquement.

Harvard : la chute d’un empire américain

By |April 20th, 2024|Categories: Scoop.it|

Il est 17 heures, les cours sont finis, la rédaction du Harvard Crimson s'emplit doucement d'étudiants-journalistes. Ils posent leur ordinateur dans la salle commune aux murs cramoisis (« crimson »), la couleur officielle de l'université et de la gazette estudiantine créée en 1873. Le quotidien, qui fut présidé par Franklin Roosevelt et John Kennedy, siège dans une belle maison de ville à Cambridge, au coeur du campus de Harvard, dans le Massachusetts. Sellers Hill, actuel président de la publication, un géant dégingandé qui se destine à la médecine, a conscience de documenter un tournant historique pour Harvard. L'université la plus prestigieuse du monde, la fabrique de l'élite américaine, est au centre de multiples polémiques depuis une dizaine de mois. On lui reproche tout à trac de réprimer la liberté d'expression et la liberté académique, de laisser libre cours à l'antisémitisme, d'être un nid de gauchistes et, surtout, de saccager la méritocratie en faisant primer la défense des minorités raciales et sexuelles sur l'excellence universitaire. Aux yeux des Américains, Harvard est devenue l'incarnation du « woke ». Sellers Hill, l'actuel président du journal étudiant « Harvard Crimson » dans son bureau.Simon Simard Pour Les Echos Week-End Il faut remonter à la guerre du Vietnam pour retrouver une telle ébullition sur le campus, avance le jeune homme. Avec quelque chose d'inédit : « L'université n'a jamais connu une telle crise auprès de l'opinion publique, une menace unique pour sa réputation », analyse-t-il. Le Crimson a donc changé d'approche éditoriale. Il s'est mis à guetter ce qui se disait ailleurs sur Harvard, pour démêler le vrai du faux. Tout en prenant de vitesse les médias nationaux sur l'actualité du campus. Miles Herszenhorn, directeur de la rédaction du « Harvard Crimson », dans les locaux de la publication.Simon Simard Pour Les Echos Week-End Pari réussi pour les jeunes journalistes. « On a eu des millions de lecteurs ces cinq derniers mois, des journées avec dix ou vingt fois plus de visites sur nos pages que d'habitude », sourit Sellers Hill. Le président a aussi été bombardé de courriels désagréables de toutes obédiences, notamment au sujet de la guerre à Gaza. LIRE AUSSI : Ces prestigieux étudiants de l'université d'Harvard Une période fascinante aussi pour le directeur de la rédaction, Miles Herszenhorn. L'ex-reporter aux ongles vernis bleu ciel et au sweat-shirt couleur parme s'est rendu au Congrès en décembre pour couvrir l'audition de la présidente de Harvard, Claudine Gay, par un comité parlementaire sur l'antisémitisme dans l'enseignement supérieur. Comme ses consoeurs de Penn University et du MIT, la dirigeante est tombée dans le piège tendu par des députés républicains : elle n'a pas su dire clairement qu'appeler au génocide contrevenait aux règles de l'université. La grande confusion de l'élite « woke », en direct à la télévision. Pression des donateurs Le 3 janvier, Miles Herszenhorn a sorti un scoop, repris dans les médias du monde entier : la démission de Claudine Gay, après six mois tumultueux en poste. La présidence la plus courte de l'histoire d'une institution quatre fois centenaire. Ouch ! Le conseil a cessé de soutenir la présidente quand la pression des donateurs et des politiques est devenue trop forte. Les ennemis de Claudine Gay ont passé au peigne fin ses écrits afin d'y trouver des traces de ce qu'ils ont appelé du plagiat. Quelques unes du « Harvard Crimson », couvrant notamment l'affaire Claudine Gay.Simon Simard Pour Les Echos Week-End Dernière révélation dévastatrice du Crimson, en février : le comité qui avait recruté cette professeure de sciences politiques et d'études afro-américaines n'avait pas examiné ses compétences académiques, juste son expertise administrative. Un peu court. L'affaire Gay a été le point culminant des ennuis de Harvard depuis l'an dernier. Tout a commencé par la défaite judiciaire de juin 2023, lorsque la Cour suprême a mis fin à l'« affirmative action », c'est-à-dire à la discrimination positive en faveur des minorités raciales et sexuelles pour l'admission à Harvard. L'université était poursuivie depuis des années par un activiste conservateur, Edward Blum, qui a juré de rendre les Etats-Unis « aveugles » à la couleur de peau. Le contrepied exact de la doctrine de la Corporation, cette structure administrative opaque qui gouverne l'université. Puis arrive le 7 octobre 2023, date du massacre par le Hamas de 1.200 Israéliens. Une tragédie qui transforme le campus en chaudron contestataire. Le jour même, plusieurs organisations estudiantines pro-palestiniennes déclarent « considérer le régime israélien comme entièrement responsable de tout ce déploiement de violence » dans une lettre ouverte publiée sur Instagram. Un terrible manque de discernement, en ce jour de carnages et de viols. Vue du Harvard Yard, la partie la plus ancienne du campus.Tony Luong/The New York Times-rea Plusieurs signataires se rétracteront ensuite. Mais le mal était fait. Le gestionnaire de hedge fund Bill Ackman, un ancien élève et bienfaiteur qui a plus d'un million d'abonnés sur X, jure que ces étudiants ne trouveront jamais de travail à Wall Street. Une organisation conservatrice fait circuler sur le campus un camion avec la photo et le nom des leaders, désignés « chefs des antisémites à Harvard ». A la suite d'une recrudescence de tensions communautaires sur le campus, une plainte pour antisémitisme est déposée contre Harvard, prélude à une collection de procédures contre les universités d'élite, de Columbia à New York University. Des anciens élèves juifs de Harvard, indignés, forment une alliance forte de 1.800 alumni. Elle appelle à suspendre les donations jusqu'à ce que l'université montre qu'elle protège ses étudiants juifs. « Ces histoires de diversité et d'inclusion, ça suffit, explique l'un de ces mécènes déçus. Harvard a fait ce qu'il fallait pour remédier à ce fléau de l'esclavage, peut-être pas assez, mais il y a des difficultés ailleurs, y compris pour les juifs. » Avocat à la retraite, dans une famille où on est harvardien de père en fils, il a donné chaque année à son alma mater, pendant cinquante ans. Il avait même couché l'université sur son testament. Il a transféré ses dons à une association d'entraide juive, Harvard Hillel. Le milliardaire Kenneth Griffin, qui avait accordé 300 millions de dollars et dont le nom est gravé sur la façade de plusieurs bâtiments du campus, a également interrompu ses donations. Une très mauvaise publicité pour l'université et une lourde menace financière. Ne pas heurter les bien-pensants inclusifs En cette fin mars, au retour de la pause universitaire du printemps, on a du mal à croire qu'il y a eu ici des manifestations monstres en soutien à Gaza, où les négateurs d'Israël chantaient « du fleuve [Jourdain] jusqu'à la mer [Méditerranée] ». Les drapeaux et les banderoles ont été rangés ; les petites annonces purgées. Une bonne odeur d'humus monte des plates-bandes amoureusement entretenues. Le « yard », cette cité interdite verdoyante où se concentrent les étudiants de la première à la quatrième année, a retrouvé sa tranquillité multiséculaire. John F. Kennedy en juin 1940, lors de la cérémonie de remise des diplômes. Parmi les « harvardiens » célèbres, on recense aussi les présidents George W. Bush et Barack Obama, les entrepreneurs Bill Gates et Mark Zuckerberg, les acteurs Matt Damon et Natalie Portman. Et, côté français, l'entrepreneuse Apollonia Poilâne.Alamy/Abaca Tout le monde n'a pas été choqué par les actions protestataires de l'automne. « Ça a vraiment été une période intéressante. J'espère que Harvard est persuadé comme moi que chacun doit pouvoir exprimer ses idées, tant que cela ne fait de mal à personne », commente Raquel, une étudiante noire de troisième année en histoire et en économie. Cette avocate de la liberté d'expression n'ose cependant pas dire si elle se sent libre de s'exprimer à Harvard, car la question lui paraît « trop sensible ». A Harvard, on ne cesse de s'autocensurer, confirme Joey, un jeune homme en short qui court sur le gazon avec un sac à dos chargé. Déjà diplômé du « college », il poursuit ses études à la fac de droit. C'est un oiseau rare par ici : un conservateur, sur un campus où 77 % des élèves se disent de gauche. « Je dois mesurer en permanence si cela vaut le coup de voler un peu dans les plumes de quelqu'un, ou s'il vaut mieux me taire, raconte-t-il. En cours, quand les autres se moquent du capitalisme, qui n'est pas fiable, bla-bla, si tu prends sa défense, on va te critiquer. » L'étudiant est affilié à la Federalist Society, étiquetée conservatrice, et sait que cela fait jaser, car « il y a une stigmatisation ». Rien de bien dramatique pour Joey, qui en rit. Mais parfois, la censure exercée par les étudiants se fait menaçante. En 2021, la professeure de biologie Carole Hooven a été prise à partie après avoir expliqué que certes, les identités de genre devaient être respectées, mais qu'il existait bien deux sexes biologiquement distincts, déterminés « par les gamètes que nous produisons ». Un commentaire « transphobique et nocif » a clamé sur les réseaux sociaux un étudiant responsable de la diversité et de l'inclusion dans sa faculté. Ses cours ont été boycottés, elle n'a pas pu recruter d'assistant. Faute de soutien de l'administration, elle a quitté son poste en 2023. « Elle aurait dû être défendue », juge Eric Maskin, qui enseigne les maths et l'économie à Harvard, et qui a eu pour élève le Français Jean Tirole - les deux sont récipiendaires d'un prix Nobel. Il y a un an, Eric Maskin a participé à la création du Conseil de la liberté académique à Harvard, qui regroupe plus de 170 membres. « Il m'a semblé que la liberté académique était attaquée dans les grandes universités et pas seulement à Harvard, justifie-t-il. Cette montée graduelle des restrictions de ce que l'on peut dire vient de la gauche du spectre politique - la droite crée d'autres problèmes. » Chaque jour, les membres du Conseil rapportent de nouveaux incidents, via la messagerie interne du groupe, assure Eric Maskin. Ils confient choisir soigneusement leurs mots pour ne pas bousculer des élèves à l'identité fragile et très susceptibles. Ici, on a peur de dire « femme », un terme jugé trop agressif, par opposition à « personne s'identifiant comme femme ». Là, il faudrait dire « personne enceinte » plutôt que « femme enceinte » pour ne pas heurter les bien-pensants inclusifs. Manifestation en faveur de l'« affirmative action » devant la Cour suprême à Washington en juin 2023. Peine perdue : la plus haute instance judiciaire américaine a mis fin à la discrimination positive en faveur des minorités raciales et sexuelles pour l'admission à Harvard.Kenny Holston/The New York Times/REA « A un moment, dans les années 2010, il est devenu courant pour les étudiants de dire qu'ils ne se sentaient pas en sécurité quand ils entendaient des choses qui les offensaient », relate la professeure de droit de Harvard Jeannie Suk Gersen, dans un essai paru en janvier dans le New Yorker. Des élèves lui ont d'abord suggéré de retirer de son cours la loi pénale applicable au viol, car cela implique d'étudier également les arguments juridiques pour la défense du violeur - intolérable. « Après cela, les étudiants m'ont demandé de les dispenser de discuter ou d'être interrogés sur les armes, les gangs, la violence domestique, la peine de mort, les problématiques LGBTQ, la brutalité policière, le kidnapping, le suicide, l'avortement », poursuit-elle. Elle a refusé, « mais des professeurs à travers le pays ont accepté des demandes similaires », se désole cette coprésidente du Conseil sur la liberté académique. Des institutions submergées par la culpabilité Puis est arrivé l'assassinat de l'Afro-Américain George Floyd par un policier blanc, en 2020, suivi d'une puissante vague « Black Lives Matter ». Soudain, il a fallu réparer des siècles de torts causés aux minorités, de l'esclavage au patriarcat. En dépit des bonnes intentions initiales, cela a abouti à diviser la société, les opprimés d'un côté, les oppresseurs de l'autre, chacun enfermé dans une identité figée, tout débat empoisonné. « C'est bien de s'affirmer en tant que noir, ou juif, ou gay, et d'être reconnu comme tel. Mais s'il y a un déséquilibre perçu dans la façon de traiter chaque groupe, vous préparez le terrain pour les conflits », observe Harry Lewis. Ce mathématicien semi-retraité enseigne l'informatique à l'école d'ingénieurs John Paulson. C'est sa cinquantième année à Harvard. Il a notamment formé Bill Gates et Mark Zuckerberg. Aujourd'hui, il compare l'atmosphère sur le campus à « de la poudre inflammable ». LIRE AUSSI : Universités : le mal américain Yascha Mounk règle son compte au wokisme « Nous avons en partie créé cela, nous, les enseignants et l'administration, regrette-t-il. L'accent mis pas seulement sur l'identité, mais aussi sur notre devoir protecteur, a incité les gens à exiger d'être protégés de tout ce qu'ils ne voulaient pas entendre. » Après le meurtre de George Floyd, la culpabilité a en effet submergé les institutions. Elles se sont mises à multiplier les gages de repentance. Par conséquent, les départements « diversité, équité et inclusion » (DEI) ont pris de l'ampleur, pour sensibiliser mais aussi policer les attitudes. LIRE AUSSI : Sciences Po, affaire d'Etat Les universités, voulant se montrer exemplaires, sont descendues dans l'arène politique. « Quand il y a eu les grandes manifestations nationales en 2020, la direction de Harvard a pris des positions assez fortes. Résultat, aujourd'hui, les gens ont le sentiment que la réaction de l'administration aurait été plus déterminée si les victimes du 7 octobre n'avaient pas été des juifs », note Harry Lewis. Autrement dit, une minorité qui n'a pas besoin d'être protégée. « Je pense que la présidence de Harvard devrait cesser de prendre position publiquement sur des sujets qui ne sont pas directement en lien avec notre système éducatif », en conclut l'enseignant. La « neutralité institutionnelle », pratiquée à l'université de Chicago, est d'ailleurs une piste étudiée par le nouveau duo dirigeant, le président temporaire de Harvard, Alan Garber, et son numéro 2 John Manning, qui présente la particularité d'être un conservateur. LIRE AUSSI : Harvard, l'université milliardaire Comment Harvard fait fructifier le pactole à 50 milliards de ses étudiants L'autre réforme qui va être scrutée de très près, c'est bien sûr la procédure d'admission, post- « affirmative action ». Elle a été mise en conformité et la direction de Harvard a annoncé le 11 avril qu'elle restaurait les tests standardisés à l'admission, pour favoriser la méritocratie et la diversité sociale. La proportion de noirs va-t-elle dramatiquement chuter à l'arrivée de la nouvelle promotion, en mai ? Les Asiatiques vont-ils tout rafler ? L'an dernier, Harvard avait révélé fin mars avoir admis en procédure avancée 15 % d'Afro-Américains, 30 % d'Asio-Américains, 11 % de Latinos et 2 % d'indigènes, des proportions à peu près stables au fil des ans. La publication des statistiques 2024 a opportunément été repoussée à l'été. Kate (le prénom a été modifié), une étudiante asiatique de troisième année en économie, est persuadée que la discrimination positive va se perpétuer sous d'autres formes : « Les responsables des admissions vont traquer tous les petits détails pour identifier les candidats noirs, par exemple l'endroit où ils vivent », suppose-t-elle. Il y a d'autres privilèges que la race, insinue-t-elle : « Si vos parents sont allés à Harvard et qu'ils sont dans les 1 % les plus riches, vos chances d'entrer à Harvard sont quasiment de 50 %, bravo ! » Dans cette grande université éprise de justice sociale mais égarée en chemin, il y a encore de beaux chantiers à ouvrir.

Les traders parient sur la poursuite du super cycle du bitcoin

By |April 20th, 2024|Categories: Scoop.it|

Après une chute de  8 % samedi provoquée par les tensions entre l'Iran et Israël, le bitcoin (BTC) a regagné une partie du terrain perdu. La crise géopolitique est un nouveau test de sa résilience. Les attaques terroristes contre Israël du 7 octobre n'avaient pas eu d'effet dépressif notable sur son cours, alors autour de 28.000 dollars. Depuis l'irruption des « ETF bitcoin » aux Etats-Unis, l'intérêt et la convoitise des traders n'ont pas été démenties du fait de l'envolée de la leader des cryptos. Les ETF bitcoin, ces instruments cotés à Wall Street, qui suivent l'évolution de la plus célèbre des cryptos ont connu un engouement massif des investisseurs. Ils vont aussi créer de nouvelles sources de profits et d'arbitrage pour les firmes de trading, notamment du monde de la haute fréquence (les automates de trading ultrarapides) et les fonds. LIRE AUSSI : Bitcoin et cryptos : les investisseurs gardent leur calme malgré la correction du marché Les traders et gérants parient sur une poursuite de l'envolée du bitcoin en 2024 Ces nouvelles « briques » de la maison du bitcoin vont renforcer ses fondations en élargissant sa base de clientèle. Elles ne vont pas cannibaliser d'autres produits, notamment dérivés (contrats à terme) selon le sondage réalisé en mars par la firme Acuiti en partenariat avec Avelacom auprès d'une centaine d'acteurs du monde du trading. La grande majorité des sondés estiment que la liquidité et les volumes des marchés de produits dérivés sur le bitcoin ne vont pas souffrir de cette concurrence, voire vont en bénéficier. Les ETF bitcoin vont inciter la moitié des firmes de trading américaines et asiatiques qui n'étaient pas encore exposées aux cryptos à investir dans cette classe d'actifs. Les Européens et les Anglais attendent que l'Europe et le Royaume-Uni rattrapent leur retard sur les Etats-Unis en lançant des produits comparables. Ils sont ainsi beaucoup moins enthousiastes que les Américains sur ces nouveaux produits, un non-événement pour leur développement éventuel sur le bitcoin malgré l'effet très positif sur les cours depuis 7 mois. 100.000 dollars au soleil Après un record à 73.750 dollars (environ 69.000 euros), l'appétit pour les sommets n'est pas comblé. Sur les options, certains traders ont les 100.000 dollars en ligne de mire cette année, voire dès cet été. A ce niveau psychologique, le bitcoin vaudrait près du tiers de la valeur moyenne d'une maison aux Etats-Unis (341.000 dollars). Il s'établit aujourd'hui à près de 67.000 dollars, soit 325 % au dessus de sa moyenne de long terme (depuis 2014), qui s'établit à 15.800 dollars. La réduction prochaine de l'offre de bitcoin (le « halving ») va encore accentuer le déséquilibre entre une demande élevée et des bitcoins de plus en plus rares. Lors des trois derniers halving, qui interviennent tous les 4 ans (28 novembre 2012, 9 juillet 2016, 11 mai 2020), le bitcoin avait gagné entre 3 % et 8,5 % dans les 5 jours suivant l'événement. Anticipée par le marché, cette rareté programmée du bitcoin , est sans doute au moins partiellement déjà intégrée dans les cours. Elle a contribué à la belle performance des gérants. Au premier trimestre, les fonds spéculatifs spécialisés sur les cryptos ont gagné autour de 50 % selon Eurekahedge et Hedge Fund Research. Le fonds crypto - BH Digital - lancé par le hedge fund Brevan Howard a progressé de 34,5 %, selon l'agence Bloomberg. Celui de la firme Pantera a bondi de 66 % grâce notamment à son investissement sur Solana, la 5e crypto du marché, qui a vu son cours doubler au premier trimestre. Le fonds a en revanche réduit ses investissements sur le bitcoin. Cette année, les dix premières cryptos ont, en moyenne, vu leur cours doubler. Les deux leaders, tant en termes de capitalisation que de volume, bitcoin (+58 %) et Ethereum (+43 %) ont connu des progressions moindres, après avoir tiré vers le haut tout le marché à partir d'octobre dernier. La perspective des lancements des produits cotés en Bourse (ETF) tant sur le bitcoin que l'Ethereum a profité à l'ensemble du marché.

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