L’annonce a marqué un tournant dans le paysage de la tech chinoise : le 16 novembre, Tencent, l’entreprise la plus valorisée de Chine, à 375 milliards d’euros (contre 285 milliards d’euros pour Meta, par exemple), a annoncé céder l’essentiel de ses parts dans Meituan, une plate-forme de services très populaire en Chine. Les quelque 23 milliards de dollars (21,5 milliards d’euros) d’actions détenues seront distribués à ses actionnaires. Surtout connu pour WeChat, l’application la plus utilisée en Chine et forte de 1,3 milliard d’utilisateurs dans le monde, Tencent est devenu au fil du temps un superinvestisseur, soutenant des centaines de start-up chinoises et étrangères, et investissant dans des centaines de studios de jeux vidéo. Mais, après vingt ans de développement tous azimuts, l’heure est à la prudence. La cession de Meituan intervient dans un contexte difficile pour le groupe qui a publié un chiffre d’affaires en recul de 2 % au troisième trimestre, à 140 milliards de yuans (19 milliards d’euros). C’est le deuxième trimestre de baisse de suite, une première pour le géant chinois, qui a vu sa valeur boursière fondre de 60 % depuis son pic, début 2021. En 2022, son chiffre d’affaires ne devrait progresser que de 0,5 % à environ 563 milliards de yuans. Soit sa plus faible croissance depuis son introduction en Bourse en 2004, estime la firme de recherche Refinitiv.

Tencent souffre à la fois de la conjoncture en Chine, marquée jusqu’à peu par une stricte politique zéro Covid, et d’une campagne de régulation des plates-formes de la tech. Moins touché que son rival Alibaba, condamné à plusieurs amendes, dont une, début 2021, de 18 milliards de yuans pour abus de position dominante, Tencent n’échappe pas aux attaques des régulateurs contre les pratiques monopolistiques des plates-formes. Face au courroux des autorités, le géant des médias et numéro un mondial des jeux vidéo est obligé de se séparer d’une partie de ses participations.

Ma Huateng, un patron discret
Il y a un an déjà, Tencent avait distribué à ses actionnaires des actions de JD. com, le numéro deux chinois de la vente en ligne, pour un montant de 16,4 milliards de dollars, réduisant ainsi ses parts dans le groupe de 17 % à 2 %. L’entreprise a dû aussi abandonner un projet de fusion entre les deux principaux sites de streaming de jeux vidéo, et mettre fin à ses accords octroyant l’exclusivité des droits de diffusion de musique en Chine à sa plate-forme QQ Music, qui domine ce secteur.
Si, dans ce contexte politique tendu, Tencent s’en est sorti mieux que ses concurrents, c’est à mettre au compte du patron de l’entreprise, Ma Huateng (ou Pony Ma en anglais), dont la discrétion contraste avec la fougue de Jack Ma, le charismatique fondateur d’Alibaba. En octobre 2020, ce dernier avait osé dénoncer la « mentalité de prêteur sur gages » du régulateur bancaire chinois, une insolence punie par l’annulation de l’introduction en Bourse de la filiale financière d’Alibaba.

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