Sous un soleil de plomb, Marion arrache plusieurs mètres cubes de roche dans un fracas assourdissant. Ce monstre d’acier de 700 tonnes les dépose du haut des 64 mètres de sa grue au sommet d’un monticule, soulevant un nuage de poussière qui va jusqu’à masquer les pierres qui roulent, dévalant l’énorme tas déjà constitué. Cette dragline walking, comme on l’appelle dans le jargon de la mine, tient son nom du constructeur d’engins de travaux américain basé dans l’Ohio depuis 1884, repris en 1997 par l’équipementier minier Bucyrus, lui-même racheté en 2010 par la célèbre marque Caterpillar.
Marion, qui peut déplacer son énorme masse à 100 mètres à l’heure grâce à deux gigantesques pieds articulés et extraire jusqu’à 550 m3 par heure, est l’une des quatre pelles mécaniques de la mine de phosphate de Ben Guerir. Depuis 1979, l’Office chérifien des phosphates, l’OCP, y exploite sur quelque 9.000 hectares, d’abord en souterrain puis à ciel ouvert, une partie des gigantesques ressources du Maroc. Le pays détient en effet près de 70 % des réserves connues de ce minerai indispensable notamment à la confection d’engrais pour l’agriculture.
Six mille étudiants, 30 nationalités
A quelques kilomètres de là, dans un décor quasi désertique proche de la ville de Ben Guerir, à une heure en voiture de Marrakech, au sud, et à deux heures de Casablanca, au nord, est sortie de terre en 2017 l’université Mohammed-VI-Polytechnique (UM6P). Ses bâtiments monumentaux, vastes cubes de couleur ocre, abritent bureaux, amphithéâtres, laboratoires, hôtels, restaurants et salles de sport, tandis que des piscines extérieures sont comme des oasis de fraîcheur dans cet univers minéral.
Là, quelque 6.000 étudiants de 30 nationalités, dont 60 % de filles et 40 % de garçons, se préparent à devenir l’élite africaine de demain, tant dans le domaine de la recherche que dans ceux de l’enseignement ou de l’entrepreneuriat. Soixante pourcents de ces étudiants sont entièrement boursiers, 20 % sont semi-boursiers, les 20 % restants payant l’équivalent de 8.000 à 12.000 euros de frais d’étude annuels.
Mais quel rapport entre ce monde de l’excellence académique et celui, rude et plutôt frustre, de la mine ? Un seul et même acteur majeur de l’économie marocaine : l’OCP. Ce groupe international, présidé par Mostafa Terrab, détenu à 95 % par le royaume chérifien et qui a réalisé 114,5 milliards de dirhams de chiffres d’affaires en 2022 (environ 10,6 milliards d’euros), est en effet le promoteur de l’UM6P.
« La genèse du projet remonte à la période 2009-2012, explique Khalid Baddou, directeur du cabinet du président de l’université, Hicham El Habti, et directeur des affaires institutionnelles. Le groupe OCP, gestionnaire de 60 % des réserves de phosphate dans le monde, voulait effectuer un recentrage stratégique visant à moins dépendre des exportations et à transformer le phosphate au Maroc, afin d’apporter plus de valeur ajoutée au pays. »
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