Mais les automobilistes qui vont profiter davantage de cette remise de 15 centimes sont ceux qui consomment le plus de carburant. Or, plus on est aisé, plus on a de voitures et plus l’on roule avec. Selon les données de l’Insee, les 20 % les plus riches dépensent en moyenne environ 1 400 euros par an en carburants contre 700 euros pour le cinquième le plus pauvre de la population. L’effort financier consenti par l’exécutif ira donc majoritairement aux ménages aisés, c’est ce que les statisticiens appellent une mesure « anti-redistributive ».

Absence de ciblage

Et ce n’est malheureusement pas son seul défaut. Alors que la crise actuelle rappelle l’urgence de réduire la demande en pétrole, cette mesure n’incite pas à s’en séparer.

L’or noir représente toujours plus de 40 % de la consommation finale d’énergie en France, dont la quasi-totalité est importée. Ce sont donc les puissances exportatrices qui en profitent. Quand le prix du baril progresse, l’économie française se retrouve étranglée, car ce qui est dépensé en carburant ne l’est pas pour autre chose.

Nous payons aujourd’hui le peu d’actions des gouvernements successifs pour réduire cette dépendance. Comme le rappelait l’économiste Aurélien Bigo l’automne dernier :

« Les mécanismes de la politique de transition énergétique se jouent sur du moyen-long terme, à plusieurs années ou décennies, mais cela fait des années qu’on n’agit que très faiblement sur les différents leviers de transition. Si lors des précédentes hausses des prix des carburants, comme les chocs pétroliers, la crise de 2008 ou le mouvement des gilets jaunes, les pouvoirs publics s’étaient dit qu’il est problématique de dépendre à ce point du pétrole pour les déplacements et avaient agi en ce sens, la dépendance serait moins importante aujourd’hui. »

Anti-redistributive, nocive à terme pour l’économie française, et dangereuse pour le climat… la remise de 15 centimes à la pompe a tous les défauts macro-économiques. Reste à espérer que les décisions prises après les élections tiendront davantage compte du temps long.

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