Le printemps 2024 est la saison des haies. Depuis le mois d’avril et jusqu’en juin, les régions sont invitées à répondre aux appels à projets portant sur la plantation, l’animation et la gestion de 50.000 kilomètres de haies et d’arbres interparcellaires d’ici à la fin de la décennie.

Annoncé à l’automne dernier par Marc Fesnau, le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, le « pacte en faveur de la haie » – avec un budget de 110 millions d’euros pour cette première année – traduit une ambition multiple : intégrées à la stratégie bas carbone, ces plantations doivent produire de la biomasse, restaurer la biodiversité champêtre et initier de nouvelles filières de valorisation. Elles permettront surtout de préserver une ressource végétale négligée qui fait aujourd’hui figure de trésor en péril.

« Le pacte constitue une victoire de l’appel de la haie, que nous avons lancé en 2023 pour valoriser, protéger et reconstituer des linéaires aujourd’hui en très mauvais état. Il accorde plus de moyens à un réseau d’acteurs de plus en plus dense qui s’apprête à s’engager sur le long terme », se félicite Baptiste Sanson, responsable stratégie et projets du réseau Afac-Agroforesterie. L’association d’utilité publique fédère 400 organisations – collectivités locales, entreprises de toute taille, associations de protection de l’environnement ou têtes de réseau agricole – disposées à secourir les haies.

L’art de la trogne
Au cours des trois dernières années, deux autres initiatives, le plan de relance en 2020 (qui avait un volet forestier) puis le programme gouvernemental « Plantons des haies » (destiné aux agriculteurs et doté d’un budget de 45 millions d’euros), ont financé de nouvelles plantations. Mais l’urgence demeure.

Depuis 1950, 70 % des haies ont disparu des bocages français, qui n’en comptent plus que 750.000 km. Leur régression se poursuit, tantôt à l’occasion de réunification de parcelles, tantôt lors de l’arrêt d’exploitations d’élevage ou simplement pour laisser le passage à des engins agricoles de plus en plus imposants.

« La politique agricole, qui a longtemps été défavorable aux haies, les subventionne aujourd’hui au même niveau que d’autres cultures. Mais beaucoup d’argent a été dépensé à fonds perdu puisque pour 1 km planté, 6 km disparaissent », explique Baptiste Sanson.

Les services de ces oasis champêtres sont pourtant réels. Les haies freinent l’érosion des sols, retiennent les eaux pluviales, limitent l’évaporation et abritent les cultures du vent. Elles protègent le bétail des intempéries et des chaleurs, hébergent une multitude d’oiseaux, d’insectes et de batraciens et fournissent aux humains des richesses oubliées. 

L’art ancestral de la trogne, étroitement lié aux haies, permet de récolter du bois sans couper l’arbre. Les haies peuvent intégrer des arbres à haute jetée pourvoyeurs de bois d’oeuvre tels le chêne ou le merisier, des variétés fruitières ou des arbustes aux fruits exquis tels que le noisetier ou le framboisier. Broyés, les branchages des taillis remplacent la paille dans les étables.

Potentiel de biomasse
Le programme gouvernemental nourrit tout un écosystème d’entreprises spécialisées, pépiniéristes, paysagistes et autres experts. « Le pacte en faveur de la haie constitue une opportunité intéressante à laquelle nous sommes en mesure de répondre. Notre filière est en surproduction et peut produire des plans de qualité supérieure en quantité suffisante », assure Christophe Ballarin, dirigeant du groupe landais Planfor et président du Syndicat national des pépiniéristes forestiers.

Regroupant une trentaine de membres, la petite structure produit chaque année 70 millions de plants forestiers et des centaines de variétés de haies pour un chiffre d’affaires de 30 millions d’euros. Sa plateforme de vente en ligne se classe dans le Top 10 des vendeurs d’arbres et arbustes. Le pacte doit aussi permettre la croissance de pépiniéristes indépendants ou associatifs qui s’appuient sur des entreprises d’insertion ou des centres d’aide par le travail.

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